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Tarif de transport en hausse : la pilule difficile à avaler

Les nouveaux prix du ticket de transport en commun décidés récemment, sont venus empirer une situation déjà précaire des consommateurs qui ne savent plus à quel saint se vouer. Ils demandent au gouvernement de redresser la pente. Même son de cloche de la part de l’Abuco et de la Parcem.

Le 28 avril 2022, le ministère de l’Hydraulique, de l’Energie et des Mines annonce, via un communiqué, la hausse des prix du carburant à la pompe : l’essence super passe de 2.700 à 3.250 Fbu le litre, le gasoil de 2.650 à 3.450 Fbu et le pétrole de 2.450 à 3.150 Fbu. En provinces, les prix varient selon les localités lit-on dans le même communiqué.

Quelques jours après, le ministère du Commerce annonce, à son tour, la révision à la hausse du tarif de transport en commun. Ainsi, en Mairie de Bujumbura, le ticket passe de 450 à 550 et de 600 à 1000 Fbu pour les quartiers périphériques.

Depuis, les usagers des véhicules de transport et les consommateurs burundais en général ne savent plus sur quel pied danser car ces hausses des prix viennent empirer une situation déjà précaire. « Avant j’achetais un sac de bois de charbon à 35 mille Fbu mais depuis la pénurie de carburant, le prix a doublé », indique une dame rencontrée à la 12ème avenue en zone Cibitoke.

Gratien Butoyi, propriétaire du dépôt de charbon de bois sur place explique qu’il n’a pas d’autres choix que de vendre un sac de charbon de bois à 70 mille Fbu. Il y a un mois, confie-t-il, le même sac coûtait 55 mille Fbu. La pénurie de l’or noir serait à la base de cette hausse : « Les fournisseurs de charbon me vendait un sac à 50 mille Fbu mais je l’achète actuellement à 65 mille Fbu pour le revendre à 70 mille. Ils expliquent cette hausse par la pénurie du carburant et d’autres facteurs. »

Lourd tribut payé par le consommateur

Ces propos sont corroborés par un conducteur de camion qui fait régulièrement la navette Bujumbura-Mahwa à la recherche du charbon de bois. Sous anonymat, il confie qu’il ne fait plus la queue sur les stations-services à la recherche du Mazout : « Sinon j’aurais déjà arrêté mon boulot. On se débrouille pour acheter ce produit par bouteille en plastique  souvent à 10 ou 15 fois plus cher que le prix officiel, donc cela doit se répercuter sur le prix du sac au final. » Du coup, poursuit-il, un sac acheté à Mahwa ou à Ryansoro à 30 mille Fbu, est revendu à Bujumbura à 65 mille Fbu aux détaillants.

Les usagers du transport en commun quant à eux, ne savent plus où donner de la tête également. « Avec la dernière hausse du prix du carburant, tout le monde pensait que les files sur les parkings ne seraient plus qu’en lointain souvenir mais ce n’est pas le cas », se lamente un jeune fonctionnaire rencontré en plein centre-ville de Bujumbura sur le parking des bus desservant les quartiers nord de la capitale économique. Interrogé à ce sujet, un conducteur de bus nous rétorque quela plupart des stations-services sont toujours à sec malgré la hausse du prix de l’or noir. « Attendez-vous plutôt à une prochaine hausse à la pompe prochainement », prévient-il.

Jacqueline Ndayizigiye, débout sur la ligne centre-ville-Carama en attente sans espoir d’un éventuel bus qui viendra écoute attentivement avant de lancer : « Eux, ils parlent encore alors qu’ils ne payent qu’un ticket à 550Fbu. Moi, je paye 2000 Fbu pour un aller/retour tous les jours pour aller travailler au centre-ville. C’est presque la moitié de mon salaire mensuel. »

Le panier de la ménagère touché en plein fouet

Et d’expliquer que la dernière hausse des prix de transport est venue empirer une situation délétère dans laquelle vivent les citadins : « J’ai trois enfants qui étudient ici même au centre-ville. Cela veut dire que mon mari et moi devons débourser 10 mille Fbu chaque jour juste pour le transport. Comment allons-nous vivre sachant qu’à côté, l’on doit laisser de côté une somme au moins de 15 mille Fbu pour la nourriture sans parler d’autres dépenses ? »

Cette hausse des prix du carburant, conclut-elle, a des incidences sur presque tous les produits de première nécessité. Et de ce fait, les familles ne savent plus joindre les deux bouts du mois, tenant compte du pouvoir d’achat du citoyen lambda : « Le gouvernement devrait revoir à la hausse les salaires sinon cette situation n’est plus tenable. »

Côté vendeurs des denrées alimentaires, les lamentations sont les mêmes. « Comment ne pas hausser les prix des aliments à la vente comme le haricot, les pommes de terre quand ceux qui t’approvisionnent les haussent de leur côté. »

Contrôler les prix pour éviter les spéculations

Toutefois, reconnait ce marchand, certains jouent à la spéculation des prix pour faire beaucoup de gain : « Ça s’observe pour le sucre, le ciment Buceco et parfois sur les produits Brarudi alors qu’ils sont tous produits à localement. Pour lui, soit la production ne satisfait plus la demande intérieure, soit cette pénurie est le résultat d’une spéculation chronique.

Même son de cloche de la part de Pierre Nduwayo, président et représentant Légale de l’Abuco (Association burundaise des Consommateurs) qui dit ne pas comprendre la pénurie de certains produits comme le sucre alors que la SOSUMO (société sucrière du Moso) ne cesse de dire qu’elle produit une quantité suffisante pour le marché intérieur. « Il y a visiblement des entreprises qui n’ont pas la capacité de satisfaire la demande locale. » 

LeGouvernement, suggère M. Nduwayo, devrait prendre des mesures appropriées pour redresser la situation d’autant plus que ces sociétés jouissent du monopole de ces produits : « Et l’une des solutions serait de permettre à d’autres opérateurs économiques d’importer ces produits. »

Pour Faustin Ndikumana, président et représentant légal de la PARCEM, c’est toute la chaîne de commercialisation et de distribution de ces produits qu’il faut revoir : « Il faut stopper cette collision entre opérateurs économiques et hommes politiques qui s’immiscent dans les affaires commerciales alors qu’ils n’en ont ni droit ni moyens. C’est la première source des spéculations observées et de la corruption. » Ensuite, l’Etat doit contrôler si les prix fixés officiellement sont respectés sur le marché pour éviter que les consommateurs soient pénalisés doublement.

Jimbere a contacté le porte-parole du Ministère en charge du Commerce sans succès.

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