En 1988, 1999, 2016, la loi rwandaise sur le régime matrimonial et les successions a changé. Les ex-colonies belges divergent. Paradoxe!, dirait Canjo Amissi.
Au Congo, le régime légal est la communauté réduite aux acquêts. Au Rwanda, c’est la communauté universelle. En apparence, le Burundi a choisi de rester dans la coutume. La différence n’est pas induite par des enquêtes sociologiques. Elle est d’ordre normatif. “Universelle” veut dire que tout ce qui appartient à chacun des époux leur appartient à tous deux. Il leur est commun. “Réduite aux acquêts” signifie qu’est commun seulement ce qui a été acquis ensemble.
Par régime légal, il faut entendre celui qui vous est appliqué lors du mariage, si vous n’avez pas opéré de choix. C’est donc le régime de presque la totalité des couples. Celle relative aux successions dérive de la loi sur les régimes matrimoniaux. En effet, on se marie d’abord. Ce n’est qu’après la mort que la succession est ouverte. Cette loi tant attendue, il faudrait d’abord bien la nommer. Avant 1999, le Rwanda en était au même point que le Burundi. Et voilà que moins de 16 ans plus tard, il vient encore de changer sa législation. Il est légitime d’affirmer qu’en si peu de temps, l’évolution des faits sociaux et des mentalités ne pourraient le justifier. Une hâte à légiférer peut s’avérer “conflictogène”.
Si le Burundi n’a pas de loi sur les régimes matrimoniaux, est-ce dire que c’est la coutume qui les régit? Je ne le crois pas. Par exemple, le code de la famille, en son article 183, légifère ainsi: dans un jugement de divorce pour causes déterminées, si l’époux ayant eu gain de cause n’a pas de ressources suffisantes, une pension alimentaire doit lui être versée par l’époux fautif. Et si un établissement lui est accordé sur le bien immeuble de l’époux fautif, il n’en sera qu’usufruitier.
La loi va plus loin: si par après il se remarie, ou si ces ressources venaient à s’accroître, la pension alimentaire est annulée, ou diminuée, et la jouissance du bien immeuble rétrocédé. Cet article exclut clairement la coutume et le régime de la communauté universelle. C’est donc que les époux ont des biens propres. Est commun le bien acquis ensemble.
Les articles 77 et 138 du code des impôts de 2006 sont clairs. Si les biens du mari ne sont pas suffisants, ceux de sa femme peuvent être saisis sauf si elle en était propriétaire avant le mariage ou qu’ils proviennent de la succession. Ici en ville, je vois mal une banque qui chercherait à saisir les biens de l’époux survivant, si par exemple son client débiteur est mort par accident, le lendemain de son mariage. Transportons-nous à la champagne. Un couple divorce aux torts du mari. Pensez-vous que le juge pourrait décider que ce dernier doit laisser le domicile à sa femme? Non. Le bien hérité n’est pas commun. Il en est de même de l’article 309 du Code Pénal, qui excepte l’immunité pour vols entre époux en divorce.
Parfois des juges contredisent la loi. Ils ont tort en enrichissant par le divorce. Il y aurait enrichissement sans cause. En séparant des époux en désamour, la loi soulage des cœurs endoloris.
En 1999, le Rwanda a adopté la communauté universelle comme régime légal. Le législateur s’est “trompé”. Cette fois, en 2016, le citoyen est sommé de choisir son régime matrimonial. L’erreur s’aggrave! Le projet de loi les régimes matrimoniaux, les libéralités et les successions, proposé au vote du Parlement du Burundi, nous y entraîne.