Après la décision du ministère de l’Intérieur, de la Sécurité et du Développement communautaire, avec les gouverneurs, de restreindre la circulation des récoltes des céréales, les prix explosent dans les différents marchés. Les commerçants, consommateurs, camionneurs (…) broient du noir
Selon Martin Niteretse, ministre de l’Intérieur, de la Sécurité Publique et du Développement Communautaire, ces mesures ont en ligne de mire la bonne gestion de la production.
Mais, pour en finir avec les manœuvres spéculatives de certains commerçants qui collectent la production pour créer la pénurie des denrées alimentaires aux fins de provoquer une hausse des prix, elles visent aussi à l’instauration d’un protectionnisme. Objectif : éviter que la production burundaise ne soit écoulée vers les pays limitrophes, alors que les Burundais n’ont rien à mettre sous la dent.

Faustin Ndikumana, lui, estime que ces mesures ne feront pas long feu, d’autant plus que les enjeux qui sous-tendent la famine au Burundi ne se situent pas qu’au niveau de la gestion de la production, mais au niveau de la maîtrise de la production elle-même.
Pour cet expert en économie, le nœud du mal est plutôt à chercher en premier en lieu dans l’absence d’une planification du secteur agricole soutenu et orienté par des chiffres qui mettent en évidence les besoins et la capacité de production du pays.
Sans ces chiffres, il est impossible d’espérer un changement dans ce domaine.
Emery Ndanga, secrétaire exécutif du FOPABU (Forum des organisations des producteurs agricoles du Burundi) affirme qu’ils n’ont pas été consultés avant cette mesure. Il plaide pour l’implication de toutes les parties prenantes, les producteurs en premier lieu.
S’agissant de la mesure en elle-même, il se pose des questions quant à son applicabilité : les différentes provinces ne produisent pas toutes les mêmes cultures, et comptent les unes sur les autres pour échanger leurs productions.
Il ajoute que si ces mesures ont été prises dans l’intérêt des producteurs, l’idéal aurait été plutôt qu’elles prônent la libéralisation pour faire jouer la loi de l’offre et de la demande.
En lieu et place, elles placent des balises qui vont décourager certains bons acheteurs potentiels.
Les bénéfices des camionneurs en chute libre
À Ngozi au nord du pays, la mesure a mis un coup de frein à l’activité des commerçants : depuis qu’elle a été prise, les agriculteurs refusent de vendre leur récolte. Un camionneur témoigne aussi de la mise à mal de son travail : « Il arrive que nous collections dans des provinces différentes, 3 ou 4, avant de descendre sur Bujumbura. Imaginez combien cela peut coûter de passer par le chef-lieu de quatre provinces, souvent éloigné de point de collecte, à la recherche de l’autorisation de transport ? »
Les camionneurs affirment qu’auparavant, ils pouvaient avoir des bénéfices variant entre 200.000 et 300.000 Fbu par jour : ils descendaient sur Bujumbura avec du haricot pour remonter avec du poisson, huile de palme et autres produits qui n’existent pas à Ngozi, chose qu’ils ne peuvent plus faire. Conséquence : la flambée des prix. 1 kilo de poissons, par exemple, a connu une hausse de 6000 Fbu.
