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Autonomisation des femmes

Quand les femmes comprennent mieux l’autonomie

Concilier vie conjugale, obligations civiques et entreprenariat est possible. Voici l’histoire de celles qui ont décidé de partir sur le champ de bataille afin de lutter pour la démocratie malgré un entourage décourageant ou qui se sont battues pour l’autonomie. Une inspiration pour celles qui n’osent pas encore défier les barrières que la société impose.

Dans le cadre du projet synergie pour la paix, des séances de mentorat sont réalisées dans tout le pays, à l’endroit des femmes leaders des partis politiques, et des associations et coopératives et organisations comme BLTP, CENAP et Jimbere, le tout dans un seul consortium.

Les sujets débattus abordés vont de la communication non violente au leadership en passant par la cohabitation pacifique, l’entrepreneuriat et la participation dans des activités socio-politiques susceptibles de promouvoir le développement inclusif du pays.

Le mentorat est donc une nécessité pour que celles qui ont déjà réussi dans ces domaines éclairent la lanterne d’autres femmes dans l’espoir de leur permettre d’oser postuler à des postes de prises de décision, pour un avenir burundais où la parité sera respectée, et où hommes et femmes apporteront tous leur pierre à l’édifice du progrès national.

Si invincible voulait dire une personne

C’est dans la commune Rugombo que la séance se passe. Une femme vigoureuse, rapide et souriante nous accueille. Elle se prénomme Jacqueline Nyavyinshi. C’est elle qui nous présente au groupe de femmes leaders qui l’ont choisi comme mentor. Nous ne tarderons pas à savoir qu’elle le méritait vraiment de par son témoignage inspirant. Aînée d’une fratrie de neuf enfants, elle s’est démarque dans son enfance par un esprit serviteur. A la mort de leurs parents, elle est désignée par ses frères et sœurs comme héritière. Elle a fait les sciences infirmières, et une fois dans la vie active, elle a remarqué que son salaire mensuel et celui de son mari ne suffisait pas pour joindre les deux bouts du mois. « Je voulais à tout prix être à la hauteur de cette situation. Je ne voulais pas du tout échouer » souligne-t-elle. C’est alors qu’elle décide de cultiver pour nourrir la famille. Parallèlement, elle élève des bovins, et gagne du fumier pour ses champs. Aujourd’hui, elle possède quatre hectares pleins de plantations d’arbres fruitiers, et diverses cultures qu’elle vend à chaque récolte.

Jacqueline Nyavyinshi, mentor des femmes leaders de Rugombo

Pour autant, elle n’abandonne pas totalement son métier d’Infirmière. Elle a toujours eu de la peine pour les enfants mal nourris. « C’est une grande fierté pour moi de donner du travail à plus de 300 personnes dans mes champs. C’est pour moi une garantie que leur familles ne sont pas mal nourris.» raconte-elle.

Pour y arriver, Mme Nyavyinshi se réveille a quatre heures du matin, fait une petite prière, puis se rend à six kilomètres ou se trouvent ses champs. Elle supervise les travaux, et va à l’hôpital pour soigner les malades. A la fin de la journée de travail, elle socialise avec l’entourage et dans ses weekends, elle participe à des meetings politiques, et des travaux de construction de son église adventiste. Pour elle, une bonne volonté, une détermination visionnaire, et une organisation soignée de sa journée sont à la base de sa réussite.

Enthousiastes, les participantes ayant entendu son témoignage n’en croient pas leurs oreilles. Elles admirent son courage, et voudraient faire comme elle. C’est le cas de Désidérata Bucedusenge, une enseignante qui n’a pas manqué d’exprimer sa gratitude et sa volonté de suivre l’exemple de Mme Nyavyinshi, en espérant qu’elle améliorera sa vie familiale et contribuera dans le développement national.

Rubin Tubirabe, conseiller du gouverneur de la province Cibitoke, chargé du développement trouve que c’est louable de voir que la femme d’aujourd’hui ose proposer son opinion, et arrive à convaincre une communauté plutôt masculine. Pour lui, de la même manière que les femmes assurent la complémentarité au sein de la famille, elles devraient participer dans l’élaboration des plans nationaux pour le développement. « Ce sont de bonnes conseillères, et éducatrices de futurs leaders, et elles sont plus persévérantes » selon toujours lui.

Quand une native de Ku gasaka lutte pour la démocratie

Toute souriante, et bavarde, personne ne saurait deviner que derrière ce sourire se cache une femme forte prête à tout défier pour son pays, et qui porte fièrement sa couronne de mère éducatrice. Elle s’appelle Gloriose Ahishakiye, et elle est âgée de 51 ans. Dans sa famille d’origine, il n’y a jamais eu de travaux destinés uniquement aux filles, ou aux garçons. De par cette éducation de base, elle a donc grandi avec une estime de soi assez suffisante pour lui permettre d’être en compétition avec n’importe qui, sans avoir honte de sa féminité, comme c’est le cas pour plusieurs burundaises. Comme elle le raconte, il lui arrivait de résoudre un problème auquel tous les camarades de classe ont échoué. Elle se sentait toujours forte et capable.

Pendant les crises que le Burundi a connues, elle était adolescente. Elle a décidé de partir sur le champ de bataille, pour aider ses confrères à lutter pour la démocratie nationale. « A l’instar de mes frères d’armes, je combattais sans me soucier de blessures ni de la fatigue. Je faisais même parfois des gardes de nuit. Je soulevais des armoires lourdes comme les autres. Je ne voulais pas être qualifié selon mon sexe. Je voulais prouver que je suis capable de me battre comme eux, faire la différence et leur apporter une plus-value », confie-t-elle. Le moment venu, elle s’est mariée à un civil. Ils ont eu deux enfants ensemble avant qu’elle retourne sur le champ de bataille. Une fois revenu pour de bon, elle a eu d’autres enfants avec son mari. Comme celui-ci trouvait le pain familial très loin de la famille, Mme Ahishakiye avait décidée de prendre soin des enfants sans trop déranger son mari. Quand il revenait, il était fier de cette femme courageuse et autonome qu’était Ahishakiye. Ensuite, elle a grimpée les échelons comme elle le relate, et est devenue sénatrice. Son succès ne lui a pas fait oublier son statut de femme mariée. Elle a toujours obéi à son mari, et a toujours veillée à offrir une bonne éducation à ses enfants. Aujourd’hui à la retraite, elle s’occupe des coopératives et associations féminines afin de sensibiliser les femmes à participer dans la construction de leur pays.

« Son témoignage me fortifie. Savoir que parmi ceux qui ont lutté pour notre démocratie il y a des femmes, m’encourage à postuler aussi pour représenter ma communauté », raconte Zainabu Niyonzima, participante. Pour Ida Manirambona, également participante, ça change tout dans sa tête. Désormais, elle éduquera différemment ses enfants à l’exemple des parents de Gloriose, puisque ses enfants sont des leaders en puissance. Quant à Kitonzi Sandrine, Conseiller socio-culturel du gouverneur de Ngozi, le mentorat est comme une lanterne qui éclaire les pas de femmes leaders, car elles suivent l’exemple de celles qui y sont parvenus, et par conséquent, elles apportent leur contribution dans la construction d’un Burundi prospère.

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