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« Après la pandémie du COVID-19, nous craignons qu’elles soient plus pauvres qu’avant »

Bars et motels vides au poste-frontière de Kobero

Face au nouveau coronavirus, les gouvernements de l’EAC ont sorti le 25 mars 2020 un communiqué conjointappelant à des mesures strictes, comme restreindre provisoirement les mouvements de personnes aux frontières, tout en facilitant la libre circulation des biens et services. Une décision qui ne concerne pas le petit commerce transfrontalier …

Au Burundi, le petit commerce transfrontalier (souvent appelé commerce transfrontalier informel) a pesé pour plus de 92 milliards de Fbu en 2018, selon la BRB. Aujourd’hui, au niveau des frontières, seuls les camionneurs et leurs convoyeurs sont autorisés à continuer le voyage, alors que les principaux moyens de transport utilisés dans le petit commerce transfrontalier se trouvent être les motocyclettes (51% des exportations) et la tête (48% des importations).

Bienvenu Hicuburundi, responsable du projet « Mupaka, shamba letu » (Frontière, notre gagne-pain) au sein de l’Afrabu, en appui à plus d’une centaine de femmes dans le petit commerce transfrontalier à Gatumba, éclaircit sur leurs malheurs depuis la fermeture des frontières : « Avant tout, il faut comprendre la particularité du commerce. Il est opéré par des personnes à faibles revenus. Elles vivent donc de leur travail, du jour au jour. Dans notre cas, la plupart de ces femmes sont dans le commerce des produits alimentaires. Elles ont un capital en-dessous de 100.000 Fbu. Et en moyenne, elles gagnent entre 5.000 et 10.000 Fbu par jour. Elles n’ont donc pas de moyens pour s’offrir le luxe des services de transport par les camions. »

« Si elles perdent leur travail, elles perdent leur émancipation »

Commerçantes travaillant entre le Burundi et la RDC

Les revenus du petit commerce les aident à gagner du respect dans la communauté : « Avec cet argent, elles peuvent participer aux dépenses de la famille au même titre que leurs conjoints. Certaines sont même veuves, elles assurent seules l’entretien de la maison, l’éducation des enfants, les frais de santé … Et pour continuer à vivre, elles consomment aujourd’hui le capital de leur business. Bientôt, elles seront à court, si cela n’est pas encore arrivé. Si elles n’ont plus de revenus, pauvres, elles ne seront plus considérées dans la communauté. »

Une situation qui risque de s’empirer avec les pluies torrentielles qui ont fait déborder les rives de rivière Ruzizi, le 19 avril 2020. Bilan : 7 000 maisons inondées et près de 40.000 déplacés. « Certaines de ces femmes commerçantes avaient également investi dans l’agriculture. Mais, tout a été emporté par les crues de la rivière. »

A Makamba, l’important point d’entrée des échanges transfrontaliers informels (37,2%), certains commerçants du marché central, sont également en désolation : « Avant le coronavirus, les affaires marchaient bien. Moi, qui importe souvent les souliers d’hommes, j’écoulais la marchandise importée avant même d’arriver au marché. Presque toutes les commandes se faisaient en cours de route, par téléphone », se rappelle avec amertume Juma, marchand. « Aujourd’hui, on passe tout notre temps aux ligalas, à rien faire. Vivement que les frontières rouvrent », un souhait qu’il partage sans doute avec le millier d’autres commerçants.

Pour rappel, la RDC et la Tanzanie constituent respectivement les plus grands marchés d’écoulement (56%) et d’approvisionnement (43%). Et contrairement à la plupart des pays africains où le commerce à petite échelle est souvent dominé par les femmes, au Burundi, 8 personnes sur 10 dans le commerce, sont des hommes.

Dans le cadre du projet « Tuyage » financé par l’USAID, le Magazine Jimbere s’associe avec Search For Common Ground au Burundi (partenaire de mise en œuvre du projet) dans la production d’une série d’articles économiques.

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