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La femme de Gihanga et le vélo, un amour fou

Deux femmes à vélo à Gihanga

3 juin: Journée mondiale de la bicyclette. Dans pas mal des coins du Burundi, la pratique du vélo est perçue comme étant une chasse gardée des hommes. Chose qui étonnerait plus d’un à Gihanga où la gent féminine entretient une relation indéfectible avec la bicyclette. Reportage

Il est midi tapantes. Les rayons du soleil ardent tapent fort sur l’endroit communément appelé “Kw’i dorsale” de Gihanga. La circulation est dense. De part et d’autre de la route viennent et vont motos, voitures et vélos. La scène serait banale si une grande partie de ceux qui se déplacent sur les bicyclettes n’étaient que…des femmes, de tous âges. Angélique, la cinquantaine, enfourche son vélo avec une facilité qu’on ne lui attendrait pas, vu son âge. « Dès ma tendre enfance, je me déplace à vélo pour toutes mes courses ici à Gihanga, ou pour me rendre à Bubanza », confie-t-elle, surpris qu’on s’en étonne.
Idem pour Dorothée, 18 ans, avec sur le porte-bagage de son vélo trois bidons d’eau remplis d’eau: «
La vie est tout simplement impensable ici sans vélo, tranche-t-elle. Pour rien au monde, une fille de Gihanga n’accepterait de puiser de l’eau en portant des bidons sur la tête. Ça, je n’ose même pas me l’imaginer ».

La bicyclette, un bras droit

Le vélo est à Gihanga ce que le dromadaire est pour les populations des régions désertiques. Dans cette région fortement rizicole, quasiment tout lopin de terre est réservé à la culture du riz. Quand la période de moisson arrive il faut transporter la récolte aux ménages pour le séchage qui précède le décorticage des balles de riz. « Tout cela serait un chemin de croix si nous devrions le faire en utilisant nos têtes. Quand la saison a été bonne, on fait plusieurs tours, avec des porte-bagages de nos bicyclettes chargés comme pas possible », raconte Régine qui, malgré les cheveux blanchis par l’âge, transporte trois sacs de riz paddy avec aisance.
Si les femmes de Gihanga se différencient d’une grande partie de leurs consœurs burundaises pour leur inclination au vélo (sauf dans une autre plaine du pays, dans le Kumoso, après les dépressions du Sud-Est), un trait d’union demeure : la charge qui leur incombe des tâches ménagères.
Et dans cette besogne, elles peuvent compter sur un bras droit indéfectible, la bicyclette.

Plus qu’un moyen de locomotion

Au-delà de sa fonction de moyen de déplacement, le vélo revêt aussi une dimension sociale. Jusqu’à peser dans le choix de son futur conjoint. Un homme sans vélo serait vu comme un homme incomplet, quoi. Sourire aux lèvres, Régine se remémore l’époque ou son mari et elle étaient encore fiancés et le rôle crucial qu’a joué le vélo dans leur histoire. « Il avait un vélo bien neuf. Cela me rassurait parce que cela représentait pour moi un homme comme il faut, responsable, chez qui tu ne vas pas crouler sous le poids des travaux ménagers ». Et une fois installée dans son foyer, le vélo devient quasiment la propriété de la maîtresse des céans.
L’homme s’occupe de la réparation, en cas de panne.

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