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La reconnaissance de l’identité de l’autre, un besoin vital

Bien des malheurs ont frappé l’humanité à cause de l’absence de la reconnaissance identitaire comme une valeur et un droit à tout être humain. Cette absence s’accompagne d’abord d’un discours déshumanisant, d’exclusion, de discrimination… pour finir souvent dans le crime voire l’extermination. Comment éviter d’en arriver là. Alexis Niyibigira, psychologue nous éclaire. 

Comment la quête de la reconnaissance identitaire peut s’effectuer sans la fabrication des messages haineux ?

Pour que la quête de la reconnaissance identitaire puisse se faire sans la fabrication des messages haineux, il faut que réellement les gens soient conscients que d’abord cette reconnaissance est reconnue par la Constitution du Burundi qui stipule qu’aucun Burundais ne sera exclu de la vie sociale, économique ou politique de la nation du fait de sa race, de sa langue, de sa religion, de son sexe mais aussi de son origine ethnique. En outre, Abraham Maslow dit que l’appartenance identitaire est aussi un besoin qui confère l’estime de soi, qui confère aussi le statut d’être un individu en tant qu’entité individuelle et collective par rapport à la société. Alors pour que la reconnaissance identitaire soit effectuée sans passer par des messages haineux, les gens doivent éviter des mots qui tuent, la globalisation, les stéréotypes, la déshumanisation de l’autre et accepter que l’autre puisse avoir une appartenance ethnique.

Concrètement qu’est-ce qu’une quête de reconnaissance face à ces besoins identitaires ?

Quand on parle d’une quête de reconnaissance par rapport à ces besoins identitaires, je dirai d’abord que c’est un besoin. L’ethnologue Fabien dit qu’au-delà de la reconnaissance de l’autre, il faut aussi une validation de l’identité de l’autre, il faut une appréciation de l’identité de l’autre. Mais aussi, les gens doivent savoir que c’est une relation réciproque. Si j’ai droit à cette identité, il faut que les gens la reconnaissent, la valident, l’apprécient. Et c’est cela qui me donne une valeur en tant que valeur fondamentale de mon être et de l’autre. Et donc la quête est ici un droit mais aussi un devoir pour l’autre de respecter mon identité pour justement la valiser et l’apprécier.

Et dans les faits comment s’effectue cette quête identitaire ?

Normalement personne  n’a de choix par rapport à cette quête puisque chacun naît dans une famille et dans une communauté. Et du coup, il ou elle a une appartenance clanique, ethnique, et après par le système de socialisation l’individu a une appartenance religieuse voire même politique. Souvent ce sont des schémas sociaux dont nous ne sommes pas conscients, qui s’installent. Pour dire que nous nous en rendons compte par le processus de socialisation que nous sommes Hutu ou Tutsi ou Twa ; et par l’appartenance politique que nous sommes dans tel ou tel autre parti politique. Ce sont donc des schémas individuels, psychologiques qui sont des fois inébranlables parce qu’ils sont sociaux. Nous n’avons pas à savoir, à rechercher l’identité Hutu ou Tutsi ou Twa puisque nous naissons dans une famille, sommes socialisés et à la fin nous constatons que nous avons une telle ou telle appartenance sans faire de combat de la chercher.

Donc vous dites que c’est la société qui nous impose cette quête identitaire ?

Réellement, nous n’avons de choix de l’identité clanique et identitaire parce que nous avons des familles déjà structurées sur le plan social et identitaire. Lorsqu’une personne nait dans une famille Hutu, Tutsi ou Twa, elle n’a pas à nier l’identité de sa famille pour dire que ce sont des schémas culturels et sociaux auxquels l’on est astreint. 

Quelles sont les conséquences en cas d’absence de reconnaissance identitaire ?

Les conséquences sont très graves. l’extermination de l’autre à cause justement du refus, de l’absence ou de la banalisation de l’identité de l’autre peut conduire à la discrimination, à l’exclusion de l’autre, à la stigmatisation, aux tueries et à la démarche vengeresse voire même à l’extermination d’une race comme l’a fait Hitler sur les Juifs. Cela veut dire que sans respecter l’autre, l’on crée des schémas déshumanisants, des stéréotypes, des préjugés pour justifier la négligence, la discrimination voire l’extermination de l’autre. Par exemple, si je suis étiqueté de serpent, de crapaud, de tueur, de mauvais, de maudit…ce sont des stéréotypes, des préjugés dangereux et qui peuvent faciliter les tueries, l’extermination de l’autre à cause justement par le refus, l’absence ou  la banalisation de la reconnaissance de l’identité de l’autre.

Et quand votre identité n’a pas été reconnue, comment recouvrir cette reconnaissance sans retomber dans les travers de la haine ?

Comme je l’ai expliqué, personne ne doit s’agenouiller pour que son identité soit reconnue. C’est un droit consacré par ailleurs par la Constitution du Burundi. Et donc étant un droit, c’est un devoir pour les autres de le reconnaitre comme tel. Personne ne doit quémander son droit. Les autres doivent le reconnaitre, le respecter et les valeurs fondamentales de tout un chacun. Les gens doivent être conscients que dans un Etat démocratique, socialement reconnu, ils doivent respecter les identités des uns et des autres pour construire la nation ensemble.

En cas d’incompréhensions ? 

Dans ce cas, il faut passer par l’éducation des communautés. Les gens doivent avoir une citoyenneté responsable et donc on doit savoir les droits et devoirs. Les gens doivent savoir qu’ils doivent être conscients qu’ils doivent respecter, valider et apprécier mon identité. Et cela doit être enseigné dès le bas âge, dans les écoles, dans les universités, dans les communautés pour que les gens puissent avoir cette citoyenneté responsable de respecter l’autre dans leurs différences.

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