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Synergie des médias : des mesures administratives non sans effets

Mesures du Mininter : saluées d’un côté, réprouvées de l’autre

Martin Niteretse, Ministre de l’Intérieur: « les admicom ne sont plus autorisés à quitter leurs circonscriptions sans autorisation du gouverneur »

Les mesures prises par le Ministère de l’intérieur dans un communiqué officiel du 31 janvier 2023 ont été accueillies par des réactions divergentes dans la communauté. De la mesure administrative prise à l’endroit des administrateurs communaux à la mesure d’harmonisation des prix de la viande sans oublier les mesures de fermeture des cabarets et restaurants malsains, la lutte contre l’oisiveté, la censure des maisons en paille, certaines mesures ne passent pas.

A partir des recommandations émises durant la retraite gouvernementale qui s’est déroulée au début de l’année 2023 dans la province de Kayanza, les ministres ont été instruits d’effectuer des descentes sur terrain afin de réunir les désidératas et les préoccupations de la population et ce, chacun dans son domaine de compétence.

Le 31 janvier 2023, Le Ministre de l’Intérieur Martin Niteretse indique, via un communiqué officiel, ce qui a découlé des échanges avec la population, et exhorte les administrateurs à veiller au respect de l’application de ces mesures. Dans ce communiqué adressé à l’endroit des gouverneurs de province, le Ministre déclare : « En vue de prendre en compte les doléances et les préoccupations de la population et dans le souci de faire respecter les mesures prises, j’ai l’honneur de vous rappeler pour actions, certaines de ces mesures assorties des échanges avec la population. »

Autorisation préalable du gouverneur

Selon cette correspondance, les administrateurs communaux ne sont plus autorisés à quitter leurs circonscriptions sans autorisation préalable du gouverneur. Il en sera de même pour la participation dans les réunions organisées par les partenaires. Mais quelles étaient réellement les conséquences jusqu’ici ? Un observateur sous couvert d’anonymat salue la mesure et explique pourquoi : « Il y a des administrateurs qui partent dans leurs affaires privées avec les véhicules de services en se servant des charges communales. Cette décision vient donc à point nommé, car la mesure va avoir un effet contraignant, préventif et protecteur », explique-t-il.

Mesures d’hygiène et harmonisation des prix de la viande

Parmi les mesures figurent les dispositions d’harmonisation du prix de la viande. A l’intérieur comme en mairie de Bujumbura, un kilo de viande sans os doit être dorénavant vendu à 11.000 Fbu et 10.000 Fbu pour un kg de viande avec os. Alors que les acheteurs se réjouissent de cette baisse des prix, les bouchers, eux, se lamentent et disent travailler à perte.

Sébastien Ntakarutimana, dit Mupago, est un boucher qui effectue son commerce en Mairie de Bujumbura. Pour lui cette mesure n’a pas pris en compte certaines réalités autour du commerce de la viande : « Aujourd’hui le coût des vaches n’est pas le même sur l’étendue national », expose-t-il. Quand je m’approvisionne à Gihanga, il y a plus de chances que je revoie les prix à la baisse alors que si je dois me rendre à l’intérieur du pays pour m’approvisionner, je dois augmenter les prix pour espérer une marge de bénéfice vu les charges occasionnées. »

Mamert Ndikuriyo, un autre boucher du marché de Ruvumera, explique : « En respectant ces prix du gouvernement, les bouchers ne tirent pas de profit.  Nous pouvons acheter la viande à 9500 Fbu pour la revendre à 10.000 Fbu. La quantité de Kilogramme qu’on vendait par jour a significativement baissé, par peur de perdre. »

Les hôtels, les restaurants et les cabarets qui ne remplissent pas les mesures d’hygiène sont désormais scrutés à la loupe par la mesure qui vise à fermer tout établissement insalubre. Si la majorité est favorable à l’intégrité de cette mesure pour le maintien de l’hygiène, les propriétaires de ces commerces demandent une mesure d’accompagnement.

Parmi les témoignages recueillis, les responsables demandent à ce qu’il soit accordé un délai de préavis avant que la sentence ne leur tombe pas dessus par surprise. « Nous apprécions ces mesures, mais elles devraient tout de même être accompagnées. Si un agent mandaté par le Ministère constate que mon lieu de commerce ne respecte pas les mesures d’hygiène, ce serait mieux qu’il m’accorde un préavis ! »

Lutte contre l’oisiveté et Maison en pailles

L’autre mesure qui figure dans cette circulaire prévoit que désormais les sans-emplois qui errent dans les villes doivent être soumis aux travaux d’intérêts publics, et ce, bénévolement. Cette mesure a d’ailleurs commencé à être mise en œuvre dans la mairie de Bujumbura et dans d’autres provinces comme Bubanza, Rutana et Muyinga.

Néanmoins, le bien-fondé de cette mesure risque d’être mal compris par pas mal de gens. Au Burundi, il n’y a aucune loi qui interdit les gens de se rencontrer, sauf cas majeur (santé ou défis sécuritaires). A cela s’ajoute la situation inquiétante du chômage qui s’observe dans le pays.

Alain est un jeune de 32 ans, diplômé en Sciences sociales à l’Université Sagesse d’Afrique. Le 30 janvier 2023, il était dans l’équipe de jeunes sans-emplois trouvés à l’endroit communément appelé Bata, au centre-ville de Bujumbura, pour être emmenés à participer dans les travaux de rénovation du stade Intwari.

Une maison en paille à l’intérieur du pays

Il raconte : « Je viens de passer 3 ans au chômage. Dans le souci de me trouver une activité génératrice de revenus, je me rends souvent à Bata pour chercher des téléphones à bas prix, les réparer et les revendre à un prix nettement élevé afin de tirer de petits bénéfices. Ça me permet de joindre les deux bouts. » Et il déplore : « Survivre à Bujumbura est un casse-tête. Je suis un jeune chômeur qui ne baisse pas les bras malgré les difficultés, mais j’ai été assimilé à un délinquant ce jour-là. »

Selon le même communiqué, « l’administration doit veiller à ce qu’il n’y ait plus de mariage dans des maisons en paille ». Mais qui voudrait vivre dans une maison en paille ? Les gens construisent des maisons en paille parce qu’ils n’ont pas l’argent qui leur permet d’avoir un logement décent ». C’est ce que nous explique un sociologue, sous couvert d’anonymat.

Selon lui le Gouvernement devrait apporter une réponse claire à cette question sociétale, tout en prenant en compte la conjoncture actuelle relative aux conditions de vie de la population burundaise. « Oui, il faut lutter contre les maisons en paille, mais faudrait-il encore plus que le Gouvernement s’investisse dans cette question en faisant tout ce qui est possible pour améliorer les conditions de vie de la population burundaiseL’instauration d’une loi précisant les conditions requises pour prétendre au mariage, incluant les revenus du ou de la mariée, pourrait servir de voie de sortie également », conclut-il.

Par Dieudonné Bwitonzi et Noriega Vyizigiro, Magazine Jimbere

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