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Le mobile money, un remède financier pour franchir le gouffre de l’inclusion au Burundi

Le Burundi lutte contre les vagues tumultueuses de l’inclusion. Les abandons de cette exclusion monétaire se trouvent parmi les populations des zones rurales, en particulier les femmes et les jeunes. Comparé à ses voisins de la Communauté d’Afrique de l’Est, le Burundi se débat à contre-courant, avec un maigre taux d’utilisation du mobile money, flottant à peine autour de 11%. Les téléphones portables, l’électricité, timide et discrète, se dressent comme des obstacles infranchissables sur la voie de l’adoption du mobile money. Cependant, une lueur d’espoir émerge à l’horizon : la possession d’un téléphone portable se profile comme le radeau de sauvetage pour les ménages ruraux, en particulier les femmes, ouvrant les portes des services financiers mobiles. Les groupes d’épargne et l’énergie solaire se joignent à cette quête d’égalité financière, cherchant à réduire les disparités qui entravent l’inclusion.
Les défis de l’inclusion financière au Burundi : une réalité criante dans les zones rurales

La problématique soulevée est l’insuffisance de l’inclusion financière dans les zones rurales et parmi les populations à faible revenu au Burundi. Malgré l’importance de l’inclusion financière pour la croissance économique et la réduction de la pauvreté, le système bancaire formel ne parvient pas à atteindre ces populations de manière adéquate. Les statistiques indiquent que seulement 12,5 % de la population adulte détient un compte dans une institution financière, contre une moyenne de 34 % en Afrique subsaharienne.

De plus, il existe des disparités liées au genre, à l’âge et à la catégorie socio-économique dans la détention de comptes. Comme l’explique l’enseignant chercheur Arcade Ndoricimpa qui a participé dans le projet collaboratif du CREA sur l’inclusion financière, « Par exemple, les hommes sont presque deux fois plus susceptibles de posséder un compte que les femmes, et les jeunes ont moins de comptes que les personnes plus âgées » illustre-t-il avant d’ajouter « Les employés de l’État ont le taux le plus élevé de possession de comptes, tandis que les agriculteurs ont le taux le plus faible »

Il est également important de souligner que les femmes ne représentent que 28,3 % de la clientèle des institutions de microfinance[1]. Cette situation limite la capacité des personnes financièrement exclues et des pauvres à épargner, à rembourser leurs dettes et à gérer les risques de manière responsable. Pour remédier à cette situation, des modèles innovants tels que les services financiers numériques via les téléphones mobiles ont été introduits, mais leur adoption et leur utilisation restent encore faibles au Burundi par rapport à d’autres pays de la région.

Les obstacles à l’adoption du mobile money au Burundi

Malgré les efforts déployés pour promouvoir l’inclusion financière par le biais du mobile money au Burundi, les chiffres révèlent une utilisation encore faible de cette technologie par rapport aux autres pays de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE). Les résultats de la dernière enquête nationale sur le mobile money montrent que seulement 11,4% des Burundais ont utilisé leur téléphone pour effectuer des paiements, envoyer ou recevoir de l’argent entre 2019 et 2020. Cette réalité met en évidence un certain nombre d’obstacles qui entravent l’adoption du mobile money dans le pays. L’un des principaux obstacles cités dans le travail de recherche de l’enseignant chercheur Michel Armel Ndayikeza est la disponibilité limitée des téléphones mobiles et de l’électricité dans les zones

rurales du Burundi. En effet, la possession d’un téléphone mobile et l’accès à l’électricité sont des prérequis essentiels pour utiliser le mobile money de manière efficace. « Les données montrent que seulement 30% de la population burundaise possède un téléphone mobile, tandis que le taux d’utilisation du mobile money est encore plus faible, à 11% »[1] explique-t-il. Cela indique que de nombreuses personnes possèdent un téléphone mobile mais ne l’utilisent pas pour les transactions financières. Selon le Professeur, il est donc crucial de renforcer l’infrastructure des télécommunications et l’accès à l’électricité dans les zones rurales afin de faciliter l’adoption du mobile money.

Un autre défi majeur est le manque de sensibilisation et de compréhension des avantages du mobile money parmi la population burundaise. « Malgré des caractéristiques démographiques similaires aux autres pays de la CAE en termes de composition par sexe, de zone de résidence, d’âge et d’éducation, l’enquête révèle une différence significative entre la possession d’un téléphone mobile et l’utilisation du mobile money » conclut-il. Cela suggère qu’il existe un manque de connaissances et de confiance dans les services financiers mobiles. Il est donc essentiel de mener des campagnes de sensibilisation et d’éducation pour informer la population sur les avantages et l’utilisation sécurisée du mobile money.

L’importance de la finance numérique dans la promotion de l’inclusion financière au Burundi

La faible inclusion financière au Burundi constitue un défi majeur pour le développement économique et social du pays. Les principales causes de cette exclusion sont liées à l’exclusion sociale et à la distance géographique entre la population et les institutions financières.

En effet, selon Saidi Bizoza Enseignant chercheur qui a également participé dans le projet collaboratif du CREA sur l’inclusion financière « Près de la moitié de la population adulte vit à plus de 8 km d’une institution financière, et un pourcentage élevé de la population met plus de 60 minutes pour s’y rendre ». Il ajoute aussi : « De plus, les femmes sont particulièrement touchées par cette exclusion, car seulement 30 % des comptes bancaires et de microfinance sont détenus par des femmes »

Face à ces défis, la finance numérique, notamment le « Mobile Money », apparaît comme une alternative prometteuse pour promouvoir l’inclusion financière au Burundi. Cette approche utilise les technologies de la communication et les services bancaires mobiles pour permettre aux individus d’accéder facilement aux services financiers, même dans les zones isolées comme les zones rurales. Le « Mobile Money » a déjà démontré de nombreux avantages et effets positifs sur l’inclusion financière, notamment en réduisant l’écart entre les sexes et les régions en matière d’inclusion financière.(3)

Cependant, malgré ces avantages potentiels, Gildas Irakoze un autre enseignant-chercheur ayant travaillé en binôme avec Saidi Bizoza sur l’analyse portant sur la possession d’un téléphone portable comme pont pour assurer les services bancaires aux exclus du système bancaire affirme qu’il est essentiel de mener une analyse approfondie de l’efficacité de la finance numérique au Burundi : « Les onclusions d’études menées dans d’autres pays ne peuvent pas être directement extrapolées, car chaque contexte national présente des spécificités uniques » souligne-t-il.

Selon lui, il est donc nécessaire de réaliser un diagnostic précis des facteurs qui favorisent ou entravent l’inclusion financière par le biais de la finance numérique au Burundi. Cette analyse approfondie permettra de mieux comprendre ce qui fonctionne et ce qui doit être amélioré, afin de guider les décideurs politiques dans le développement de politiques économiques efficaces dans ce domaine.

Des recommandations pour la mise en œuvre

Les recommandations pour augmenter l’utilisation du mobile money au Burundi peuvent être résumées comme suit. Tout d’abord, il est essentiel d’améliorer les infrastructures de communication, en comblant le déficit dans les zones rurales. Cela permettra de favoriser l’accès aux réseaux mobiles, encourageant ainsi l’utilisation du téléphone mobile et l’adoption du mobile money. De plus, il est crucial de renforcer la politique et la réglementation entourant le mobile money. Une politique solide et des réglementations claires garantiront la confiance des utilisateurs et favoriseront le développement des opérateurs de téléphonie mobile. Cette mesure contribuera à consolider l’Objectif de développement durable 9, qui vise à promouvoir l’innovation et l’infrastructure technologique.

Une autre recommandation importante consiste à promouvoir l’utilisation de l’énergie solaire comme moyen alternatif d’accéder à l’électricité dans les zones rurales. En encourageant l’utilisation de cette source d’énergie renouvelable, on améliorera l’utilisation du téléphone mobile et l’adoption du mobile money. Cela soutiendra les Objectifs de développement durable 1 et 9, qui visent respectivement à réduire la pauvreté et à favoriser l’innovation et les infrastructures.

En mettant en œuvre ces recommandations, le Burundi pourra favoriser la croissance de l’utilisation du mobile money, améliorer l’inclusion financière et contribuer à la réduction de la pauvreté, tout en stimulant l’innovation et le développement des infrastructures technologiques conformément aux Objectifs de développement durable (ODD).

 

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