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Société

A bas les messages haineux dans les chaumières !

La fracture sociale au Burundi entretenue par des crises cycliques n’est pas le fruit d’un hasard. La transmission de la haine à travers des discussions familiales y a joué un rôle notoire. Hélas, aujourd’hui, la situation est loin de s’améliorer…

Plutôt invraisemblable, certains jeunes qui n’ont pas connu des périodes sombres de notre Histoire marquée par des clivages identitaires ne semblent pas ignorer les étiquettes ethniques dans toutes leurs ambiguïtés. A l’image d’Alain* (13 ans) rencontré en zone Maramvya, de la commune Mutimbuzi, en province Bujumbura, les préjugés et stéréotypes ethniques n’échappent pas à sa connaissance.

Ce gamin sait distinguer les Hutus des Tutsis, du moins dans ce qui parait être une véridiction. « Des amis de mon père le taquinent souvent qu’il est de l’ethnie Tutsi comme moi. Et c’est par là que je me suis intéressé à comprendre l’engrenage autour de ces théories. »

Patrice Saboguheba, le sociologue

D’un air décontracté, poursuit le jeune homme, l’histoire du pays s’est corsée avec la prééminence de ces divisions, d’après ce qu’il a entendu : « Mes camarades de classe racontent que dans le passé, les deux groupes se sont entretués et se vouent depuis des années une haine sans nom. »

De la prudence dans la causerie morale

Cette expérience d’Alain* n’est pas un cas isolé. Sylvine*, habitant aussi à Maramvya, regrette que ses enfants le questionnent sur les connotations ethniques de la famille : « Parfois, des gens m’appellent Umuterambere pour désigner une Twa que je suis, et ça taraude l’esprit de mes enfants au point qu’ils ne se lassent pas à me demander ce qui nous différencient des autres. »

Cela étant, interpelle Patrice Saboguheba, sociologue, il est judicieux que des hommes adultes contrôlent leur langage, afin de préserver une interprétation de travers : « Souvent, certaines conversations entre parents sont ponctuées par des messages inadaptés à l’égard des enfants et ceux-ci peuvent les aborder inconsciemment avec le risque de compromettre une cohabitation pacifique dans la communauté. »

Une bonne transmission de la mémoire s’impose

Joël Habiyambere, conseiller communal de Mutimbuzi en charge des affaires sociales

Cependant, souligne ce sociologue, quel que soit les blessures du passé, les parents ont une responsabilité d’encadrer leurs enfants dans l’éducation de bonnes valeurs : « Ils doivent grandir tout en sachant que chaque être humain sans distinction a une dignité et s’engagent à le respecter, dans le souci de préserver la concorde sociale. »  

Même son de cloche chez Georges*, lui aussi habitant à Maramvya, qui trouve que « les enfants doivent également apprendre l’Histoire du pays et daigner à ne pas répéter les erreurs de leurs aînés. »

Quant à Joël Habiyambere, conseiller communal de Mutimbuzi en charge des affaires sociales, il met en garde les parents qui osent transmettre des enseignements divisionnistes ou de haine à leurs enfants, « car ces derniers ayant accumulé de tels messages auront du mal à vivre ensemble avec d’autres personnes qui ne sont pas de la même ethnie, et bonjour les conflits, les vengeances ou bien les violences de masse. »

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