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Umwuga Award : quand l’essence des métiers est mise sous les projecteurs

Umwuga Award edition 2024

Au terme d’un concours très disputé pour sa seconde édition, un lien fort a été tissé entre la formation professionnelle et l’emploi au-delà d’une simple compétition. Un pas de plus dans la transmission du sentiment de réalisation personnelle.

Chacun des 57 finalistes issus de 1096 candidats inscrits au départ dans 14 provinces du pays, s’attendait impatiemment à décrocher la cagnotte de 3 millions. Certes, le parcours n’était pas facile. Aux yeux de certains évaluateurs, tout le monde avait démontré la bravoure, du 16 au 17 octobre, au CFPP Nyakabiga, les deux journées de compétitions acharnées. Hélas, pas de victoire sans défaite, le trophée reviendra aux trois premiers par filière, en raison de 3 millions, 2 millions et 1 million de Fbu.

En cette date du 18 octobre 2024, la vaste salle de Donatus Conférence Center était bondée de personnalités publiques, privées ou encore diplomatiques, pour célébrer l’excellence de ces jeunes d’entre 16 et 25 ans.

« Umwuga Award » qui est un événement annuel, est organisé par le trio : le ministère de l’éducation nationale et de la recherche scientifique, la Chambre fédérale du commerce et de l’industrie du Burundi (CFCIB) sous l’appui technique et financier de l’agence belge de développement (Enabel) sur une période de 4 ans.

Et « par rapport à l’année passée, on a observé plus de complexité au niveau des tests dans toutes les filières sous-évaluation : opérateur web, couture, service de bar restaurant, maçonnerie, soudage, électricité industrielle, menuiserie, carrelage et mécanique automobile », assure Etienne Rodenbach, Chef du projet Umwuga ni akazi dont la compétition est issue.

Un métier, un emploi…

Alors que les champions étaient annoncés, plein d’entreprises étaient déjà à l’affût, certaines se déclarant prêtes à recruter, d’autres à accorder des stages payants. On citera par exemple : Amma Constructions (qui a donné 6 emplois directs dont 3 maçons et 3 carreleurs), Zako Style (4 stages aux tailleurs), Savonor, Onatel, Cash Tel, pour ne citer que ceux-là.

Pour David LEYSSENS, Directeur Pays de Enabel au Burundi, c’est en savourant le fruit des efforts fournis dans l’indépendance qu’on éprouve une fierté : « Ce sont ces émotions, ce sentiment de réalisation personnelle que nous voulons transmettre aux jeunes talents burundais à travers cette initiative Umwuga-Award ».

L’intérêt pour les métiers s’est remarqué également chez les milliers de jeunes issus de différentes écoles fondamentales de la mairie de Bujumbura, qui étaient présents lors de la passation du concours. Selon Etienne Rodenbach, « plus de 2000 jeunes auront été invités pour découvrir ces réalités inaccessibles dans leurs écoles, mais aussi pour susciter leur engouement pour les métiers professionnels pour leur avenir ».

Quid du but d’Umwuga Award

Dans un monde marqué par l’inadéquation formation-emploi, le secteur privé voit de plus en plus ses préoccupations apaisées. D’après David Leyssens, Directeur Pays de Enabel, ce concours a pour but de rendre visibles les jeunes talents que regorge le Burundi. « De nombreux jeunes burundais possèdent des compétences remarquables dans divers métiers et méritent d’être mis en lumière », explique-t-il.

Olivier Suguru, président de la CFCIB, a exprimé sa gratitude pour l’implication du ministère de l’éducation dans cette initiative et son engagement à reformer les programmes de formation professionnelle, en mettant l’accent sur la formation technique. « Cela répond aux attentes des entreprises burundaises qui se plaignent de la qualité et de l’efficacité de la formation des écoles techniques et professionnelles », a-t-il martelé.

De bonnes impressions chez les jeunes

Embrasser la carrière des métiers ne doit pas être assimilé à l’échec scolaire, comme la mentalité laisse le croire. Car « l’habileté manuelle est une assurance pour l’avenir ».

Vanilla Queen Mahoro (24 ans), qui a représenté la province de Ngozi et qui a décroché la 2ème  place dans la filière de Service bar et restaurant témoigne : « Malgré mon baccalauréat en gestion et comptabilité à l’université du Burundi, j’ai osé entrer en compétition avec les autres pour mesurer mon niveau, mais aussi prouver mes compétences para-académiques ».

Quant à Fabrice Mutore (20 ans) natif de la province de Gitega, champion dans la filière de Mécanique automobile, il se rappelle : « Après mon échec en 8ème année fondamentale en 2020, j’ai intégré le Centre des métiers, ce qui m’a valu des sarcasmes dans mon entourage. Mais alors, poursuit Fabrice, j’éprouve une grande fierté de vivre de mon métier et personne ne revient plus me décourager ».

 Jeunesse, socle du développement…

« Le Burundi a besoin d’une jeunesse active, innovatrice et compétente pour s’aligner dans la voie de l’émergence », insiste Ivo Hoefkens, chef de Coopération à la Délégation de l’Union européenne au Burundi : « Il y a des liens logiques et nécessaires entre les métiers professionnels et le monde du travail. »

Ce diplomate qui n’a pas manqué de visiter les jeunes compétiteurs, annonce : « Il y a un projet en cours qui va appuyer le développement de la qualité, de la participation, mais aussi qui va augmenter le nombre de jeunes qui participent dans l’apprentissage des métiers et en même temps que la gouvernance du secteur ».

De son côté, le gouvernement entend valoriser la formation professionnelle pour lutter contre la pauvreté et le chômage, en vue d’atteindre sa vision 2040-2060. D’après Frédéric Bigirimana, secrétaire permanent au ministère chargé de l’Éducation, quelques initiatives sont déjà en cours pour répondre à cette préoccupation gouvernementale et des partenaires au développement.

Il cite par exemple la construction et le démarrage des activités des centres de Rusi où les étudiants sont actuellement en place. Ensuite, le grand projet qui devrait permettre l’amélioration de l’organisation de la formation technique et de la formation professionnelle sur la base d’une formation en alternance. Et puis, la prévision de construction d’un centre similaire à celui de Rusi à Buhumuza, avec l’appui de l’AFD (Agence française de développement). Enfin, la construction de l’Institut supérieur professionnel à Cibitoke, sous le financement de la banque saoudienne Bada qui a déjà été signée.

Appel à l’inscription sur la scène internationale 

Selon Jean-Claude Raskin, coach mental et préparateur mental pour Worldskills Belgium et qui a coaché cette compétition, il analyse la compétence sous deux aspects : l’aspect technique (hardskills). À cela, il fait savoir : « Si vous allez en Asie, là, on atteint des sommets, mais parce qu’il y a une politique d’entraînement qui est vraiment intense ». Si on se ramène à l’Europe et à la Belgique, puisque je suis Belge, là, on est dans un niveau ordinaire, moyen. Et l’Afrique, il y a des choses qui doivent encore être améliorées en termes d’équipement, de besoin et  de développement.

Cependant, côté aspect comportemental (softskills), Raskin voit un enthousiasme chez les jeunes Burundais, comme cette motivation est universelle.

Raskin fait également savoir que la République démocratique du Congo participe déjà à la compétition Worldskills International, où elle a d’ailleurs remporté 5 médailles en 2022 en Namibie.

Ce coach fait appel à la volonté du pays pour que la jeunesse burundaise puisse aussi participer à l’échelle internationale. « De toute façon, pour s’inscrire dans le Worldskills International, ce ne sera pas Enabel qui va le faire. C’est le pays qui doit le faire avec un partenaire public et un partenaire privé. Et ça, c’est au Burundi de se prendre en charge ».

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