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Un peu d'Histoire...

Mémorial de Kizingwe, l’autre oublié de l’Histoire

Sobrement installé dans le quartier Kizingwe, à Kanyosha, dans la commune urbaine de Muha, le mémorial de Kizingwe marque le point de pénétration des Allemands en tant que puissance coloniale. Découverte avec Venant Igirukwishaka, conservateur du site.

D’emblée, rien ne laisse entrevoir que l’endroit est riche en histoire. Ce n’est ni le calme saisissant, encore moins l’air pur qu’on en remplirait les poumons qui nous renverraient à une éventuelle particularité du lieu. L’espace de plus de 90 ares est un jardin retranché dans les replis du quartier Kizingwe, en passe d’urbanisation. Ici, quelques communautés religieuses viennent profiter des atouts environnementaux et de quiétude pour reconnecter avec le divin. Sinon rien de plus, et pourtant …


Coup d’envoi de l’occupation allemande

« Après plusieurs tentatives vaines de pénétration et d’installation au Burundi, les pères néerlandais, Van Der Burgt et Van Biesen, rencontrèrent le lieutenant-colonel Von Trotha et le Capitaine Ramsay à Ujiji. Ces deux derniers leurs conseillèrent de tenter leur chance le long du Lac Tanganyika, Von Trotha ayant visité le marché de Bujumbura leur signala y avoir vu un endroit idéal pour l’aménagement d’une mission. » Tente d’expliquer Venant Igirukwishaka, promoteur écotouristique et conservateur du site

C’est alors dans ces circonstances que le 19 Novembre 1896, une semaine après leur départ d’Ujiji, l’équipage du capitaine Ramsay accompagné des pères néerlandais accosta à l’embouchure de Kizingwe, c’est-à-dire là où la rivière Kizingwe se déverse dans le Tanganyika. Après avoir reçu l’aval du chef de la région Kiyogoma, qui gouvernait la région qui s’étendait de la rivière Mugere jusqu’à Buramata en province actuelle de Bubanza, inquiets que la population indigène puisse confondre la mission évangélisatrice de la mission d’occupation, les deux missionnaires vont vite prendre congé du capitaine Ramsay et de ses troupes, et continuer le chemin de leur côté, c’est à dire le lendemain le 20 Novembre. Alors que le capitaine Ramsay va s’installer à Kajaga première station des allemands au Burundi.

Point historique et symboliquement particulier

Pour le conservateur du site, l’embouchure de Kizingwe est un endroit hautement symbolique. Pour lui, 3 aspects principaux justifient la richesse de cet endroit. D’abord la légende de Ntwero, Selon Igirukwishaka, d’après les informations qu’il a collectées auprès des sources orales, l’embouchure de Kizingwe aurait servi de point d’embarcation à Ntwero qui venait de Bushi (Nord-ouest du Lac Tanganyika) pour ramener de la pluie qui avait tari depuis longtemps dans les montagnes de Bututsi. En guise de récompense, il épouse la fille du roi Nyaruhanza, chef local. Ntwero donnera naissance à deux fils, Nsoro et Jabwe, dont le dernier se trouve être le géniteur de Ntare Rushatsi Cambarantama, fondateur de la dynastie Ganwa, l’origine de la création de la monarchie burundaise.


Ensuite, toujours, selon Igirukwishaka, le site serait le point de départ des esclaves déportés par Rumaliza. En quelque sorte la Gorée du Burundi, située sur un point surélevé, l’embouchure de Kizingwe serait selon toute vraisemblance le point d’embarcation vers les ports de Zanzibar et Kiliwa, sur l’océan Indien pour les esclaves acheminés vers les pays du Golfe arabique par Rumaliza, et plus tard au temps de l’occupation les travailleurs amenés dans la « Factory » d’ivoires à Uvira, RDC.

Citant la tentative du 30 juillet 1879 de la Fondation de la Mission de Rumonge et d’autres accrochages entres missionnaires et populations locales, de 1884 à 1891, dans la région d’Uzige, le promoteur éco-culturel considère cet endroit comme marquant le début du christianisme au Burundi. Etant donné que toutes ces tentatives d’installation des missionnaires au Burundi s’étaient soldées sur des échecs répétitifs de la part des missionnaires, Igirukwishaka considère le site de Kizingwe comme le point de départ du christianisme au Burundi.


Un site négligé et une histoire d’occupation allemande en voie de disparition


Ayant acquis le territoire de son propre argent en 2007, Venant Igirukwishaka à la tête de de RCD (Association Renaissance Culturelle pour le Développement) qui a aménagé cet espace et qui assure sa prise en charge, fait savoir que le site accuse un manque d’intérêt qui est d’ailleurs général pour tous les endroits à caractère historique au Burundi.

Il fait d’ailleurs remarquer que les traces de l’occupation allemande au Burundi tendent à disparaitre de la mémoire collective. « Aujourd’hui, un patrimoine d’une vingtaine d’années de colonisation allemande est menacé de disparition, à part le cimetière de Cibitoke, restauré il y a quelques années grâce à la coopération allemande, le fort de Boma construit à Gitega et deux maisons qui servaient de résidences coloniales, il ne reste presque plus rien comme symbole de l’occupation allemande au Burundi. Il y a la nécessité de préserver les témoignages du passé, essentiellement matériels et monumentaux qui sont une expression du bien commun de la nation et de sa grandeur. »


Aujourd’hui l’endroit bien que peu prisé, accueille des sportifs, ou d’autres visiteurs en quête de repos, ainsi que des retraitants désirant un endroit propice pour un retranchement spirituel. Et d’inviter le Gouvernement et/ou ses partenaires de les appuyer dans la prise en charge de cet endroit.

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