Les rumeurs répandues en 2015 ont conduit à l’exil de centaines des citoyens de la commune Busoni. Malgré le retour de certains d’entre eux, cette période semble avoir laissé de séquelles…L’administration tente de rassurer la population et de lui faire comprendre le danger de ces discours.
Saïdi Kwizera de la sous colline Rusarasi en commune Busoni de la province Kirundo n’y va pas par quatre chemins : « En 2015, les gens ont eu peur et ont fui à cause des messages qui circulaient sur différentes radios et qui parlaient du coup d’Etat manqué et des tueries imminentes. »
A l’époque, se rappelle ce chef de famille, des centaines de personnes de leur localité ont fui vers le Rwanda : « Nous avons essayé de garder le calme et de nous rassurer les uns les autres mais les gens sont quand même partis y compris mon épouse. » Sa femme reviendra quelques mois plus tard après avoir constaté qu’il s’agissait des informations infondées.
Claudine Mukandera, une rapatriée affirme également avoir fui à cause de la peur liée aux différents discours qui circulaient à l’époque : « Il y avait ces chants qui disaient que nous serons lessivés. Des gens parlaient de génocide. Nous ne pouvions pas rester car les souvenirs de 1993 sont remontés à la surface avec les nôtres tués à cette époque. Nous avions peur que les mêmes évènements se reproduisent. »
Le réveil de vieux démons
Chaque matin, se rappelle cette mère de six enfants, des portes étaient ouvertes, les propriétaires partis. Pendant la nuit, des bruits de ceux qui partaient à l’exil se faisaient entendre au quotidien : « Des gens partaient et personne ne les retenait. Tout cela a contribué à accentuer cette peur et nous avons décidé mon mari et moi que j’allais partir au Rwanda avec cinq enfants et lui rester à la maison avec notre fils aîné. »
Actuellement, l’eau semble avoir coulé sous les ponts sur cette colline, en témoigne la cohabitation entre les rapatriés et ceux qui sont restés. Annonciate Uwimana, une habitante témoigne : « A notre retour, nous avons été bien accueillis par des voisins et l’administration locale qui n’a cessé de nous tranquilliser et nous nous sommes rendus compte qu’il s’agissait des rumeurs liées à la période électorale. »
Mais tout le monde se demande ce qu’adviendra à la prochaine rumeur du même acabit avec les prochaines échéances électorales qui approchent à grand pas. A cette préoccupation, Prosper Niyimpaye, chef de la sous-colline Rusarasi rétorque : « Si une autre rumeur du même genre venait à se répandre, notre rôle serait, comme en 2015, d’apaiser la population, même si à l’époque cela n’a pas empêché certains de fuir. »
Comme tant d’autres localités du pays, Busoni n’a pas donc été épargné par des rumeurs. Benoit Miburo, conseiller de l’administrateur communal revient sur cette période et les conséquences vécues tout en faisant un clin d’œil aux uns et aux autres de ne pas accorder foi à tout ce qui se dit.
Comment est-ce que ces rumeurs ont affecté la cohésion sociale ?
Malgré ces rumeurs, nous avons approché la population et multiplier les réunions pour apaiser les esprits. Il fallait à tout prix éviter que ces messages se transforment en haine ethnique, ce qui était l’objectif de ceux qui les répandaient. Et grâce à ce travail, les gens sont vraiment restés calmes, ce qui a contribué à maintenir la cohésion sociale
Après certains départs vers le Rwanda, quelle fut l’ampleur de ces rumeurs et qu’envisagez-vous de faire si elles réapparaissent ?
Ce que nous envisageons actuellement c’est toujours d’être tout près de la population, calmer les esprits, montrer que normalement les rumeurs n’avantagent personne et surtout appeler les uns et les autres à se préoccuper de leurs activités, de développer leurs familles, de développer le pays, du reste les rumeurs n’ont aucune importance dans notre vie quotidienne.
Ces départs ont-ils eu un impact ? Si oui, de quelle ampleur ?
Le choc ne peut vraiment manquer. Si on quitte le pays, sa propriété, ses biens, automatiquement ceci se répercute sur le développement de l’homme dans tous ses aspects. Les gens qui s’étaient réfugiés au Rwanda ont trouvé, à leur retour, leurs maisons détruites puisque personne ne les entretenait, d’autres ont trouvé leurs propriétés occupées par d’autres individus, des biens disparus ou chambardés. Heureusement que quand ils reviennent nous faisons tout pour qu’ils les récupèrent.