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‎Le respect du choix du peuple, un rempart contre les dissensions sociales

Le non-respect du choix du peuple est une trahison.

Le scrutin, censé traduire la volonté populaire, laisse souvent un goût amer. Nombreux sont ceux qui peinent à reconnaître leur choix dans les résultats proclamés. Ce sentiment d’injustice ravive les frustrations et met à mal la cohésion sociale.

Depuis plusieurs décennies, les Burundais se sont habitués à choisir leurs dirigeants par la voie des urnes. Pour certains habitants de la colline Rwamiko, dans la zone Buhororo de la commune Tangara (province Butanyerera), le vote populaire demeure le fondement même de la légitimité politique et la garantie que le pouvoir émane du peuple, pour le bien du peuple. « Lorsque nous allons voter, nous exprimons nos attentes et nos aspirations à travers le scrutin. Je vote pour que les élus travaillent à la paix et au développement de notre pays », confie Jacqueline*, habitante de la localité.

Plus encore, souligne Émile*, habitant de Rwamiko, le vote est l’occasion de désigner des personnes proches des réalités quotidiennes : « Pour moi, voter, c’est choisir un représentant du peuple à l’écoute des besoins de la population et capable d’y répondre. Je donne toujours ma voix à celui ou celle qui porte de bons projets pour notre pays ou pour notre colline. »

Néanmoins, déplore Sébastien*, habitant de Rwamiko, il arrive que la population ressente une profonde déception à l’annonce des résultats, surtout lorsque le candidat favori n’est pas déclaré vainqueur : « Cela peut provenir d’erreurs dans le dépouillement ou d’un grand nombre de bulletins nuls. Dans ces situations, certains esprits s’échauffent et refusent d’accepter le verdict des urnes. »

Source de tensions

Bien souvent, explique Éric*, habitant de Rwamiko, cette déception est difficile à digérer pour beaucoup. La population a le sentiment d’avoir été trahie : « Des murmures de colère et de mécontentement se font alors entendre, certains estimant que leur voix n’a pas été prise en compte, que leur candidat a été lésé ou que le scrutin a été truqué. »

‎Cette situation, poursuit Éric*, engendre la méfiance, la division, et la haine entre la population : « Parfois, certaines gens se retirent ou se replient. Ils ne participent plus aux réunions ou aux travaux communautaires. Cette désobéissance civique crée des groupes antagonistes qui se rejettent mutuellement, et qui s’apprêtent toujours à en découdre. La tension monte, et souvent, c’est la violence qui s’ensuit. »

Chartier Niyungeko, expert en résolution pacifique des conflits

Selon Chartier Niyungeko, expert en résolution pacifique des conflits, le droit de vote constitue un pilier fondamental de la citoyenneté. « Priver quelqu’un de son droit de vote, c’est lui dénier sa qualité de citoyen », souligne-t-il. Une telle privation, poursuit-il, contribue à instaurer un climat propice à la violence politique.

Pour l’expert, les nombreux cas de violences observés à travers le monde lors des scrutins trouvent souvent leur origine dans cette négation de la citoyenneté. « C’est pourquoi le respect du vote est essentiel, surtout dans un processus démocratique », insiste-t-il.

Refuser le choix du peuple, procédé à haut risque

‎Pour M. Chartier Niyungeko, le non-respect du choix du peuple traduit un manque de citoyenneté ou une faible compréhension du processus électoral. Il explique que voter revient à déléguer son pouvoir à un représentant : « Lorsque je suis élu à un poste, c’est vous, les électeurs, qui me mandatez pour vous servir. Refuser le choix du peuple, c’est donc nier ce droit de délégation. En d’autres termes, c’est affirmer que les citoyens n’ont pas le droit de choisir ceux qui les représentent. »

Toutefois, prévient M. Niyungeko, priver la population de son droit de choisir ou lui imposer une autorité non issue des urnes risque d’engendrer des tensions entre les citoyens et les institutions politiques. « Il arrive que des intérêts cachés se dissimulent derrière certaines candidatures à des postes de responsabilité politique ou administrative. Ce sont souvent ces intérêts qui expliquent la tendance à nier ou à refuser le choix du peuple », souligne-t-il.

Conditions propices à la violence

Par ailleurs, M. Niyungeko souligne que respecter le choix du peuple constitue un moyen efficace de prévenir les conflits sociopolitiques. « Plus le choix du peuple est respecté, plus on favorise un environnement socio-politique marqué par la cohésion, la collaboration et la tolérance entre les différents groupes », explique-t-il.

À l’inverse, insiste-t-il, imposer au peuple des représentants ou des dirigeants qu’il n’a pas choisis contribue à créer les conditions propices à des violences sociopolitiques.

Abondant dans le même sens, Emmanuel Nshimirimana, chef de zone de Ruhororo, rappelle l’importance du respect du vote citoyen. Il invite la population à porter toute contestation électorale auprès des instances compétentes, tout en évitant tout acte préjudiciable.

*nom d’emprunt

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