Dans la soirée de ce mercredi 12 mai, les habitants de plusieurs localités de Gatumba ont passé la plus mauvaise des nuits. Les eaux de la rivière Rusizi les ont envahis, aggravant la situation catastrophique engendrée par le lac Tanganyika.
Le dicton rundi «uwarushe ntaruhuka», (point de repos pour les malheureux), s’applique farouchement aux résidents de Gatumba. Cela faisait autour de 2 mois que des SOS sont lancés pour sauver la population et les infrastructures de Kinyinya1 et d’autres localités de Gatumba, devastés par la montée du lac Tanganyika. La situation n’étant pas encore apaisée, c’est la rivière Rusizi qui vient empirer le malheur des habitants.
«C’est tard la nuit de ce mercredi que nous avons été submergés par des eaux de la rivière, beaucoup d’eaux. Ceux qui s’étaient déjà endormis se sont retrouvés baignant dedans. Nous avons assisté impuissamment au phénomène jusqu’au lever du jour», raconte avec amertume une dame, vivant à Kinyinya II.
Dans cette localité, le désespoir se lit sur les visages. Ce qui se passe actuellement est une première au Burundi, explique un sexagénaire : « Ce sont les localités qui n’avaient pas encore étaient inondées qui sont submergées aujourd’hui. La Rusizi a débordé des deux côtés. Les eaux provenant de la RDC ont croisées avec celles du côté burundais. La population a été envahie de toute part. »
Suite à ce désastre, les habitants de Gatumba ne savent plus à quel saint se vouer. «Je commence à perdre tout espoir. Si ce n’est pas le Tanganyika qui déborde aujourd’hui, c’est la Rusizi qui prend le relais. J’ai peur que Gatumba ne soit plus vivable comme avant», analyse, dépiteux notre source.
Une situation pas prête de s’estomper
Dans une publication de l’ONG OCHA parue le 20 avril 2021, faisant les détours des inondations des zones riveraines du lac Tanganyika, des dégâts sévères sont déjà enregistrés dans la zone de Gatumba, le centre urbain de la Province de Rumonge (Kanyenkoko), les communes de Bugarama et Muhuta. La commune de Nyanza-Lac plus au sud est aussi touchée au niveau de 6 collines.
Selon les prévisions météorologiques, les précipitations vont continuer avec le mois de mai. Avec une nappe phréatique saturée et le coefficient de ruissellement réduit, les crues vont continuer à se déverser. Ainsi, à part Gatumba, qui enregistre plus 5 000 ménages inondés, dans la province de Rumonge, les communes Bugarama et Muhuta, ainsi que la ville de Rumonge (quartier de Kanyenkoko) ont enregistré les dégâts considérables.
A Bugarama, plus de 750 ménages sont affectés dont plus de 569 ménages déplacés et hébergés temporairement dans les familles d’accueil.
A Kanyenkoko, plus de 234 ménages sont en déplacement, dont 32 hébergés dans un hangar communément dénommé Cemina, tandis qu’à Muhuta, plus de 462 ménages affectés dont 241 ménages en déplacement.
Plus au sud, dans la commune de Nyanza-Lac, de la province de Makamba, les collines de Gasaba, Bukeye,Mugerama, Mvugo, Rubindi et Mukungu, totalisent 762 ménages déplacés.
Ces statistiques rejoignent celles des zones urbaines comme Kibenga, Gisyo, Kabondo, avec plus de 2 500 personnes affectées dont 562 déplacées. Ainsi, ces dégâts catastrophiques pourraient à coup sûr donner raison à Albert Mbonerane, le défenseur de l’environnement, qui s’insurgeait contre la prolifération des infrastructures le long des lacs et rivières.