Jimbere

Kirundi French
Education

Mwaro/Internats : une réintroduction qui appelle à la prudence

D’aucuns saluent la volonté du gouvernement de réintroduire l’internat au secondaire pour certaines sections. Mais des préalables s’imposent pour la réussite de ce projet. Récit.

La province de Mwaro compte environ 52 écoles, dont seulement 6 à régime d’internats. Depuis l’annonce du chef de l’État de rétablir des internats et le retour à l’internat pour les élèves de certaines sections pour l’année scolaire 2024-2025, cette province a vu une augmentation de 75 élèves par rapport aux chiffres précédents. En outre, 450 nouveaux élèves ont rejoint les internats, indique Omer Barandagiye, directeur  provincial de l’éducation en province de Mwaro. Le DPE de Mwaro apprécie cette politique mais plaide pour une augmentation du nombre d’écoles à régime d’internat à dix établissements  en incluant également les écoles techniques.

Côté qualité de l’enseignement, certains parents se lamentent de la baisse de cette dernière. Parmi les raisons avancées : l’abandon de certains éducateurs à leurs postes, arguant que les enfants sont devenus ingérables. Du coup, les parents préfèrent maintenant envoyer leurs enfants dans d’autres provinces comme Bururi, Ngozi et Gitega où des écoles en internat sont gérées par des religieuses ou des prêtres pour la qualité de leur éducation et leur performance : « Nous les envoyons là-bas car ils s’occupent bien des élèves et intègrent des aspects religieux dans leur éducation. De plus, ils ne gâtent pas les enfants. »

Ces parents se disent prêts à payer des frais élevés pour une meilleure scolarité car les conditions de vie dans les écoles internes ne sont pas bonnes alors que les élèves ont besoin d’un environnement favorable dont de l’énergie suffisante pour étudier.

Côté administration, cette décision est également saluée. Pour Athanase Ciza, chef de cabinet de la province Mwaro, cette décision tombe à point nommé et d’appeler le groupe chargé de la mise en œuvre de ce projet d’inclure les personnes se trouvant sur le terrain car elles ont une meilleure vision des actions nécessaires pour assurer son succès.

Aux Lycées Muyebe et Mwaro

Lorsqu’on évoque une meilleure qualité de l’éducation, d’aucuns s’accordent sur trois caractéristiques incontournables à savoir un personnel compétent, du matériel de qualité et un environnement d’apprentissage favorable. Mais dans certaines écoles de Mwaro, ces conditions sont loin d’être réunies.

Au Lycée Muyebe, il n’y a pas de bâtiments adéquats pour accueillir les élèves. Celui qui fait office de dortoir n’a pas de lits et de matelas. Bien plus, il s’observe l’insuffisance du matériel didactique tel que les livres, le laboratoire et la bibliothèque, et le nombre insuffisant d’enseignants : « Au lycée Muyebe, pour l’année scolaire 2024-2025, nous avons 875 élèves, dont 645 externes et 230 internes. Cependant, malgré cela, nous faisons face à de nombreux problèmes qui affectent la vie des élèves, les empêchant de progresser comme il se doit. »

Voici le lit qu’occupe deux élèves

Et d’expliquer que l’école manque de dortoirs adéquats et des matelas. « Idéalement, chaque élève devrait avoir son propre lit, mais actuellement, ils dorment à deux par lit. »  De surcroît, confie-t-il, lorsqu’un élève est malade ou au moment d’acheter les stocks alimentaires, cela devient compliqué car l’école ne dispose pas de véhicule, ce qui occasionne des frais supplémentaires : « Nous dépensons environ deux millions de francs burundais par mois pour le transport. »

Au Lycée Mwaro, les principales difficultés sont liées à l’insuffisance du personnel et le manque de bancs pupitres  indique Epitace Bayubahe, le directeur. Ce qui oblige les élèves à s’asseoir à trois par banc,  les empêchant à travailler efficacement. De plus, l’école souffre d’un manque criant d’enseignants, notamment en langues et en économie : « Nous sommes obligés de recourir à des bénévoles et des vacateurs. »

Une autre difficulté réelle est celle de la qualification des enseignants. De l’avis des chefs d’établissement interrogés, le niveau de certains enseignants formés est tellement bas qu’ils ont du mal à rédiger un paragraphe sans commettre de fautes. Ces chefs d’établissements ajoutent que cette insuffisance est à l’origine des nombreux problèmes de transmission, et des réticences observées dans l’enseignement de certaines disciplines.

Difficiles conditions de vie, véritable pesanteur pour l’éducation

« Nous sortons du réfectoire rarement rassasiés, malgré que l’école nous permet d’acheter des avocats pour agrémenter les plats. La quantité de nourriture devrait être augmentée », les lycéens de Muyebe

Pour ces directeurs, si le projet de réintroduction des internats est relancé, ces écoles doivent être aidées à construire des infrastructures adéquates, notamment des dortoirs modernes pour les élèves, en veillant à ce qu’ils soient accessibles aux élèves handicapés. Ils ont également insisté sur la nécessité de fournir des lits et des matelas, de rénover les bâtiments anciens, de construire des bibliothèques et des laboratoires, et d’augmenter le budget alimentaire des élèves en raison de la hausse constante des prix sur les marchés. En outre, ont-ils souligné, si le projet de réintroduction des internats est mis en œuvre, il est crucial de résoudre ces problèmes d’abord, car sans cela, le projet n’apportera pas de grande amélioration à l’éducation.

Même son de cloche au syndicat Conapes pour qui, cette politique de retour à l’école en internat est appréciable mais demande des préalables. « Dans de nombreuses écoles, les conditions de vie des élèves sont précaires en termes de la quantité insuffisante d’aliments, de manque de lits et ou de matelas. Il est donc nécessaire que le gouvernement fasse un effort supplémentaire pour mettre en place des conditions favorables pour un bon apprentissage », plaide Emmanuel Mashandari, président du syndicat Conapes.

Par ailleurs, réitéré-t-il, le gouvernement ne doit pas oublier de mettre en place des laboratoires et des bibliothèques : « Ce que nous enseignons en classe est insuffisant. Les élèves doivent avoir accès aux livres et aux laboratoires pour compléter leurs connaissances et se préparer adéquatement. »

Click to comment

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

To Top