Certains responsables politiques ont dernièrement pris les devants pour contrer les messages de haine et le danger qu’ils représentent en interpellant leurs militants à cesser tout comportement susceptible de créer des divisions. Une initiative saluée par Chartier Niyungeko, expert en résolution pacifique et transformation des conflits…
La dernière sortie dans ce sens fut celle d’Agathon Rwasa, président du parti CNL après une chanson du groupe d’animation des membres de son parti entonnée lors de sa tournée à Gitega, la capitale politique : « La chanson comportait des messages nocifs à la cohésion national et j’ai appelé à son bannissement. »
Depuis, l’agrément en 2019 du parti CNL, rappelle M. Rwasa, la position dudit parti est-on ne peut plus clair- : « Nous œuvrons pour que tous les Burundais vivent sur le sol Burundais et nous ne cesserons de le faire et de le dire. Nul n’est né pour vivre en exil. Nous invitons donc les uns et les autres à recourir à un langage pacifiste, réunificateur, à un langage non violent. »
Mais bien avant lui, Révérien Ndikuriyo, président du parti Cndd-Fdd, avait le 17 juin dernier, félicité les dirigeants du parti à Muyinga pour avoir suivi ses recommandations d’interdire tout discours haineux contre les opposants. « Nous avons placé Dieu à la première place dans tout ce que nous faisons. Comment pouvons-nous lancer des messages haineux contre les opposants et revenir après prier Dieu », avait-il lancé aux membres du CNDD-FDD.
Pour Chartier Niyungeko, ce changement d’attitude de ces deux leaders dans leurs discours, est à encourager, surtout à la veille des élections de 2025 car leurs propos ou discours peuvent influer positivement ou négativement sur la tenue de ce prochain scrutin. Son analyse.
Quelle est votre analyse par rapport à l’appel lancé par ces deux leaders des partis CNDD-FDD et CNL ?
Voir les hautes autorités politiques de tendance différente commencer à adopter un comportement rassembleur, en lançant des discours qui interpellent leurs militants d’éviter ces messages de haine et des comportements susceptibles de créer des divisions ou des tensions en politiques ou entre militants de différents partis politiques, est un bon signe de la prise de conscience des leaders politiques. Lorsque des leaders condamnent leurs propres membres pour avoir utilisé des messages de haine, ou pour avoir manifesté de comportements de haine ou à tendance divisionniste, c’est une chose à encourager.
Et pourquoi ?
Parce que les discours des leaders, des autorités politiques influencent l’opinion populaire. Les discours ou les mots, les messages lancés par des leaders politiques influencent les comportements et l’orientation de leurs membres en matière d’interaction sociale ou en matière de cohabitation pacifique.
Nous sommes à la veille des élections de 2025, est-ce que ce changement d’attitude de ces deux leaders peut influer sur la bonne tenue du prochain scrutin ?
Bien sûr que oui. Même s’il ne s’agit pas du seul facteur qui puisse permettre un bon climat des élections, c’est un des facteurs déterminants. On a besoin d’eux pour avoir un climat favorable aux élections équitables. Je dois dire qu’en tant qu’expert en matière de gestion et de prévention des conflits, c’est que les discours ou les opinions se traitent dans leurs contextes, quand on veut analyser le contexte social ou socio-politique dans un milieu donné entre différents partis politiques, entre différents groupes socio-politiques, on essaie aussi d’analyser les opinions, quels sont les discours des leaders d’opinions, des leaders au pouvoir, les messages de l’opposition.
Pourquoi ?
Parce que pour voir si tout ira bien ou pour voir s’il y aura des problèmes, on part toujours des opinions des leaders. Ce sont les opinions qui plaident au rassemblement ou à la cohésion ou qui peuvent aussi contribuer à des tensions socio-politiques. C’est pourquoi, pour moi, si vraiment les leaders politiques qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition, s’ils continuent dans ce sens, à lancer des discours rassembleurs, à partager des messages qui interpellent leurs membres d’éviter tout comportement susceptible de créer des divisions, ce sera un des facteurs déterminants pour qu’il y ait des élections paisibles pour 2025.