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Burundi : les eaux thermales, une opportunité non exploitée

Eaux thermales de Muyange dans la commune et province de Bururi

Les recettes générées par l’eau thermale de Mugara en province de Rumonge s’élèvent à 154 millions de Fbu seulement entre 2019 et 2023. Elles pourraient atteindre 112 millions pour la période 2024-2025. Pourtant, le Burundi possède plus d’une vingtaine de sources thermales inexploitées. Un véritable levier pour le développement économique durable à travers l’écotourisme largement négligé…

Du 20 au 21 novembre 2024, l’Agence Visa Travel And Tours, en partenariat avec le Ministère en charge du tourisme, organise une visite de familiarisation sur plusieurs sites touristiques du pays. Deux équipes, accompagnées de journalistes, explorent respectivement le nord et le sud du Burundi à la découverte des atouts de ce « pays des mille collines ».

Dans une atmosphère enthousiaste, l’équipe se dirigeant vers le sud du pays est impatiente de découvrir les eaux thermales, réputées pour leurs vertus thérapeutiques et relaxantes. Nombreux sont ceux qui souhaitent profiter des bienfaits de ces sources naturelles.

À 14h passées, après un trajet sous une forte pluie, notre véhicule de marque Coaster progresse péniblement sur une route boueuse. Nous arrivons enfin à la rivière Nyakibingo, où l’on aperçoit, de l’autre côté, les sources thermales de Muhweza, dans la commune de Rutovu, province de Bururi. Bien que la pluie ait cessé, la rivière est débordée, ce qui rend l’accès au site difficile, surtout en l’absence d’un pont. À notre arrivée, aucun visiteur ne semble présent sur les lieux.

Le site de Muhweza, bien qu’il dispose de bassins séparés pour hommes et femmes, est encore rudimentaire : il manque d’infrastructures, de panneaux indicatifs et de guides touristiques. Nous rebroussons donc chemin sans avoir pu profiter de ces eaux bienfaisantes.

Nous poursuivons notre route vers les eaux thermales de Muyange, en commune de Bururi. Le chemin, marqué par plusieurs ponts en bois ou en planches, est glissant et dangereux.

Accès difficile

À quelques centaines de mètres du site, certains membres de l’équipe, effrayés par l’état de la route, choisissent de descendre du véhicule pour continuer à pied, tandis que d’autres bravent la peur et restent dans le véhicule. Le conducteur parvient à avancer tant bien que mal.

Arrivés sur place, nous constatons des personnes, principalement des hommes et une femme, prennent des bains thermaux. L’endroit est doté de vestiaires, mais il manque d’infrastructures essentielles telles que des restaurants, des hôtels, et même d’électricité. Les bassins sont partagés entre hommes, femmes et enfants. Bien que cette source thermale soit connue, elle reste peu fréquentée, malgré sa proximité avec des attractions touristiques majeures comme la chute de la rivière Siguvyaye.

En revanche, le site de Mugara, situé dans la commune de Rumonge, bien que partageant un bassin commun, est mieux aménagé : il dispose d’un restaurant et de quelques chambres d’hébergement, même si celles-ci restent insuffisantes. Cependant, tous ces sites souffrent d’un même problème : l’accès difficile, dû à des routes impraticables.

La promesse d’infrastructures routières

Interrogé, Félix Niyongabo, administrateur de la commune de Bururi, annonce un projet de construction de routes solides menant aux principaux sites touristiques de la région : « Le projet PRODER a accepté de nous aider à construire des routes, et celle menant au site de Muyange est une priorité. Ce projet, qui s’étendra sur sept ans, permettra de finaliser cette route. » Des hôtels et restaurants seront également construits pour dynamiser l’économie locale, ajoute-t-il.

Pour sa part, Révérien Ndugi, directeur général du transport et représentant du Ministère du Tourisme, appelle les autorités locales à améliorer l’accès aux sites touristiques à travers notamment des travaux communautaires, en attendant de trouver des partenaires pour la construction d’infrastructures de qualité.

Le rôle des eaux thermales dans le développement économique

Un atelier de réflexion sur la promotion des eaux thermales à l’hôtel Source du Nil

De retour à Bujumbura, un atelier de réflexion autour de la promotion des eaux thermales a été organisé, ce 22 novembre 2024. L’écotourisme joue un rôle crucial dans l’économie de nombreux pays, a-t-on constaté. Cependant, le Burundi reste à la traîne dans ce domaine, générant des recettes touristiques modestes.

Des comparatifs sur les recettes issues de l’écotourisme en 2020 présentés par Jacqueline Nkeshimana, consultante en économie de l’environnement et du tourisme, sont sans appel : le Burundi a généré 6 millions de dollars, tandis que le Rwanda a reçu 300 millions de dollars, l’Ouganda 800 millions de dollars, le Kenya un milliard, et la Tanzanie 1,8 milliard de dollars.

Elle a souligné que les recettes générées par les eaux thermales de Mugara sont significatives : « De 2019 à 2023, l’eau thermale de Mugara a rapporté environ 154 millions de Fbu, avec des projections de 112 millions de Fbu pour la période 2024-2025 ».

Selon Mme Nkeshimana, si le Burundi parvient à aménager ses sources thermales, en particulier celles qui restent inexploitées, il pourrait rapidement améliorer son économie et offrir des bénéfices tangibles aux populations locales, en créant des emplois et en finançant des infrastructures comme des hôpitaux, des écoles et des hôtels.

Les recommandations issues de l’atelier de réflexion sur la promotion des eaux thermales du Burundi soulignent plusieurs points cruciaux pour exploiter pleinement le potentiel de l’écotourisme. Parmi celles-ci, il est proposé de renforcer les capacités des acteurs du tourisme, améliorer l’accueil des visiteurs, moderniser les infrastructures, et accroître la participation des communautés locales dans le développement des sites touristiques. Il est également suggéré de mettre en place un cadre institutionnel autonome pour la gestion de ces ressources naturelles et d’encourager la digitalisation des recettes touristiques.

Un appel à investir dans le secteur touristique

Silas Nzeyimana, Directeur Général de Visa Travel And Tours

Quant à Silas Nzeyimana, Directeur Général de Visa Travel And Tours, il a souligné la nécessité d’attirer les investisseurs dans le secteur touristique au Burundi, un secteur encore sous-exploité mais riche en potentiel économique. Le tourisme au Burundi, notamment l’écotourisme lié aux eaux thermales, pourrait transformer l’économie locale, créer des emplois et améliorer les conditions de vie des populations riveraines.

Le potentiel touristique du Burundi, avec ses eaux thermales, ses paysages magnifiques et sa biodiversité unique, reste une ressource à développer. Les autorités et les acteurs du secteur ont désormais un rôle clé à jouer pour valoriser ce patrimoine naturel et permettre au pays de tirer pleinement profit des avantages économiques de l’écotourisme, conclut Silas Nzeyimana.

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