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« Et vous, quel est votre combat pour la paix ? »

Ils étaient à trois pour répondre à cette grave question ce 23 février 2019, à l’occasion de la célébration par le Rotary de ses 114 ans : Sylvestre Ntibantunganya, ancien Président du Burundi, Christine Ntahe, devenue activiste dans la réconciliation et la protection des droits de l’enfant, et Roland Rugero, écrivain et Directeur exécutif du Magazine Jimbere. Un débat partagé entre le passé et l’avenir

Le 114ème anniversaire du Rotary Club International. Conviés pour cette « Soirée de l’entente mondiale » axée autour du thème du jour : « Mon combat pour la paix », les panélistes sont revenus, tour à tour, sur leur contribution à cette lutte. Étaient également présentes lors de cette célébration plusieurs hautes personnalités, dont l’Ombudsman burundais Édouard Nduwimana, les ambassadeurs des États-Unis et des Pays-Pays au Burundi, le Coordonnateur résident du système des Nations Unies au Burundi, … avec une belle brochette de l’élite de Bujumbura.

« Ce n’est pas la force qui règle les problèmes mais les arguments »

Répondant à la question du jour, le Président Ntibantunganya est largement revenu sur les évènements qui ont marqué son parcours politique : comment contre toute attente, il devient Président de la République après les tragiques disparitions de ses deux prédécesseurs Cyprien Ntaryamira et Melchior Ndadaye ; le coup d’état qui le renverse en 1996 ; les débuts des accords d’Arusha, … Dans tout cela, le point qui a le plus marqué l’audience : « Souvenez-vous bien, en 1998, 2 ans après avoir été renversé par le major Pierre Buyoya, j’ai participé à son investiture solennelle » avant de bien préciser : « Ce qui comptait le plus pour moi, c’était le dialogue. Et il a eu lieu, avec Arusha. Je reste convaincu qu’en politique, le plus important n’est pas la force, mais la pertinence des arguments. Car si on parvient à convaincre l’autre, alors il n’a pas besoin de faire recours à la force pour se faire comprendre ».

Pour Christine Ntahe, la « Maman Dimanche » employée à la RTNB (Radio et Télévision Nationale du Burundi) de 1969 à 1999, « le combat pour la paix s’est révélé avec l’émission radiophonique par et pour les enfants. Je recevais à longueur des journées des dizaines de lettres des quatre coins du pays, mais aussi de l’extérieur, notamment de la part des enfants qui se trouvaient alors dans les camps des réfugiés burundais en Tanzanie. Les parents voulaient avoir des nouvelles de leurs enfants, les enfants cherchaient leurs familles que la guerre avait éparpillée…»

Elle n’oubliera pas de rappeler son travail de journalisme, qui l’a mené à la rencontre de femmes extraordinaires qui ont lutté pour la réconciliation de leurs communautés déchirées par la haine et les souffrances post-1993.

« Comment maintenant à préparer la paix de demain »

L’écrivain Roland Rugero a préféré se tourner vers l’avenir : « Face à ces personnalités de plus de 30 ans d’expérience, il serait prétentieux de revendiquer un quelconque combat pour la paix. Par contre, moi et tous les autres qui faisons partie de ce qu’on a appelé ‘la quatrième ethnie’, c’est à dire les ‘intellectuels’, dans la définition populaire du mot au Burundi, les intellectuels avons donc le rôle de poser les bonnes questions qui permettent de préparer la paix de demain ».

Et de fixer son constat : « Actuellement,7 Burundais sur 10 ont moins de 35 ans. Plus de 65% de ces jeunes sont au chômage. Notre population est jeune, et en 2050, l’Isteebu estime qu’elle aura doublé… Nous aurons alors entre 13 et 15 millions de demandeurs d’emploi. La question est : comment rendre notre économie stable pour qu’elle puisse assurer à tout ce monde la possibilité de trouver une occupation, subvenir aux besoins fondamentaux, bâtir ses rêves ? La paix de demain se construit déjà aujourd’hui ».

A la fin de cette conférence-débat, les panélistes et l’audience se seront convenus sur un point : la paix n’est pas une fin en soi, mais une perpétuelle quête.

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