Jimbere

Kirundi French
Société

Crever l’abcès… avec quel ton ?

Au-delà de toute évolution, les rapports sociaux sont en proie permanente à divers ouragans. Si le courant ne passe pas, une communication saine devrait impérativement s’imposer…

L’existence humaine, tout comme la vie sociale, est jalonnée de chutes et de redressement. Parfois, le tourbillon du quotidien peut altérer l’harmonie. C’est le cas de la colline Kibungere, commune Nyabihanga, en province Mwaro. La population de cette localité reconnaît que des fois, la cohésion sociale est mise à rude épreuve par certains maux. D’autant plus que le langage utilisé dénote un aspect explosif.

M.K*, une cultivatrice de cette contrée se rappelle que des vols nocturnes dans les champs a suscité du ras-le-bol dans la communauté. « Au cours d’une réunion, une paysanne s’est levée pour prendre la parole, et n’a pas mâché ses mots à propos de la situation qui prévalait.  Sa désinvolture qu’elle a manifestée quand elle relève ses soupçons a choqué plus d’un », glisse-t-elle.

Contrariés par les évènements, certains y vont fort en cherchant à accuser à peine voilée l’autre groupe comme source des affres qui hantent la société. G.H*, un jeune étudiant dénonce un comportement dénigrant de certaines gens des milieux ruraux envers des personnes qu’ils jugent être les responsables du tarissement de la pluie (Abavurati) : « Une famille peut être victime des déclarations incendiaires et perçue comme la cause des désagréments météorologiques, ce qui nuit à sa réputation et constitue en quelque sorte un danger pour ses membres. »

Attention aux escarmouches !

Quoique la situation soit préoccupante à des degrés divers, si le ton est impertinent, les doléances peuvent être ressenties comme un réquisitoire contre une personne ou une catégorie d’individus. Et cela ne va pas sans conséquences : « Un tel acte alimente la méfiance entre les membres d’une même communauté, car celui qui se sentira visé ne se laissera pas aller, plutôt il voudra se faire justice, surtout en clamant son innocence. Cela créera sans doute des tensions dans la société, pouvant même virer dans la violence », pointe Leonidas*, habitant la colline Kibungere.

Malgré le contexte ou l’évidence des propos, interpelle le pyschologue Alexis Nibigira, si on choisit de taper du poing sur la table avec un langage acerbe, on ne peut rien s’attendre de bon : « Lorsqu’un individu vide son sac avec une tendance à déshumaniser l’autre, à porter atteinte à son amour-propre, le résultat ne sera autre que des dissensions attisant la haine, l’agression verbale ou physique. » 

Peut-on faire mieux ?

Oui, répond ce pyschologue, il est possible de réclamer ses droits en préservant la dignité des autres : « Nonobstant le cumul de stress traumatique, de l’injustice, des plaintes ou des besoins fondamentaux non satisfaits, on doit garder à l’esprit que tout le monde a besoin de respect, de l’estime, et mettre les mots sur les maux, tout en gardant du sang-froid, en évitant de perdre les pédales sous le coup de l’émotion. »

Même son de cloche chez Anastase Nkamicanye, secrétaire exécutif permanent de la commune Nyabihanga, qui rappelle que « les Burundais, dans leur tradition, garde la déférence en toute circonstance, à tout être humain », et invite la population à « tourner la langue sept fois dans la bouche avant de parler, dans le souci de prévenir d’éventuelles prises de bec. »

*nom d’emprunt

Click to comment

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

To Top