Lundi 16 mars, le ministre burundais de la Santé appelait au calme, annonçant que le virus n’a pas encore envahi le Burundi. Et d’interpeller la population à la vigilance et au strict respect des conseils de prévention prescrits par l’OMS. Jimbere a sillonné quelques lieux stratégiques pour se rendre compte de l’état des lieux. Reportage.
Comme ailleurs, pour se prévenir contre la propagation de la pandémie, les autorités sanitaires ont adopté la technique de la pédagogie : « Il faut se laver fréquemment les mains avec de l’eau propre et du savon/chlore, éviter les contacts physiques et se couvrir le nez avec un mouchoir ou à l’aide du coude quand on éternue », voilà ce qu’elles ne cessent de répéter. L’eau et le savon constituent donc, en quelque sorte, le salut du peuple burundais jusque-là à l’abri de cette terrible grippe contrairement aux pays limitrophes déjà touchés. La question : ces armes sont-elles disponibles dans les places publiques ?
Stade Intwari …
Ce mardi, aucun match prévu. Facile alors de se glisser incognito dans les gradins vides et silencieux pour satisfaire notre curiosité. A l’entrée, aucune cuve d’eau, ni de savons en vue. Tout près des gradins, un robinet s’y trouve, depuis longtemps d’ailleurs. Point alors de dispositif particulier contre cette terreur qui fait trembler le monde entier, le covid-19. Au siège de la FFB, il y’a bien deux cuves d’eau et deux désinfectants de marques différentes. A défaut de trouver le Chargé de la communication (en pause peut-être), un gardien tente de prouver que la prévention peut rapidement se mettre en place au stade. « A l’extérieur du stade, sur la clôture, il y’a 4 tuyaux qui y sont installés. Lors des matchs internationaux, la FFB disponibilise des robinets pour que le public puisse étancher la soif. Après le match, ces robinets sont retirés. Il suffit de remettre les robinets et le virus deviendrait inoffensif pour notre beau stade », déclare naïvement le vieux sage.
Centre-ville …
Ce mercredi, nous sommes exactement à l’école primaire Stella Matutina, l’entrée est bien dégagée Personne ne contrôle les visiteurs. Là aussi, ni eau, ni savon en vue. « Si …. le dispositif est bien là, nous prenons très au sérieux la menace du Covid-19 » , avance Marie Claire Inamahoro, directrice de cette ancienne école primaire célèbre de la capitale économique, en montrant du doigt une cuve bleue derrière le préau. « Nous avons préféré cet emplacement pour éviter qu’il y ait de la boue à l’entrée. Nous préférons cet endroit bien cimenté »
Par après, elle fera savoir que son établissement abrite autour de 1 600 élèves et une soixantaine de personnel. Pour le lavage des mains, elle affirme que l’eau ne manque presque jamais, et que pour le savon, l’école donne deux savons par jour. Le coût : 1 000 Fbu. « Il y a un savon pour la matinée et un autre pour l’après-midi. Nous les coupons en de petits morceaux pour les répartir dans les classes ». En ce qui concerne la sensibilisation, Inamahoro indique que les enseignants ne cessent d’en discuter avec élèves pendant les séances d’hygiène et de propreté.
???? #Burundi : le @mspls_bdi recevait hier un don d’un appareil « PCR temp réel MyGo Pro ESR » de la part de l’@WhoBurundi destiné à augmenter « la capacité de diagnostic de l’@insp_burundi pour les maladies à potentiel épidémique dont la maladie due au #Covid_19 » pic.twitter.com/yA6d6cPNrF
— Jimbere (@JimbereMag) March 18, 2020
Cathédrale Regina Mundi …
Cap sur l’église catholique la plus fréquentée en ville. Le carême bat son plein. Les messes sont célébrées comme à l’accoutumée pendant la semaine. Il n’y a pas de dispositif de lavage des mains à l’entrée. A l’intérieur, vers les salles de réceptions A et B, juste une tente sur laquelle est mentionnée « La semaine d’entraide » pour recueillir les donations des chrétiens destinées aux démunis. A la sortie, nous approchons un fidèle : « J’ai entendu dire que le geste habituel fait en signe de la Paix du Christ ne se fait plus. Il paraît que le prêtre le déconseille. Bref, plus de salutations ou d’accolades. Tout cela pour éviter la propagation du coronavirus ».
Commerces des produits de prévention débordés
Pharmacie ALCHEM. 17h moins le quart, ce mercredi. La longue file d’attente habituellement remarquable au parking des bus semble avoir migrée vers la société pharmaceutique. Le temps pour une interview ? Ils n’en ont pas. « Nous sommes débordés depuis le matin. Les clients viennent trop nombreux acheter les désinfectants et les masques pour la protection contre le covid-19 », lance furtivement un vendeur apparemment à bout de souffle, masque de protection sur la bouche.
De l’autre côté, « une boite de masque s’achète à 47 500 Fbu. Ils ne nous permettent malheureusement pas d’en prendre plusieurs pour que tout le monde puisse être servi. Une personne a droit une seule boite », explique un client qui attend impatiemment que son nom soit lit sur la liste de ceux qui vont être servis.
Quant aux désinfectants, un vendeur de la société indique qu’il n’y a plus de bidons d’1 litre ou de 500ml. « Le stock est épuisé depuis une semaine. Il ne nous reste que les petits bidons de 100ml. D’ailleurs les gens les préfèrent parce que facilement transportable, pour se désinfecter à chaque contact physique. »
Pour une autre vendeuse des produits du Savonor qui tient sa boutique dans une galerie en face de l’ancien marché central de Bujumbura, « Le business s’est accéléré ces 3 derniers jours. Les désinfectants se vendent comme du petit pain. Aujourd’hui, j’ai déjà vendu autour de 5 cartons, alors que je n’avais rien vendu depuis un bon mois ».
Il est clair qu’un bon de nombre de citadins prennent les précautions nécessaires pour se prévenir contre le coronavirus. Mais qu’en est-il pour ceux qui habitent les coins reculés du pays ?
A suivre …
