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La latrine adéquate au Burundi, luxe ou nécessité ?

Dans les campagnes et même dans certaines rues de Bujumbura, la défécation en plein air continue d'exister

À l’occasion de la journée internationale des toilettes le 19 novembre, il est essentiel d’évaluer la situation actuelle du lieu d’aisance au Burundi et la promesse d’installer des toilettes publiques dans la ville de Bujumbura…

Au-delà de son rôle en tant que dispositif de dignité, la toilette représente un espace d’une utilité essentielle, bien qu’elle demeure un sujet tabou pour certains. Cela se manifeste à travers des attributs tels que : « Akazu ka surwumwe » (un lieu inévitable pour tous), Ntawutuma uwundi  (procuration non permise), et d’autres expressions…. Il est largement reconnu que l’accès à un lieu d’aisance est crucial notamment en cas de besoins pressants tels que ceux engendrés par des troubles digestifs.

Ce qu’avait rappelé Selemani Kamisi, secrétaire permanent du ministère de l’Hydraulique, de l’Énergie et des Mines, le 1er décembre 2023, lors de la célébration de la Journée internationale des toilettes, à Rumonge : « L’assainissement étant une dignité, une vie sans toilette est malpropre, dangereuse et humiliante ».

À l’époque, le secrétaire avait fait savoir qu’au Burundi, la proportion des ménages utilisant des latrines améliorées non partagées était de 28,2 % au niveau national, tandis que l’utilisation des latrines non améliorées était estimée à 65,5 % au niveau national. En outre, les ménages possédant un service de base de lavage des mains, à savoir un endroit, de l’eau et du savon, n’ont été estimés qu’à 8,6 % au niveau national, tandis qu’il s’observait la défécation à l’air libre s’élevant à 2,2 % au niveau national.

Où se soulage le burundais ?

La fin justifie les moyens, dit-on. Dans les campagnes, il existe des latrines précaires souvent en paille, un petit trou à l’intérieur recouvert par deux troncs d’arbres et sans eau pour se laver après usage. Les familles modestes disposent encore de toilettes construites en terre, souvent avec un dispositif de lavage des mains communément appelé « Honyora ukarabe ».

Léonie Sibomana, habitant la commune Bweru de la province Ruyigi, décrit la situation : « Souvent, nous construisons des lieux d’aisance suivant nos moyens. Par exemple, pour les fossoyeurs, ils exigent plus de 60.000 BIF pour un petit trou, et le paiement se fait d’avance, ce qui est au-dessus de notre pouvoir d’achat.

Latrine d’un ménage de la commune Bweru, province de Ruyigi

Par ailleurs, confie-t-elle, la présence de latrines non adéquates s’explique par la topographie d’une localité. « Par exemple, sur la colline de Bitanga, il est  carrément impossible de creuser jusqu’à deux mètres de profondeur sans atteindre l’eau.» Et de souligner que cela affecte la qualité de leurs toilettes en dépit du besoin de lieux d’aisance confortables.

Pour les nantis, généralement dans les villes, il existe des toilettes à siège confortables avec des dispositifs modernes de chasse de déchets et un lavabo à côté pour se laver les mains.

Cependant, certains ménages de la ville de Bujumbura connaissent encore des toilettes précaires au vu du nombre d’utilisateurs. Un locataire de la zone Bwiza décrit le lieu d’aisance de son ménage : « Nous sommes plus de 50 à habiter dans l’enclos. Mais nous ne disposons qu’une seule porte commune pour les mâles et les femelles. Des files d’attente s’observent chaque matin. » Des fois, poursuit-t-il, certains sont obligés de se soulager dans la salle de bain ou la douche lorsqu’ils sont pressés et surtout s’il s’agit du petit besoin.

Et les toilettes publiques promises…

Afin de rendre la ville propre, en 2021, la maire de Bujumbura avait promis d’y installer des latrines publiques mais depuis, ce projet se fait toujours attendre.

Contacté pour savoir l’état d’avancement, Astère Ndayikeje, chef du service Entretien et Gestion des infrastructures et équipements municipaux en mairie de Bujumbura, reconnait que le projet tarde à se concrétiser : « Nous attendons que l’OBUHA puisse nous indiquer où installer ces locaux. »

Interrogé, Protais Manirakiza, commissaire de l’urbanisme, de l’habitat et des études au sein de l’OBUHA, fait savoir que ce projet de toilettes publiques est encore sous étude de faisabilité : « Bien sûr, les toilettes publiques sont une nécessité. Mais pour s’inscrire dans l’image de la ville que nous voulons, nous devons mener des études pour placer ces locaux dans des conditions propices à l’esthétique et à l’environnement urbain. »

L’étape suivante, indique cet ingénieur, sera l’appel à la manifestation d’intérêt aux privés afin d’assurer un suivi rigoureux de ces derniers, tout en garantissant des conditions optimales d’hygiène. De préférence, souhaite Protais Manirakiza, ces toilettes seront écologiques. Côté fonctionnement, les exploitants seront redevables des taxes dont la procédure de collecte sera déterminée par le service compétent.

Ceci étant, une équipe conjointe de l’OBUHA et de la Mairie sera bientôt mise sur pied pour en arrêter les modalités permettant de rendre effective cette orientation.

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