C’est l’histoire de 27 enfants de Kayanza, pour la plupart en situation de rue, regroupés en février 2020 par un jeune samaritain connu sous le nom de Lil Man, autour d’une passion commune : La danse. Alors que leurs vidéos de chorégraphie deviennent virales sur internet, Lil Man n’a qu’un rêve : remettre ces enfants sur le banc de l’école. Pari réussi avec la récente rentrée scolaire. Récit
Chaque enfant a droit aux études, comme le stipule la Convention universelle des Droits de l’Enfant dans son article 28. C’est aussi le credo d’Emmanuel Bizimana connu à Kayanza sous le sobriquet de Lil Man, un jeune de 29 ans qui eut la bonne idée de rassembler les enfants de la rue au sein du groupe de danse Kayanza Kids en février 2021.
Lors de cette rentrée scolaire 2021-2022, 21 des 27 enfants de Kayanza Kids ont repris l’école, 4 qui avaient déjà dépassé l’âge ont été inscrits dans les écoles de métier alors que 2 autres n’ont pas eu la chance de reprendre les études faute des documents d’Etat-Civil requis pour l’inscription de tout enfant sur le banc de l’école.
Le chanteur B-Face également manager du groupe au même titre que Lil Man indique qu’ils ont fait de leur mieux et ont pu mettre certains d’entre-deux à l’école mais malheureusement pas tous. Au-delà du matériel scolaire élémentaire composé de cahiers, stylos, uniformes…, renchérit-il, il faut autre chose pour les motiver comme les habits à porter en revenant de l’école, la nourriture…, afin qu’ils ne regagnent pas la rue et ne retombent dans la délinquance.
Le rappeur auteur du sulfureux titre « insolites », soutenu par Lil Man, martèle qu’il en faut vraiment plus pour convaincre un ancien enfant de la rue de rester à l’école : « Imagine que des fois, ces enfants tombent malades et il revient à nous de les faire soigner alors que nous ne disposons pas d’assez de moyens pour le faire. Ce n’est pas une sinécure. »
Le début du rêve
C’est en 2019 que l’idée d’aider ces jeunes lui vient en tête, raconte Lil Man Magneto, le jeune passionné de musique de Kayanza. A l’époque, il remarque la prolifération des enfants en situation de la rue dans sa ville et commence à les rassembler pour les nourrir occasionnellement : « Ils étaient devenus un sérieux problème sur la voie publique, commettant des vols et d’autres actes de délinquance. »
Condamnés et jamais aidés, c’est leur triste sort va interpeller Lil Man pour les rassembler et les aider dans la mesure du possible à se tirer de leur mauvaise fortune. Il va alors essayer de les mettre ensemble autour d’une passion commune « Tous les enfants aiment la danse, utilisons la danse alors pour changer leur avenir mis en péril par les conditions malheureuses dans lesquelles ils vivent du jour au jour », se dit le jeune homme.
En effet, explique-t-il, il avait constaté que lors des rencontres qu’il organisait les dimanches, les enfants se mettaient aisément à danser en rivalisant dans les pas quand il jouait de la musique.
Depuis, le récit des enfants malheureux a changé en celui des enfants dont tous les signaux d’avenir sont au vert. Depuis qu’ils vivent chez lui, ils ne volent plus, ne fument plus et ne se droguent plus à l’alcool et d’autres stupéfiants.
De la rue à la fierté de Kayanza
Celui qui persiste dans ce sens, souligne Lil Man, n’est plus autorisé à faire partie des Kayanza Kids : « Ils viennent, chaque jour chez moi faire les répétitions. Et personne d’entre eux n’est autorisé à s’absenter. De cette façon, j’arrive à rester au courant de tout ce qui passe dans leurs vies. » Autant signaler qu’au-delà de la danse, les conseils de bonne conduite dans la vie ne manquent jamais au rendez-vous.
Et d’ajouter : « Je vois en eux un potentiel illimité, le seul ombre au tableau étant que la danse n’est pas si valorisée au Burundi. Mais ce qui nous réconforte c’est que nous gagnons le pari de les tirer de la rue, et les remettre à l’école. Comme ça, nous sommes sûrs qu’au moins leur avenir n’est pas hypothéqué. »
Un état de fait qui réjouit les habitants de Kayanza. Jeanne Niyonkuru, tailleuse au marché de Kayanza affirme que depuis la création du groupe Kayanza Kids, le phénomène des enfants de la rue a sensiblement baissé dans cette ville meme s’il n’a pas encore été enrayé.
Philibert Kana, propriétaire d’un magasin au marché de Kayanza, lui ne trouve pas de mots pour exprimer sa joie par rapport à l’initiative de Lil Man :« Partis de la rue, ils sont devenus la fierté de Kayanza. Leurs vidéos de chorégraphie sont aujourd’hui partagées partout et visionnées par des milliers de gens de par le monde. » On ne peut pas rêver mieux pour l’avenir des enfants en situation de rue…