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Ils nous inspirent

Ninde ou la troupe du récit rural authentique

Au centre du pays, précisément à Giheta dans la province de Gitega, là-bas prendra naissance la troupe Ninde. Nous sommes en 1980. 40 ans après, l’incroyable troupe tant adulée, qui livre chaque semaine deux émissions, radiodiffusée et télédiffusée, s’est affirmée comme une véritable vitrine de la vie rurale burundaise, de ses tourments et de ses secrets. Portait.

Des scènes de la série Ninde

Il est 12h quand on arrive au chef-lieu de la Zone Kabanga. Nous roulons vers Gitega, quand nous décidons enfin de prendre une bifurcation au chef-lieu de la zone Kabanga où siège en toute modestie la troupe Ninde. Celle-ci regroupe les personnages les plus symboliques du Burundi.

Les membres en pleines répétitions ne semblent pas prendre plaisir à notre intrusion, quand on annonce qu’on a besoin de parler avec eux, le plus charismatique d’entre eux, Déo Hakizimana alias « Kireko » nous répond : « Si vous êtes de Bujumbura, Je vous donne rendez-vous là-bas, Vous allez me chercher. » Le rendez-vous fixé, il ne nous reste plus qu’à continuer notre route.

La rencontre

Un vendredi soir, quand tout le monde se déplace, de l’intérieur vers « Buja La Belle » ou l’inverse, pour voir sa famille après une semaine de dur labeur, « Kireko » lui vient presque régulièrement pour « signer et explorer la possibilité de piocher quelques marchés de publicités ou d’autres sketchs ».

Dans cette auberge sobre de Bwiza qui l’héberge, le gérant nous fait savoir : « Kireko est un des nôtres depuis l’ouverture de la maison, il y a bientôt 8 ans. Ne vous-y méprenez pas à Bwiza comme à Giheta, Déo Hakizimana est une star. Toute personne qui passe dans la ruelle le salue, et tire sa révérence. Il est aimé et respecté. » C’est ce septuagénaire à la voix incisive, imposante et le regard pénétrant, qui va nous donner l’histoire de la troupe Ninde sur le plateau.

Un voyage vers la gloire

« Uwo yoba ari wewe? Eka data si jewe? None yoba ari nde ga yemwe? » Vous avez sans doute reconnu cette séquence légendaire, qui précède l’émission Ninde. Sûrement qu’elle ne vous laisse pas indiffèrent. L’histoire derrière celle-ci ne vous donnera pas cette chance non plus. Et bien, on est en 1980, bien entendu, Sous le régime du Président Bagaza. Celle qui sera plus tard la troupe Ninde est un groupe d’animation très modeste représentant la Zone Kabanga. Petit à petit, l’oiseau fait son nid, celle-ci va braver les échelons à travers les compétitions de danses et sketchs qui l’opposaient à d’autres groupes d’animation, et deviendra quelque peu plus tard la troupe communale puis provinciale. Le message sur lequel, elle a fait ripailleː « L’envoie des enfants à l’école, et la sensibilisation à la construction des villages »,confie Hakizimana, exultant.

En 1981 quand la Radio Nationale eut l’idée de faire un feuilleton, le groupe d’animation saisit la balle au bond, et se propose. C’est le début d’un voyage vers la gloire. Notre émission s’appelait à cette époque Nkina nkebura. En 1982, nous changeons le nom de l’émission qui sera désormais appelé Ninde. Nous changeons aussi notre manière de l’écrire, optons pour l’ironie, plus d’imagerie et introduisons la méthode du suspens à la fin de l’émission pour que les gens eux-mêmes puissent se remettre en question afin de voir si ce n’est pas leur propre histoire qu’on a jouée. »

En 1984, quand fut créée la Télévision Nationale, leur émission qui avait déjà gagné les cœurs de pas mal des Burundais sera désormais télévisée. « On en devint automatiquement des stars nationales », se rappelle Hakizimana, laissant échapper un sourire de fierté au coin des lèvres. Et d’ajouter ː« On dut néanmoins avoir des formations pour l’expression gestuelle car désormais l’émission était télévisée ».

La ruralité, spécialité de la troupe Ninde

La notoriété de la troupe grandissant en témoigne les « petites » troupes en quête de visibilité qui vont essayer de dupliquer jusqu’à son nom. « En vain, et c’est sans saveur. Les gens ne plébiscitent pas, les aventuriers s’y cassent les dents, On est inimitable, on raconte la vie quotidienne d’un Burundi rural sans atours, ni faux fuyants », glissera « Kireko ».

En 2008, la troupe verra le Président Nkurunziza les doter d’un bureau au chef-lieu de la zone Kabanga, un véhicule et un lot d’uniformes.« Nous avions un bureau vieillissant qui datait des années 80 loué par la RTNB ».Pour rappel, les membres de la troupe Ninde sont rémunérés par le Gouvernement du Burundi, à travers le ministère de la Communication et de l’Information.

Et aujourd’hui, la troupe compte à l’heure actuelle 40 membres, et deux bureaux, l’un au chef-lieu de la zone Kabanga et l’autre au chef-lieu de la zone Giheta. Chacun des membres est à la fois joueur et compositeur, car les pièces étant composés en synergie. La RTNB vient mensuellement pour enregistrer 4 émissions radio, et tourner 2 autres à téléviser. La troupe Ninde travaille en partenariat avec différentes autres organisations pour la sensibilisation sur des thématiques chères a la vie de la communauté comme la santé et l’éducation.

Tout de même le seul regret de Hakizimana : « On n’a jamais fait des tournées à l’étranger, si ce n’est qu’au Rwanda. »

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