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La filière riz, défis et opportunités

Le riz occupe une place importante au Burundi. Il conserve une valeur symbolique qui limite la portée des produits de substitution. Classé au deuxième rang après le haricot dans l’alimentation de base, il est vu comme une culture pouvant profiter aux coopératives et à l’économie nationale …

Considéré jadis comme l’aliment de luxe consommé par les élites urbaines ou lors des festivités (Pâques, Noël, nouvel an, …) par le citoyen moyen, le riz s’impose comme denrée de base dans les villes et les grandes collectivités (armée, écoles, universités, hôpitaux, …) et entre de plus en plus dans les habitudes alimentaires des ménages ruraux », écrit Jean Elysée Mbonankira, chercheur sur la riziculture au Burundi. Le développement de la filière riz au Burundi s’avère être un défi important, la compétitivité du secteur ne s’étant que trop peu améliorée ces dernières années: le pays continue à importer des quantités croissantes de riz. Selon l’ADISCO, le Burundi produirait près de 80.000 tonnes de riz par an mais n’en consommerait que 72.000 tonnes. Ce qui signifie que le riz produit au Burundi peut satisfaire la demande locale sans qu’il y’ait lieu de recourir à l’importation.


Mais alors, où réside le problème? Selon Salvator Karahamye, riziculteur et membre de la coopérative « Umuco w’Abarimyi » de la colline Gatura en commune Bubanza, « La culture du riz est assez exigeante et nous faisons face à plusieurs défis. Primo, les maladies attaquent la culture. Ensuite, c’est le manque d’eau pour irriguer nos champs et le retard de la livraison de l’engrais … alors que nous la payons en avance. Souvent, il nous parvient alors que nos champs sont à un tel stade qu’il n’est plus possible de les fertiliser. Et enfin, les difficultés à accéder aux crédits bancaires. La plupart des fois, nous sommes obligés de recourir aux usuriers et ces opérations coûtent chers : sur un emprunt de 200.000Fbu, ils demandent des intérêts mensuels de 60.000Fbu. »


En attendant de trouver des solutions à tous ces défis, Karahamye demande au Gouvernement d’interdire au moins l’importation du riz pour protéger la production locale. Avis que partage Stéphanie, vendeuse de riz de la Coopérative IASCO à Mitakataka en commune Bubanza: « Notre riz est de bonne qualité et nous avons assez de variétés, Kazosi, Nabusegenya, etc. Mais, comme le riz importé coûte moins cher, le nôtre n’arrive pas à s’imposer. »


Ali Amos, à la tête de la CNARI (Confédération Nationale des Riziculteurs) qui regroupe 17 fédérations de riziculteurs issus de 17 provinces du pays, résume les raisons de la faible productivité du riz local en 2 lignes : « Les variabilités pluviométriques, le faible renouvellement des semences améliorées, le taux d’utilisation des engrais organo minéraux encore bas ainsi que l’environnement économique défavorable. »

Parlons des remèdes…

Pour la CNARI créée en 2019, membre FOPABU (Forum des Producteurs et Agriculteurs du Burundi), avec plus de 22.000 membres (dont près de 10.000 femmes), la priorité est de rendre le riziculteur autonome : « Pour appuyer, être plus proche de nos membres, les accompagner dans leur autonomie financière, nous devons tout d’abord résoudre la sempiternelle problématique d’accès au financement en créant notamment une micro finance pour les riziculteurs. Après, il sera sujet de constituer une mutualité. »


Et jusqu’à aujourd’hui, quelles réalisations ? « Aujourd’hui, notre travail se focalise plus sur le plaidoyer. A travers la Fopabu, nous avons déjà introduit des propositions qui défendent les intérêts des riziculteurs, comme la fixation du prix de la denrée. Actuellement, il est question de plaider en faveur de la réduction, sinon de l’interdiction, de l’importation du riz qui porte un sérieux coup au riziculteur dont le produit se trouve sans preneur. A côté de cela, il faut augmenter la production du riz en développant notamment un système d’encadrement de proximité des paysans, et les amener à se regrouper davantage au sein des associations, unions, ou coopératives plus aptes à défendre leurs intérêts au niveau local ou régional. »


Selon le chercheur Mbonankira, le riz occupe une position stratégique tant au niveau micro que macro: « Au niveau micro-économique, il faut savoir que le riz constitue la principale source de revenus des ménages rizicoles. Dans la plaine de l’Imbo, il est le premier pourvoyeur de revenus. Et cela profite aussi bien aux hommes qu’aux femmes (plus émancipées que leurs pairs dans le café ou le thé où les exploitations sont gérées le plus souvent par les hommes). Au niveau macro, le riz vient en deuxième position parmi les céréales produites et consommées après le maïs. En 2008, le riz produit au niveau national était environ de 78.000 tonnes/par an de riz paddy en 2008. La superficie rizicole totale est environ 24.000 ha. De façon générale, les superficies et les productions augmentent au fil des années. »

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