Interdits, expressions indues caressant les abysses de la mysogynie, ou pire encore révélant au grand jour l’avarice de la gent masculine. « Umwigeme ni akarago k’abaraye », « umugore ni umwana »… ces adages venus d’un autre temps ont malheureusement la peau dure. Si la société n’impose pas explicitement silence à la femme, au nom de « Nta nkokokazi ibika isake zihari », elle la pousse à s’effacer face à l’homme, car « Amazi make aheberwa impfizi ». Elles en ont vu de toutes les couleurs et elles en voient toujours !
Ces inconvenances, incivilités… peu importe comment on les appelle, ont laissé des marques indélébiles: la femme s’interdit elle-même des privilèges auxquels elle a sûrement droit. Si à Buja-la-belle, nos mamans et tantes se permettent de prendre parole en public lors du mariage de leurs enfants, les Burundaises des bananeraies, dans cette ruralité agricole, tête couverte d’un tissu en soie, ne s’offriraient sans doute pas une telle audace.
Dans ce numéro, Jimbere vous dresse un tableau de notre société et de sa culture sous l’angle de ces barrières qui bordent le quotidien d’une femme au Burundi. Jusqu’à récemment prises comme paroles d’Évangile, leur portée s’affadit progressivement avec le temps, libérant lentement la femme et son potentiel de réalisation.
Étiquetée à tort ou à raison de machiste, la société burundaise se défait donc de ces adjectifs peu enviables, dans un processus certain, même s’il prend du temps. D’ailleurs cette même société qui a longtemps infantilisé la femme l’encense aussi en la traitant d’igikingi c’irembo (la colonne centrale du ménage) ou en rappelant sa dignité : l’adage dit que « Umuhushatunga ahusha umugore » (Celui qui rate de richesse, rate de femme).
C’est bien connu : sans la femme, le monde serait d’un terne…