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« Sois jeune et ferme-la ! » : le fardeau de la jeunesse burundaise

Selon l’ISTEEBU, les deux tiers de la population burundaise sont âgés de moins de 25 ans. Cependant, la jeunesse est souvent vécue comme un handicap. Taxés d’inexpérimentés, l’institut a révélé que le chômage chez les jeunes est trois fois plus élevé que chez les personnes âgées de 35 et plus. Avec cette situation, ils deviennent alors des proies faciles pour ceux qui sont censés être leurs « guides infaillibles ». Tendance que certains jeunes commencent à fustiger …

Ce que vous faites pour moi sans moi, vous le faîtes contre moi. La substance de ce mantra de Gandhi ne perd point en validité dans le contexte burundais. Malgré le très enjoliveur « Ukuri kuvuga uwukuzi ntikuvuga uwukuze », peu sont les jeunes qui n’ont pas reçu en pleine figure un sec« Abana b’ubu ! »qui, dans un sous-entendu à peine caché – et Dieu sait combien le Kirundi en est riche – insinue que la jeunesse ne sait pas, et par ricochet, elle devrait se taire parce qu’inexpérimentée et sujette aux erreurs de jeunesse.

Des modèles de la jeunesse en action …

Prenant à contre pied la citation de la Rochefoucauld selon laquelle la jeunesse serait une ivresse continuelle voire une folie de la raison, des jeunes se lèvent et se font une place sur l’agora et sont présents dans le débat public. « Normal », trouve Huguette Izobimpa, championne nationale du slam qui depuis son sacre, sillonne pas mal de pays en Afrique sur des scènes de slam. Pour elle,  « l’art dans son sens le plus large, permet à la jeunesse de donner son point de vue, et de vivre ces moments que le quotidien nous arrache très vite et offre une façon de partager ses idées ».

Ayant placé les jeunes au centre de son projet dans la dernière compétition Miss Burundi, Bernice Nikuze qui disait vouloir utiliser le statut de reine de beauté pour « mener loin la voix des jeunes Burundais », n’a pas lâché sa vision une fois la couronne suprême sur la tête. Son initiative, Jeunetalent.bi, un site alimenté par des bénévoles relayant des succèss stories de leurs pairs afin de gagner en visibilité, offre à des « Mozart » assassinés par un manque de place dans le mass média, un havre d’expression. Et à l’ère des réseaux sociaux, la pensée du jeune Murundi se fait de plus en plus audible.

La jeune romancière, Bernice Muhoranamana dont le premier opus parle effectivement des vicissitudes d’un dealer malgré lui, s’insurge contre cette vision réductionniste dont est victime les jeunes : « On nous dit, fais ceci, fais cela. Au finish, on retrouve des gens qui vivent une vie qui n’est plus la leur parce qu’ils sont impulsés par l’envie de plaire à Untel », s’explique-t-elle. Sans idéaliser la jeunesse et ne rejetant pas à bloc toute perche tendue par les aînés, l’auteur de « Loin d’un conte de fées » trouve que « se réapproprier leurs histoires, les raconter sans une arrière-pensée de condescendance légitimée par l’âge serait un bon moyen de marquer une présence effective et trouver les remèdes aux maux propres à cette catégorie de la population ».

Jadot Nkurunziza, un des écologistes Burundais les plus en vue – actuellement, il représente le Burundi dans un Sommet international sur le volet environnemental du gigantesque projet de la Chine, Une Ceinture, Une Route – appelle à un changement de mentalités.« En finir avec la mentalité du ‘sindabibazwa’ (le je-m’en-foutiste) et savoir que nous devons être prêts à reprendre le témoin que les ainés nous laisseront ».

Pour être des vrais partenaires essentiels au changement, il va sans dire que cela passe aussi par ne pas s’attendre à ce que tout soit servi sur un tableau en or. Se réapproprier son récit, l’exposer sans complexe aucun, un des voies que doit emprunter la jeunesse pour se faire entendre et être des acteurs actifs sur les questions qui les concernent.

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