Jimbere

Kirundi French
Editorial

Des « points sexuellement transmissibles »: comment en parler?

Coucher avec son prof pour avoir des points. Plutôt, être emmené(e) à offrir son intimité pour éviter d’être recalé(e)… La thématique, si elle est récurrente dans l’actualité scolaire/universitaire d’ici et d’ailleurs, est moins facile à enquêter quand il s’agit de trouver des témoignages, recueillir des aveux, remonter le fil de ces folles rumeurs au sein d’établissements qui n’ont jamais été formellement établies, ni démenties d’ailleurs.

Le phénomène de « kwidelibera », expression tirée de la kirundisation du verbe « se délibérer », renvoie à la possibilité de dénouer les délibérations des conseils professoraux sur le sort d’élèves en difficulté de classement, en « se » donnant sexuellement à l’un des enseignants. Implicitement, un jeu de malsain dans la présentation de l’affaire s’observe : c’est comme s’il y avait une alternative, entre échouer en suivant les règles pédagogique de la compétition en classe, et réussir en faisant « quelque chose », en « se » dé-pensant dans une activité somme toute « attendue », volontaire même pusqu’il s’agit de « se » donner contre quelque chose…

La banalisation de l’acte dans ce mot « kwidelibera » cache et le côté criminel de l’infraction (les victimes sont souvent des mineures), et la dangereuse dilution de la nécessaire distance parentale entre l’éducateur et l’éduqué, tout en posant la question de la féminisation du phénomène. Est-ce que ce sont seulement les filles qui sont réduites à coucher pour avoir des points, ou alors les garçons le font aussi, le machisme ambiant refusant de reconnaître le second scénario, un peu comme il passe souvent sous silence la prostitution masculine…

A vrai dire, on ne peut le savoir. Mélanie Niyonzima, Conseillère point focal « genre », au ministère en charge de l’Éducation Nationale, reconnaît qu’il est très difficile d’éradiquer ce phénomène de « points sexuellement transmissibles », car « ce sont des choses qui se font dans le secret. Parfois même, les coupables font vite d’étouffer l’affaire en corrompant les directeurs d’établissements. »

Qu’à cela ne tienne : il fallait que Jimbere en parle, dans la série des coups de projecteurs sur la condition féminine au Burundi, que nous montons depuis quelques temps.

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