La tendance des grossesses précoces en milieu scolaire est à la baisse en province Cibitoke. Et ce grâce aux efforts de plusieurs acteurs dont les structures Tantes et Pères des écoles. Différentes autorités appellent à la poursuite de cette dynamique pour une éradication totale…
1268 cas de grossesses précoces ont été enregistrés au cours de l’année scolaire 2018-2019 et 747 pour 2023-2024 selon le ministère de l’Education. Malgré cette baisse, cette situation perdure avec les conséquences qui en découlent. « C’est fréquent dans nos communautés. Une année ne peut pas s’écouler sans qu’il y ait des grossesses précoces », lâche F. B., une mère rencontrée en commune Rugombo. »
Une situation aux conséquences désastreuses, pointe sans ambages A.K, une cultivatrice de la même commune : « Parfois ce sont les enseignants qui engrossent leurs élèves ou ce sont leurs camarades, les chauffeurs, …Les conséquences sont subies par les parents car toutes ces catégories n’interviennent pas lorsqu’il faut élever l’enfant ».
Du coup, fait-elle remarquer, les parents sont découragés par ces enfants et perdent espoir pour celles qui restent à la maison : « Les familles sont humiliées au sein de la communauté et les filles quittent pour la plupart l’école. Même celles qui reprennent l’école, elles se retrouvent dans une impasse. »
Une baisse significative
Toutefois, comme constaté sur place, la tendance s’inverse de plus en plus et les cas de ces grossesses sont à la baisse. A fin du premier trimestre 2024-2025, le rapport fait état de 12 grossesses non désirées enregistrées, indique Joseph Nyandwi, Directeur Provincial de l’Education à Cibitoke. Bien plus, les effectifs les plus élevés ne sont observés qu’en 4ème cycle là où ils étaient presque généralisés dans les années passées.

Selon toujours Joseph Nyandwi, ces chiffres sont inférieurs à ceux de l’année passée où les rapports font état de 38 cas de grossesses, une diminution qu’il espère, sera maintenue : « Nous espérons qu’à la fin de l’année, les effectifs ne seront pas très élevés. »
Et d’appeler la structure faite des tantes et pères des écoles à poursuivre sa tâche et à être plus réactive : « Ils doivent poursuivre la sensibilisation à travers des réunions tenues une fois le mois car elles permettent de sensibiliser les élèves sur les conséquences de ces grossesses sans oublier qu’il s’agit d’un cadre d’échanges qui permet aux élèves de présenter leurs doléances auprès de tantes et pères de l’écoles. »
Les tantes et pères d’écoles salués
Le rôle des tantes et des pères de l’école est également salué par beaucoup de responsables des écoles à l’instar d’Emmanuel Ndayiragije, Maître responsable de l’ECOFO Bihahe 1. Il fait savoir que sur cet établissement, ils n’ont pas encore enregistré des cas de filles enceintes étant encore sur le banc de l’école. Le mérite, confie-t-il, revient aux réunions tenues dans des clubs avec les tantes et les pères : « Ils organisent une séance par mois pour rassembler les élèves en vue de les sensibiliser sur la lutte contre des grossesses en milieu scolaire. »
Même son de cloche chez Léonce Nzikwinkunda, responsable de l’ECOFO Rugombo 2, qui souligne que ladite école n’a enregistré aucune fille avec une grossesse précoce : « Il y a eu la sensibilisation des tantes et pères de l’école qui informaient les élèves concernant la planification des naissances, la protection des grossesses non désirées, ce qui permis à ce qu’il n’y ait pas de grossesses. »
Propos corroborés par Anastasie Nindorera, tante de l’ECOFO Rugombo 2 : « Cette école enregistrait au moins 5 cas de grossesse précoce chaque scolaire. L’école a décidé d’organiser des réunions avec les parents pour trouver des solutions car l’enfant nécessite une éducation de la part de la famille aussi. Cela a permis d’inverser la tendance. »
Un travail stratégique
Cette collaboration entre parents, éducateurs et élèves, nécessite un travail d’équipe et la mise sur pied d’une méthodologie de travail bien pensée voire de la stratégie, soutient Anastasie Nindorera : « Des fois je discute avec eux ensembles, les filles avec les garçons. Mais aussi je mets des fois les filles seules pour qu’elles soient ouvertes avec moi car elles ont des problèmes spécifiques comme les règles, le manque de moyens pour les serviettes hygiéniques. »
Et pour cause, martèle-t-elle, les prédateurs exploitent ces faiblesses, et c’est pour cela que ces structures utilisent différentes astuces pour approcher les élèves filles afin de les informer sur les IST, les grossesses non désirées et les conséquences.
Pour Léonce Nzikwinkunda, cette approche a également vu la participation des autres organisations qui aident dans le secteur de l’éducation dans cette commune : « Ils contribuent dans la formation et l’appui aux serviettes de l’hygiènes pour les filles et cela a aidé dans la production d’information sur la sexualité en général. »
Une production de connaissances également saluée
Quant aux enseignements que ces proches de l’école donnent, ils sont salués par Joseph Nyandwi, DPE Cibitoke car ils insistent sur les différentes conséquences subies par les filles en cas de grossesses précoces comme le décès, l’abandon scolaire, l’humiliation dans la communauté; l’expulsion des garçons de l’école, etc.
Au-delà de ces approches, l’autre travail non négligeable est fait par les centres de sante ami des jeunes : « Nous travaillons en étroite collaboration avec le secteur de la santé, l’administration et ces jeunes collaborent avec un personnel chargé des accueils en cas de conseils ou de conscientisation en rapport avec la sante sexuelle. »
Zéro grossesse à l’école comme priorité
Le Directeur Provincial appelle tout un chacun à se rappeler du thème zéro grossesse à l’école : « Lorsqu’ils tiennent des réunions, ils doivent essayer de prodiguer des conseils à ces jeunes à continuer les études au post-fondamental et à l’université ou dans les centres d’enseignements métiers car nous en avons 14 dans notre Province. »
Aux parents d’élèves, M. Nyandwi demande d’appuyer les conseils des éducateurs, suivre les réunions de l’école pour savoir ce qui se fait autour de l’éducation de leurs enfants : « Les administratifs à la base doivent également contribuer à l’éducation des enfants et à cette lutte car ces grossesses se contractent en dehors des écoles, dans des endroits souvent sous leur responsabilité. »
Et d’encourager les élèves de rester dignes et ne pas céder aux avances de ceux qui veulent les pousser dans des pratiques sexuelles qui risquent d’hypothéquer leur avenir : « Ceux qui avancent le chômage, devraient se tourner vers l’entrepreneuriat et créer leurs propres emplois. »
