Après la mise sur pied du réseau de surveillance environnementale pour une gestion intégrée des ressources en eau et la préservation de la biodiversité du lac Tanganyika et sa digitalisation, le bilan de la première phase de LATAWAMA est plus que satisfaisant. Gros plan
Pour un lac qui abrite plus de 1500 espèces aquatiques dont 600 ne se trouvent nulle part ailleurs au monde, avec 18% de la réserve d’eau douce de surface disponible au niveau mondial, à l’ère où l’on parle de plus en plus de la guerre de l’eau dans le monde, protéger le lac Tanganyika relève à certains égards, d’un combat pour la survie.
C’est ce que fait LATAWAMA (Lake Tanganyika Water Management), un projet exécuté par l’Autorité du Lac Tanganyika en collaboration avec l’Agence Belge pour le Développement Enabel sur financement de l’UE depuis le 25 juillet 2019 dans 5 pays (Burundi, Tanzanie, RDC, Zambie et Rwanda).
Ce n’est plus un secret pour personne : le lac Tanganyika est menacé par l’accroissement rapide de la population humaine, la dégradation de l’environnement causée par les pêches non durables, la déforestation et les pratiques agricoles non durables, la pollution et l’impact des changements climatiques, pour ne citer que ceux-là, comme le rappelle Didier Cadelli, chargé de ce projet, malgré les richesses dont il regorge.
Face à ces défis, le projet LATAWAMA s’est attelé, dans sa première phase, qui touche d’ailleurs bientôt à sa fin (janvier 2024) , à préserver la qualité des eaux du lac Tanganyika.
Des résultats des réalisations satisfaisants
Trois objectifs avaient été retenus à cet effet : mettre en place un réseau de surveillance de la qualité des eaux du lac Tanganyika, développer les solutions en termes de gestion des déchets solides ou liquides et appuyer l’autorité du lac Tanganyika dans ses missions.
Ces trois résultats ont été quasiment atteints, se félicite Didier Cadelli : « Nous sommes à peu près à 85% des objectifs finaux. Le projet va prendre fin en janvier 2024 et nous aurons atteint l’ensemble de notre mission. »
Et d’expliquer : « Le projet a travaillé avec quatre laboratoires des pays riverains dans la mise en place du réseau de surveillance des eaux du lac Tanganyika et l’alimentation de la base des données. »
Au Burundi, le laboratoire de l’Office Burundais pour la protection de l’Environnement (OBPE) a été réhabilité et équipé. Le laboratoire de Lake Tanganyika Research Unit (LTRU), en Zambie, a également été réaménagé et équipé, et des analyses préliminaires sont effectuées sur terrain. De même, les laboratoires du Centre de Recherche en Hydrobiologie d’Uvira en RDC sont actuellement réhabilités et équipés et les analyses ont débuté. Quant au laboratoire de Tanzania Fisheries Research Institute (TAFIRI), il vient d’être équipé très récemment en matériel analytique et en réactifs. Tous ces laboratoires forment un réseau et sont équipés en matériel analytique.
Et ce n’est pas tout…
Concernant les actions visant la dépollution des eaux du lac Tanganyika, Didier Cadelli indique que dans les pays comme la Tanzanie, la RDC, la Zambie et le Rwanda, le projet s’est investi aussi sur la gestion des déchets solides. Et au Burundi, il confie que le projet a réhabilité et équipé le laboratoire de l’Office Burundais de l’Urbanisme et de l’Habitat (OBUHA) afin de lui permettre de gérer au mieux la station d’épuration de Buterere, le réseau existant de collecte des eaux usées de la ville de Bujumbura, de gérer les boues, de les sécher et ensuite de les valoriser éventuellement en agriculture dans le futur.
Concernant le volet de renfoncement des capacités, Didier Cadelli fait savoir que des laborantins ont été accompagnés pour renforcer leurs connaissances et compétences analytiques, et une politique d’échantillonnage et des analyses des eaux ont été conjointement élaborées. « Aujourd’hui les laboratoires exécutent régulièrement la collecte et l’analyse des échantillons d’eau, dont les données sont ensuite vérifiées et analysées par l’équipe du projet. L’objectif à terme est de rendre ce processus indépendant, avec une implication encore plus importante des Etats membres et de l’Autorité du lac Tanganyika », a-t-il souligné.
Toutefois des défis persistent…
Il n’existe pas de projet sans défis, rappelle Didier Cadelli. Et d’énumérer quelques-uns : « C’est extrêmement compliqué de travailler dans 5 pays, de traverser les frontières, des langues différentes, des monnaies différentes, des marchés publics qui ne sont pas régulés de la même façon, le challenge de travailler dans les temps de Covid 19, ainsi de suite. »
Et ce n’est pas parce que tout est compliqué, qu’on n’y arrive pas ! « Toutes ces contraintes nous aident à améliorer la formulation du prochain projet TAKIWAMA qui est une deuxième phase, à tenir compte des défis que nous avons dûs affronter », confie Didier Cadelli.
Et de se réjouir que l’Union Européenne a accepté de financer cette deuxième phase de 2024 à 2029 avec une enveloppe de 31 millions d’euros : « Elle s’intéressera aux problématiques des données climatiques, celles liées à la hauteur du lac et des données liées à la biodiversité notamment en termes de poissons. »