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La douloureuse 8ème heure de cours, dans le post-fondamental

Au cours de l’année scolaire 2016-2017, le système éducatif burundais a vu un changement lié au réaménagement du volume horaire dans les écoles secondaires, particulièrement celles du cycle post-fondamental. La nouvelle grille comporte certaines imperfections, selon des acteurs de l’éducation

Tantôt sous un soleil accablant, tantôt sous la pluie, Jimbere a rendu visite à certaines écoles de la mairie de Bujumbura, afin de s’informer sur la rentabilité de la huitième heure supplémentaire ordonnée au cycle post-fondamental par le Ministère en charge de l’Éducation. Qui avait motivé la mesure par le souci de « permettre la finition des programmes conçus pour le cycle ». Ainsi, au lieu de rentrer à 13h, les établissements scolaires travaillent jusqu’à 14h…

Pour quels rendements?

« Les rendements de la 8ème heure ne sont pas appréciables. Il s’observe une faible performance cognitive et intellectuelle due à la fatigue cérébrale qui s’accumule le long de la journée», indique Eric Nkeshimana, directeur du Lycée de la Convivialité de Kanyosha. «Cette faible performance, poursuit-il, est accentuée par une impossible résistance physique due au fait que la plupart des élèves viennent à l’école sans avoir pris de petit déjeuner à cause de la précarité économique de leurs familles».

Se référant à la théorie des rythmes circadiens – cycles biologiques quotidiens -, d’après lesquels le corps humains est productif à certains moments de la journée, certaines établissements comme le Petit Séminaire de Kanyosha ont adopté des mécanismes pour palier à cette improductivité: «Pour rentabiliser cette séance, l’établissement a pris le samedi comme jour de travail. Ainsi, nous enseignons 7 heures chaque jour, et les matières de la 8ème heure sont dispensées le samedi», explique Béatrice Irutingabo, préfète des études.

Quel impact sur l’assimilation des matières ?

L’ambiance qui règne dans les classes pendant cette heure n’est pas encourageante : les mines sont défaites. Un professeur du Lycée Notre Dame de Rohero esquisse la réalité : « Enseigner à cette séance est plus une question de formalité que de de rentabilité. L’unique façon de profiter de la séance est soit faire prendre les notes, soit proposer des exercices d’application aux élèves. Introduire une nouvelle leçon s’est avéré pratiquement impossible».

Kaze Kelly Kathia, est finaliste dans la section scientifique au Lycée de la Convivialité : « Nous arrivons à la maison tardivement, et fatigués. Nous nous retrouvons sans énergie ni le temps de revoir toutes les matières du lendemain». Ainsi, « lors des révisions, nous n’avons d’autre choix que de tout mémoriser alors que les sciences exigent un travail d’ensemble ».

Ainsi, le besoin d’augmenter le volume horaire dans les écoles secondaires post-fondamental constitue une bonne initiative de la part ses initiateurs, mais sa mise en exécution pourrait être une entrave au développement intellectuel des élèves.

Les différents intervenants dans l’éducation semblent converger sur la nécessité d’une révision de l’ordonnance ministérielle et propose que ces heures supplémentaires soient reléguées au 6ème jour de la semaine et que celui-ci soit considéré comme un jour ouvrable au secondaire…

D’où viennent les 8h de travail par jour ? «8h de travail, 8h de recréation, 8h de sommeil»… Voilà le slogan de l’entrepreneur et penseur Robert Owen en 1817, lors de la campagne pour l’équilibre d’une journée de travail, qui à l’époque pouvait aller jusqu’à 15h de travail. Le slogan fut repris lors de la 1ère internationale ouvrière de 1864, à Londres. Aujourd’hui, après 200 ans, bon nombre de pays constatent que ce principe est inadapté.
Et la science leur donne raison. David Disalvo dans « Why Working More Than 8hrs A Day Can Kill you » (2012) explique que « travailler 8 heures ou plus assis au bureau est aussi mauvais pour la santé que fumer du tabac, avec un risque de 40 pourcent plus élevé de développer les maladies liées au stress ». The Independent (2016) note que « le temps de travail idéal quotidien se situerait plutôt autour de 6h et plutôt concentré le matin ».

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