Avec la masse des jeunes burundais au chômage, beaucoup se retrouvent piégés dans des combines de petites sociétés qui leur promettent des deals avec des gains faciles et rapides. De nos jours, à Bujumbura, pullulent des affaires qui disent opérer en « marketing de réseau ». Mais sont-elles réellement fiables ?
Travail au noir. C’est le cas pour la plupart de ces petites sociétés. A proprement parler, elles n’ont même pas de produits à vendre. Des fois, ce sont des produits difficiles à vendre, par exemple des produits médicamenteux non reconnus au Burundi, ou encore des appareils électroménagers difficiles à vendre à l’unité. Ces groupes obscurs misent plutôt sur l’adhésion de masse qui permet des profits. Et si les masses n’entrent plus, la logique est qu’ils ferment la boutique. En bref, ils reproduisent le système de Ponzi.
Les détails de notre petite enquête
« Ce n’est pas du tout un phénomène nouveau. Et ce genre d’affaires sont légion à Bujumbura. C’est devenu même un sport favori pour les jeunes désœuvrés ». S’insurge, Yvan, 24 ans, étudiant. L’une des victimes de ces arnaqueurs. Il raconte son histoire. « Ils m’ont écrit sur WhatsApp. Un de leur modus operandi : ils approchent les gens à partir des groupes WhatsApp. Ils leur présentent une opportunité d’affaires en les invitant à les rejoindre dans leurs bureaux éparpillés ici et là dans la ville de Bujumbura. Mais avec une injonction à la clé ː « Ne le dis à personne. » »
Avec un capital de 122.000 Fbu, Yvan espérait réaliser d’immense profit. Il ne va pas tarder à déchanter. « Au bout d’un moment, le groupe a manqué de nouveaux adhérents. Un matin, on s’est alors levés tous retirés du groupe WhatsApp. En passant, au cours de la nuit, les administrateurs du groupe WhatsApp avaient pris le soin de tous nous bloquer afin que nous ne puissions pas les joindre par téléphone. Et sans surprise, le bureau dans lequel ils travaillaient est toujours fermé jusqu’aujourd’hui. »
Cela fait 2 ans qu’Antoinette Niyonkuru, également étudiante, est active dans ces petites sociétés. Elle explique plutôt bien le fonctionnement. « Quand un nouveau membre adhère au groupe/à l’affaire, une partie de la somme versée est remise, pour partie à son parrain, puis le reste divisé entre les autres parrains de la chaîne, c’est-à-dire tous les membres qui lui ont précédé. Pour gagner des primes importantes, le nouveau venu est obligé de trouver à son tour des nouveaux adhérents, au risque d’y perdre son investissement. Un membre ne peut commencer à générer du profit qu’après avoir enrôlé environ six personnes, mais ça dépend des organisations. Elles sont nombreuses dans la ville de Bujumbura, et surtout avec des modèles de fonctionnement qui diffèrent légèrement l’un de l’autre. Il y’a même celles qui n’ont rien à vendre comme produit pour générer de l’argent, mais bizarrement promettent des sommes mirobolantes comme primes. »
L’avis des économistes
Désiré Kubwayo, économiste de formation : « Les gens y affluent parce qu’ils ont entendu que ceux qui les ont devancés ont gagné beaucoup d’argent. Le problème réside dans le manque d’informations. Les gens ne savent pas par quel mécanisme génère ces profits. Face au vide juridique et autant d’hésitations, le Gouvernement devrait se prononcer sur cette question et clarifier sa position. Et si genre d’organisations sont reconnues, l’Etat devrait s’assurer s’ils font ce pourquoi elles ont été agréées. »
La Police met en garde
Contacté par la Rédaction, Pierre Nkurikiye, Porte-parole du Ministère de la Sécurité publique exhorte la population à plus de méfiance et de vigilance. « C’est du vol pur et simple. Ces gens sont des escrocs à signaler aux autorités. C’est un business qui n’est pas reconnu au Burundi, et la population devrait plutôt se méfier du gain facile. Avant d’investir dans de telles sociétés, il faut au moins se renseigner auprès de l’API ou de la BRB s’ils sont reconnus. »