« Sans pour autant minimiser l’importance du coût humain des conflits périodiques que le Burundi a connus depuis son indépendance » précise l’étude*, elle a porté son attention sur leur impact économique, en particulier celui de 1993 à 2003. Les coûts estimés sont inquiétants
« Alors que le Burundi a connu six épisodes de conflits civils depuis son indépendance, en 1965, 1972, 1988, 1991, 1993-2013 et 2015, celui de 1993-2003 a été le plus dévastateur pour l’économie », expliquent les deux enseignants-chercheurs à l’Université du Burundi, auteurs de l’étude. « Définis comme une confrontation armée entre le gouvernement et un ou plusieurs groupes d’opposition, ces conflits expliquent aujourd’hui une partie importante du faible développement économique du Burundi », soulignent-ils.
En effet, selon l’étude, entre 1970 et 2015, les conflits civils inter-burundais ont réduit en moyenne la croissance annuelle du PIB de 4 points de pourcentage par rapport à ce qu’elle aurait été potentiellement.
La guerre civile de 1993-2003 a été particulièrement coûteuse. D’après les estimations, ce dernier conflit a coûté au Burundi entre 8 et 10 milliards $, « ce qui représente autour de 1.500 $ par personne ou bien 5 années de revenus. Jusqu’à ce jour, le PIB par habitant du Burundi reste inférieur à ce qu’il était en 1992 », révèle l’étude.
Intitulée « Economic Costs of Civil Conflits : The Case of Burundi », cette étude a été réalisée par Arcade Ndoricimpa et Michel-Armel Ndayikeza (enseignants-chercheurs à la Faculté d’Economie de l’Université du Burundi) dans le cadre d’un projet de recherche collaboratif lancé par l’AERC (African Economic Research Consortium).
Si le Burundi était resté pacifique sur la période 1993 – 2003, les auteurs estiment que « le revenu moyen des Burundais aurait été le double de ce qu’il était en 2003, ce qui aurait assuré à la population une meilleure éducation, une meilleure santé, des logements améliorés, bref, des progrès dans plusieurs indicateurs de bien-être ».
Une dizaine d’années plus tard, en 2015, le Burundi a connu un nouveau conflit. « Ce dernier a réduit la croissance du PIB de 8,9 points de pourcentage cette année par rapport à son scénario contrefactuel », ajoutent-ils.
Mais « même si la guerre n’est pas la seule cause d’appauvrissement », reconnaît l’étude, « les coûts estimés soulignent l’importance d’éviter les conflits, qui sont des sources majeures de fragilité ».
Par ailleurs, l’étude indique en passant que « l’aide publique au développement reçue entre 2003 et 2014, qui totalise un peu plus de 5 milliards de $, représente seulement la moitié du coût estimé de la guerre ».
Au vu de tous ces résultats, les auteurs notent qu’« il est clair que le pays doit faire plus d’efforts pour renforcer la paix et revitaliser son économie grâce aux avantages d’une paix durable. » Ainsi interpellent-ils : « Comme il semble que le Burundi n’ait pas coupé les liens avec son histoire de conflits, nous espérons que cette étude attirera l’attention des décideurs sur l’importance de la consolidation de la paix ».
Et au passage de citer un passage du célèbre discours de Nelson Mandela lors de sa visite au Burundi, en 2003 : « Le pays a suffisamment saigné. Lui et son peuple méritent maintenant une paix durable. »