A Bubanza, face à la tradition, le temps. Les temps plutôt, qui viennent et passent, en cycle de malheurs et de joies éphémères. Ces « temps durs » qui emportent dans les tourbillons de son de riz des rêves de tranquille mère au foyer. Ces « temps légers » où l’argent de la vente du riz déverse dans les veines des propriétaires mâles des champs, vigueur et assurance pour chercher la deuxième, troisième, nième maîtresse, bientôt « épouse à la mode ». En attendant un autre coup de cœur pour la saison suivante…
Pour ce nouveau dossier sur les récits des femmes à travers le Burundi, le Magazine Jimbere s’est rendu dans la plaine rizicole de l’Imbo pour rencontrer les récits saisonniers de maris perdus, au grès des récoltes du riz. Le cycle est connu de tous, même que l’administration ne sait plus à quelle sainte se vouer. Les larmes de ces mères esseulées tariraient si leurs hommes volages se conformaient au prescrit d’une loi burundaise qui ne reconnaît pas la polygamie, et de la campagne de régularisation des mariages dans laquelle il est dit que « la femme légale est la première avec laquelle on a eu des enfants. »
Hélas, que peut la loi face aux hormones? Que peut cet idéal d’une société normée face aux appels de la chair?
A Bubanza, elles continueront donc de pleurer leurs maris perdus.
Sauf si ces femmes parviennent à gagner assez d’autonomie financière pour ne pas baser leurs espoirs de survie sur ces hommes aux envies si prévisibles. A travers notamment l’éducation.
C’est tout le vœu de Jimbere.