Dans le contexte post-conflit au Burundi comme ailleurs, certains gestes équivoques peuvent désarçonner des esprits tranquilles dans la communauté : les réunions tenues sous le manteau dans des cercles restreints suivant bien des affinités ne sont pas à rassurer tous les membres de la société…
« Tout ce que vous faites pour moi sans moi, vous le faites contre moi », cette citation populaire tantôt attribuée à Gandhi ou à Mandela trouve son sens partiel dans le ressentiment des habitants de la commune Nyamurenza, en province Ngozi, à l’égard de certains rassemblements revêtant un aspect exclusif qui se tiennent souvent dans la stricte intimité.
Goreth* (43 ans), habitant ce coin, n’y va pas de main morte : « C’est tellement inquiétant lorsque les gens se réunissent en catimini, sans aviser publiquement le mobile de leur séance. Le passé nous a montré que de telles attitudes n’augurent rien de bon », maugrée-t-elle.
La guerre civile de 1993, poursuit Goreth*, a été précédé par des agissements pour le moins suspects. Le repli identitaire marqué par des réunions clandestines a donné naissance à une méfiance entre citoyens, ayant conduit à des chicaneries et des hostilités plus désastreux, regrette cette dame.
Le malaise social s’installe…
Bien plus, pendant les dernières échéances électorales de 2020, certaines collines de la commune Nyamurenza ont payé le prix fort de ces gestes, témoignent les habitants. Certains membres des partis ne se sont pas gênés à tenir des rassemblements nocturnes, ce qui n’a pas laissé indifférent leurs adversaires politiques : « L’esprit d’intolérance a resurgi entre rivaux qui ne cessent d’ailleurs de se mettre les bâtons dans les roues les uns contre les autres. Malheureusement, pour ce cas présent, certains y sont allés fort en malmenant d’autres partisans, avec des actes de violence verbale et physique, qui ont attisé la haine et la méfiance », déplore Egide*, un agriculteur du coin.
Pour Jérôme Ndayishimiye, secrétaire exécutif permanent de la commune Nyamurenza, la population adulte ayant subi les traumatismes de la guerre ne peut pas se sentir à l’aise lorsque de tels phénomènes de rassemblements clandestins se reproduisent : « Comme nous sommes dans un pays qui sort de la guerre, il y’a des situations que l’on n’oublie pas et c’est compréhensible que certaines personnes soient sensibles et vigilantes face à des conduites inhabituelles. »
Un comportement à bannir
Quoique certains collectifs dans la société réprouvent des restrictions en rapport avec la liberté de se réunir, reconnait le sociologue Tharcisse Bimenyimana, il est nécessaire que chaque citoyen soit respecté dans ses droits et valeurs afin de préserver l’harmonie sociale : « Tous les membres de la société doivent être traités sur le même pied d’égalité dans le souci de limiter des ameutements découlant d’une injustice et d’une discrimination. »
A l’administration, ce sociologue recommande la facilitation des activités politiques des partis en octroyant, chaque fois de besoin, une permission de tenir des réunions, pour éviter que ces dernières se fassent en clandestinité, ce qui pourrait affecter négativement le climat social : « Un groupe qui ne partage pas l’idéologie politique de l’autre et qui fait ses activités en cachette, sera toujours sur le qui-vive, craignant d’être la cible de leurs probables mauvais desseins. »
*nom d’emprunt
