Alors que les Centres d’enseignement de métiers avaient fait renaître l’espoir auprès des jeunes qui ont écourté les études, peu d’entre eux sont intéressés. Le manque de matériel et des filières non adéquates expliquent ce désamour.
Etienne Ntakarutimana, directeur du CEM de Gisuru (Ruyigi) n’y va pas par quatre chemins : «La plupart des jeunes d’ici ne sont pas intéressés par des filières dont nous disposons.» Selon lui, seule la couture a pu avoir des candidats jusqu’ici, mais là aussi en effectif réduit. Le constat est sans appel. Lorsque l’école a fait appel à l’inscription dans les quatre filières (maçonnerie, menuiserie, couture, agri-élevage) que compte l’école, seuls 11 apprenants se sont fait inscrire dont 2 garçons dans la couture.
La raison avancée par la communauté, indique Ntakarutimana, est le caractère archaïque des formations dispensées : « Ces jeunes veulent des filières plus ou moins urbaines. Nous en avons été témoins lorsque nous avions la filière de mécanique et soudure. Les apprenants affluaient de toutes parts. »Le centre voudrait bien offrir une formation adaptée aux besoins de la communauté comme le souhaitent ces jeunes. Malheureusement, ce vœu est irréalisable. : « Ces innovations exigent de lourds investissements dont ils ne disposent pas. » Bien plus, fait savoir ce directeur, e centre souffre d’un manque criant de personnel enseignant : « Nous avons un seul enseignant permanent. L’administration se relaie pour dispenser les autres cours selon les compétences de chacun. »
A Karusi, les réalités sont similaires. Alors que chaque commune devrait disposer de son propre centre, seul celui du chef-lieu de la province est fonctionnel. La raison est le manque de moyens de fonctionnement. « Même celui-ci souffre de ce manque, ce qui fait qu’il ne répond pas aux aspiration des jeunes de notre localité. Pourtant, le nombre des jeunes chômeurs ne cesse de croître. Le peu de candidats viennent des coins reculés de la province », fait savoir Gabin Ntakarutimana, le préfet des études au CEM Karusi.
Le service public appelé à s’investir davantage
Laissés à leur propre sort, les centres de métiers ne sont pas capables d’accomplir leur mission. La jeunesse aspire à des filières qui correspondent aux réalités du moment comme les TIC, la mécanique, la soudure, l’électricité qui leur donnent des espoirs de vivre dans les villes. « Les sections dont nous disposons exigent des efforts physiques, ce qui n’est pas du goût des citadins », martèle ce préfet des études.
Pire, indique-t-il, même dans les sections où le centre dispose du matériel, celui-ci est dérisoire. Le peu d’engouement affiché par ces jeunes pour les CEM réside encore dans le fait que les lauréats ne parviennent pas à se lancer dans la vie active suite à la pauvreté dans leurs familles.
A côté des questions financières qui constituent un défi majeur, l’amélioration de la qualité de l’enseignement et la formation des formateurs sur le maniement des appareils modernes sont à tenir en considération. « Il arrive que nous recevons des dons d’appareils nouveaux mais faute du personnel formé pour les manier, ils ne servent à rien. » Gabin indique que plus d’une fois, un appareil a été détruit au moment de son installation, car ceux qui avaient tenté de l’installer ne s’y connaissaient pas. Et de prévenir que si le ministère en charge de l’enseignement des métiers ne s’y investit pas assez suffisamment, le projet pour ces jeunes ne sera pas une réussite totale.