L’Anagessa peine à vendre la production du maïs collectée lors de la dernière campagne à cause de la concurrence que lui imposent les nouvelles récoltes de cette céréale. D’aucuns en appellent à la mise en place d’une politique claire de la constitution des stocks stratégiques…
C’est une rivalité, auprès du consommateur du maïs, entre la nouvelle récolte et celle mise au marché par Anagessa. 2.100, 2.300 puis 2.000 BIF, c’est le prix auquel cette céréale s’est successivement achetée depuis le lancement de la campagne de vente le 19 décembre 2024.
Cependant, les stocks peinent à se vider à cause de la coïncidence de l’ancienne et de la nouvelle récolte de maïs déjà disponibles sur le marché. Et pour cause, la plupart des consommateurs snobent la dernière récolte qu’ils jugent « dépassée » et pourtant chère. Ce 9 février, un habitant de la commune Rango en province Kayanza se réjouissait : « Chez nous, un kilo est acheté entre 1.100 et 1.200 BIF. »
Pour pousser les consommateurs et autres commerçants à acheter cette ancienne récolte, le trafic de cette denrée est soumis à une condition : pour les commerçants, le transport transprovincial du maïs doit prouver que le produit en question provient des stocks d’Anagessa.
La contrainte comme solution
Comme c’est le cas dans différentes provinces, l’Anagessa est en pleine vente du maïs se trouvant dans les stocks. Et pour l’acheteur, s’approvisionner est tout un processus.
Dans la région de Kumoso (Est du Burundi), les acheteurs ayant besoin d’une quantité inférieure à 100kg doivent s’associer pour acheter entièrement un sac de 100kg. Et comme c’est indiqué dans le communiqué d’Anagessa, un acheteur paie sa commande auprès des comptes ouverts dans la Coopec ou encore à la BRB, puis présente les pièces justifiant le paiement pour rentrer avec le produit.
En province de Kayanza (Centre du Burundi), moins de 130 tonnes sont déjà achetées sur un total de plus de 7736 tonnes collectées.
Sur 71.000 tonnes collectées par l’ANAGESSA sur tout le territoire national avec un budget de plus de 100 milliards de BIF, la quantité déjà vendue n’est pas encore connue. La direction générale de l’Anagessa, qui en est la source sûre, n’a pas encore fourni ces chiffres.
L’abondance ne nuit pas

Alors que d’aucuns s’inquiètent de cette coïncidence sur le marché du maïs, Emery Ndanga, secrétaire exécutif du FOPABU Ijwi ry’umurimyi, estime que le Burundi devrait tirer des leçons qui s’imposent et mettre en place une politique claire de constitution des stocks stratégiques : « S’il trouve que ce maïs n’est pas bien acheté, le gouvernement, à travers l’Anagessa, devrait plutôt s’engager à constituer des stocks stratégiques qui peuvent durer même 5 ans, comme cela se passe dans d’autres pays. » Un pays qui n’a pas de telles réserves, martèle-t-il, est voué au risque d’insécurité alimentaire à un certain moment.
Et d’appeler les populations rurales à une planification responsable de leurs consommations et vendre réellement le surplus de leurs récoltes : « Ils doivent constituer des réserves familiales afin de pallier au rachat des produits alimentaires au prix élevé. » Pour cela, M. Ndanga suggère la multiplication des hangars communautaires remplissant toutes les normes de conservation sur toutes les collines afin de permettre aux familles de constituer des réserves alimentaires.
Digitalisation, une méthode pratique
Outre la constitution de ces stocks et de ces réserves, le secrétaire de FOPABU propose la digitalisation dans la gestion du secteur agricole en général et de l’Anagessa en particulier : « Cela permettrait au ministère de l’Agriculture d’avoir des données sur les terres cultivées pour chaque saison et pour chaque culture, mais également d’identifier les agriculteurs afin d’éviter les spéculations lors de la collecte des récoltes. »
De plus, avec cet outil, il deviendra aisé de prévoir le budget alloué à l’achat des récoltes et d’éviter les paiements tardifs et les achats à crédit qui se sont enregistrés durant la campagne de collecte du maïs.
Lors de la présentation des mesures de l’Anagessa pour conserver efficacement le surplus de la récolte de maïs, Joseph Nduwimana, ancien directeur de cette agence, avait promis la réhabilitation des silos de Gitega pour fin 2024 en partenariat avec FIDA. À l’heure actuelle, aucune nouvelle.
