Jimbere

Kirundi French
Agriculture

Permaculture: entre l’idéal écologique, et les urgences pratiques du monde rural

©Jimbere | La conférence de cette soirée était animée par Adrien Sibomana et Aloys Ndayisenga sous le thème: "Les relations ville/campagne, Bujumbura et son arrière-pays, permaculture et économie de fonctionnalités"

Ce mardi 01/10/2019 débutait à l’IFB un cycle de conférences autour de « La ville du futur », projet en partenariat avec la Délégation de l’Union Européenne dans le cadre du Fonds d’Alembert. Premier sujet: « Les relations ville/campagne, Bujumbura et son arrière-pays, permaculture et économie de fonctionnalités »

Si les thématiques abordées sont transversales et inextricablement liées, une a semblé intéresser le plus les participants: la permaculture.

Des chiffres pour commencer: au Burundi, la taille moyenne d’une exploitation agricole est inférieure à 0,5 ha. 90% de la population vit en milieu rural et pratique une agriculture de subsistance. 90% de la superficie nationale est cultivable, et contribue à 95% à l’offre alimentaire nationale, et constitue 46% du PIB.
Par ailleurs, le Burundi est le 3ème pays le plus densément peuplé en Afrique après les Iles Maurice et le Rwanda, avec 395 habitants/km².

Face à cette croissance démographique et à la régression de l’élevage, le fumier devenant désormais un luxe, les agriculteurs recourent à l’utilisation des fertilisants et d’autres pratiques comme l’utilisation des pesticides pour pouvoir assurer une production suffisante. Ce qui est déconseillé avec la permaculture…

Mais qu’est-ce que la permaculture?

Il faut savoir que les sols s’épuisent avec l’usage intensif, et se contaminent par les intrants agricoles, pesticides et autres produits chimiques qui sont à la base de l’acidification et de l’assèchement des terres. La permaculture est ainsi une méthode d’agriculture qui s’inspire de la nature pour développer des systèmes agricoles en synergie, basés sur la diversité des cultures, leur résilience et leur productivité naturelle.

« C’est une méthode de l’agriculture biologique qui allie tradition, innovation et science au service de l’environnement commun » indiquera Adrien Sibomana, membre du Réseau des Mouvements de l’Agriculture Biologique dans l’East African Community. « Elle n’utilise pas certaines des pratiques habituelles, comme le fait de labourer, de sarcler, encore pire l’utilisation des machines et des pesticides car tout cela contribue à inhiber la croissance des micro-organismes bénéfiques au sol et ne permet pas de préserver l’environnement de manière à faire coexister tous les organismes vivants ». Du coup, la permaculture « met plutôt en avant des techniques de paillages et de multiplication des zones tampons entre les exploitations agricoles ».

L’avenir de la permaculture

Pour Adrien Sibomana, l’avenir de la permaculture est grandement prometteur: « Face aux problèmes de désertification et de changement climatique, il n’y a pas d’autre alternative que d’adopter la permaculture, sans conséquence sur la santé des populations, responsable et équitable. » Pour illustrer son propos, il a donné quelques chiffres.

« De 1999 à 2017, 11,8 à 69 millions d’hectares ont été consacrés à la permaculture, et les agriculteurs qui utilisent cette méthode sont passés de 200.000 acteurs à 3 millions dans le monde. De 1999 à 2017, la permaculture a généré 17 à 97 millions $ ».

Mais Martin Niyonzima, jeune agronome issu de l’Université du Burundi présent dans la conférence, ne partage pas l’enthousiasme. Pour lui, « tout ça est théorique, et manque de sens pratique. Ce discours est incohérent, car l’agriculture burundaise est une agriculture de subsistance, pratiquée en familles. Les bouches à nourrir sont de plus en plus nombreuses. Comment convaincre le petit paysan d’adopter la permaculture, alors qu’il doit doper pour pouvoir nourrir sa famille demain. Avec la permaculture, la terre aura besoin de reconversion pour se remettre à reproduire sans intrants: comment le paysan peut-il attendre? Et la faim? »

Sans oublier les investissements dans le domaine: « L’État approvisionne les agriculteurs en engrais chimiques. D’ailleurs, une entreprise de production d’engrais chimiques vient d’être montée au pays… Dans ce contexte, quel avenir peut-on donner à la permaculture au Burundi? », se demande-t-il

https://twitter.com/UEauBurundi/status/1178666001476587521
Click to comment

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

To Top