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Gihanga : entre discours menaçants et fracture sociale, il n’y a qu’un pas !

Pendant la période électorale, certains jeunes militants des partis politiques profèrent des messages menaçants envers leurs adversaires, en attisant la haine et la méfiance.

La société post-conflit qu’est le Burundi peine à se détacher des comportements qui défient le vivre-ensemble. Certaines attitudes accomplies pour des fins politiques interrogent sur la solidité de la cohésion sociale…

Les visées partisanes pourraient avoir raison de la morale ? Cette question mérite d’être posée au regard des témoignages des habitants de la colline Rumototo, commune Gihanga de la province Bubanza confient de leurs.

Pendant la période électorale, indique Elias*, habitant de ladite colline,  des menaces et intimidations deviennent monnaie courante : « La population est souvent victime des intérêts égoïstes des politiciens quand ils les forcent d’intégrer leurs partis afin de maximiser le vote pour leur compte. »

Cette attitude, soutient Richard*, habitant la même contrée, impacte négativement le climat social d’autant plus que la confusion mêlée à la peur gagne les esprits : « Quand un individu évoque les affres du passé par des intimidations envers ses compatriotes, en les contraignant de participer à des activités contre leur gré, on ne peut que s’attendre aux dissensions. »

Un danger pour la société

Au niveau de l’administration communale, ces pratiques sont condamnées tels comportements. Par ailleurs, précise Christophe Bigirimana, Secrétaire Permanent de l’administrateur communal, la jeunesse de cette circonscription était manipulable dans le passé : « Il y’avait toujours des conflits entre les jeunes militants du CNDD-FDD et ceux du FNL/CNL. » Ceux du FLN, confie M.Bigirimana, demandaient aux jeunes du parti au pouvoir  s’ils pensent réellement que leur parti dirigera le pays jusqu’à la fin du monde. Les autres leur rétorquaient en affirmant que leur parti dirigera le Burundi  jusqu’au retour de Jésus-Christ.

C’est à partir de ces propos, poursuit-t-il, que les confrontations éclataient, les uns menaçant les autres de les ligoter, tabasser ou emprisonner, s’ils ne sont pas reconduits au pouvoir, et puis les autres rétorquaient en menaçant de passer à l’action tant qu’ils sont au pouvoir juste pour voir le sort de leurs opposants

Ce cadre de l’administration communale reconnait par ailleurs que même des leaders pourraient lancer des messages menaçants avec des ambitions politiques : « Peut-être les uns pour s’éterniser au pouvoir, les autres pour aboutir et aussi à leurs ambitions de conquérir le pouvoir », souligne-t-il.

Pour Christophe Bigirimana, aussitôt qu’il y a des messages menaçants, aussitôt qu’il y a des cas pareils de conflits liés à ces messages, le risque est grand de voir le tissu social se déchirer : « Par conséquent, ces conflits peuvent déboucher aux  affrontements avec tout ce que cela comporte en termes d’arrêt de travail et projets de développement. »

Emmanuel Ndikumana, expert en leadership : « En principe, l’important pour un responsable, ce n’est pas ce qu’il dit, mais pourtant, c’est ce que son auditoire comprenne à travers son message. »

Selon Emmanuel Ndikumana, expert en leadership, chaque fois qu’on utilise un langage qui cherche à contraindre les gens, il y’aura toujours des dissensions. « Certains parmi les gens qui écoutent ces discours, sont déjà acquis à la cause de ceux qui les propagent. Et souvent, ils agissent comme des amplificateurs pour porter plus haut cette voix et pas seulement dans le sens verbal mais également physique car ils se sentent encouragés à contraindre les autres. D’un autre côté, nous avons un groupe  ne voit pas les choses de cette manière », insiste-t-il

Dans ce cas, explique cet expert, il va se passer deux choses. Soit, quand les uns constatent que le rapport de force n’est pas proportionnel, et qu’ils voient qu’ils ne peuvent pas se défendre physiquement, ils vont commencer par se taire : « Souvent, le silence, on peut l’interpréter comme étant une manière d’accepter, alors que c’est la façon la plus dangereuse qui prépare l’explosion. A la longue, ceux réduits au silence développeront une sorte de résistance, ce qui se traduira en des actes de violences, de révolte… »

Le dialogue vaut mieux que la force

Mr Ndikumana interpelle les leaders à toujours écouter et servir les intérêts communs : « C’est vraiment important pour un responsable de réfléchir avant de parler ou de prendre une décision. En principe, l’important pour un leader, ce n’est pas ce qu’il dit, mais c’est ce que son auditoire entende. »

Bien plus, cet expert appelle la population à faire attention face à ce genre de langage menaçant : « Même lorsqu’il s’agit de celui ou de celle qu’on croit être d’une même appartenance, qu’elle soit politique ou autre, on ne doit pas être un mouton de panurge. On doit réfléchir avant d’agir.  Parce qu’en réalité, la prospérité d’une société découle de la cohésion sociale », conclut-t-il.

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