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Editorial

Tous responsables!

Arlette Mpundu est la Coordinatrice des projets au sein de Jimbere portant sur la santé et les droits sexuels de la reproduction

« Igiti kigororwa kikiri gito », dit la sagesse rundi. Pour que le tronc d’un arbre croisse droit, il faut s’y prendre dès ses premiers jours. Cet adage, qui s’applique au quotidien des enfants à travers le monde, touche des aspects de l’éducation aussi formels que le système éducatif ou la socialisation familiale.

Au Burundi, avec l’ambiante culture conservatrice, difficile d’étendre cette application à des sujets aussi sensibles que la vie sexuelle et reproductive, surtout quand la thématique doit être évoquée par un adulte face à des jeunes… Pour masquer le malaise d’en parler, il y a ceux qui préfèrent confier les adolescentes aux bribes d’information que livrent les cercles d’amis, Internet ou les lectures prohibées, en attendant que «le temps arrange les choses». Ou alors inventent de fausses excuses : ces jeunes, ces enfants, sont-ils prêts à comprendre des détails qui ont trait aux mystérieux « amabanga y’abubatse« , littéralement « les secrets de ceux qui sont mariés » ? Certains vont même plus loin, en liant l’acquisition des connaissances liées à la sexualité à « un appel à la débauche ».

Pourtant, en fin de compte, ces enfants d’aujourd’hui sont les parents de demain. Ils devraient donc accéder à une éducation graduée sur la sexualité et ses corollaires, non pas pour les pousser à la débauche, mais pour les équiper avec l’information qu’il faut. Ces chiffres, selon l’Enquête Démographique et de Santé (EDS) 2016-2018, réalisée par l’Institut de Statistiques et d’Études Économiques du Burundi (ISTEEBU), nous orientent vers une évidente réalité: 8% des adolescentes de 15-19 ans ont déjà commencé leur vie féconde ; près d’une fille sur quatre (23%) et un garçon sur cinq (19%) ont déjà eu des rapports sexuels avant d’atteindre les 18 ans ; 13% des jeunes dont 1,3% chez les 15-19 ans et 11,7% chez les 20-24 ans utilisent les méthodes contraceptives modernes.

Un fait têtu : quoi qu’on dise ou qu’on fasse, des jeunes vivent déjà leur sexualité. Du coup, l’école, les médias, la société, les pouvoirs publics doivent trouver une meilleure approche, méthodologique, afin d’endiguer certaines pratiques à risques.

La prolifération des réseaux sociaux, très prisés par les adolescents et les jeunes, crée des aires de socialisation en matière de sexualité totalement affranchies du regard parental, pourtant crucial. C’est ici que le dialogue entre parents et enfants s’impose, pas seulement en famille, mais avec les éducateurs, les religieux et autres relais communautaires. Les enfants, ces futurs adultes, seront plus responsables du moment où ils seront informés.
Soyons donc tous responsables, chacun à son niveau. De l’hygiène menstruelle à l’état des lieux des infrastructures en milieu scolaire, de l’application sur la loi sur les VSBG à l’apport de l’intégration des leçons de la SDSR dans les programmes scolaires aux projections futures des jeunes filles après l’école, investissons-nous pour le bien des jeunes.

Le développement durable ne peut être atteint sans investissement dans la santé. C’est tout le sens de l’engagement de l’ensemble des Nations à travers les 17 Objectifs de Développement Durable (ODD), dont le 3ème insiste sur la santé et le bien-être des citoyens de la planète.

Il est à rappeler que le Plan National de Développement 2018-2027 du Burundi, vise comme taille idéale de la famille burundaise, celle avec trois enfants. Une telle projection, cruciale pour prévenir l’explosion des conflits liés au foncier, est vouée à l’échec si chacun de nous n’apporte pas sa contribution dans l’accompagnement des jeunes et adolescents d’aujourd’hui, en les conscientisant sur les bonnes pratiques de leur santé sexuelle en vue d’une reproduction responsable pour demain.

Le Magazine Jimbere, «écho de ces jeunes», a parcouru cinq provinces, Bubanza, Kayanza, Ngozi, Gitega, Rumonge, à la collecte des témoignages, du vécu au quotidien des jeunes quant à leur santé sexuelle, autour de différents défis qui sont les leurs à l’école et à la maison. Ils nous ont parlé, nous avons écouté, nous avons écrit. Lisez !

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