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Les jeunes dans les partis politiques: une majorité minorée

Si la démocratie est le reflet de l’expression de la voix de la majorité, les jeunes dans leur écrasante majorité, devraient pouvoir imposer leur voix dans les partis politiques. Cependant force est de constater que la gérontocratie règne en maître dans les partis politiques. Tout bien considéré, quel est le degré de participation de la jeunesse au sein de ces formations ?

D’aucuns ne nient que les jeunes constituent la majorité de la population et qui plus est, ne sont pas assez représentés dans les hautes sphères de prise de décisions dans les partis politiques au Burundi.

Là où le bât blesse, c’est au niveau de la loi de 2011 régissant les partis politique, qui est mise à contribution pour exclure une partie des jeunes entre 18 et 25 ans dans la fondation et la direction des partis politiques en son article 32, qui dispose en son premier alinéa: «Les dirigeants et les membres fondateurs d’une formation politique doivent être de nationalité burundaise, jouir de leurs droits civils et politiques, avoir 25 ans révolus et résider sur le territoire national sauf cas de force majeure.»

Léonce Ngendakumana estime que si la jeunesse était bien préparée à assumer certaines responsabilités politiques travers des écoles de la démocratie pour s’imprégner de grandes valeurs de la démocratie, l’âge ne devrait pas être une barrière. Raison gardée, pour ce qui concerne le Frodebu, l’ancien Président de l’Assemblée Nationale, affirme que dans le prochain congrès, le comité exécutif du parti va passer dans les mains de la jeunesse avec au moins 3 jeunes sur 5 membres de ce comité.

Dr. Thierry Ingabire, président du Conseil National de la Jeunesse Burundaise

Dr. Thierry Ingabire, président du Conseil National de la Jeunesse Burundaise, quant à lui, explique que l’absence des jeunes dans les organes de direction des partis politiques peut s’expliquer par plusieurs raisons dont la culture burundaise en premier qui a une propension de confondre vieillesse et sagesse. Ainsi donc, les dinosaures dans les partis politiques deviennent indéboulonnables, irremplaçables.

Un autre argument « fallacieux » qui milite en faveur de la gérontocratie vieille de plusieurs décennies dans ces partis est le «messianisme politique» entretenu autour de certains leaders politiques, qui poussent les partisans à cristalliser l’idéologie du parti dans la personne du leader du parti, ce qui conduit vite ses membres à ne plus faire le distinguo entre le leader et l’idéologie du parti car pour eux, sans cette personne l’idéologie n’existe plus, comme le fait savoir un politologue consulté.

Cet expert ajoute que les jeunes ne devraient pas être aussi naïfs, en croyant qu’il n’y a qu’une seule bouche de laquelle la vérité peut sortir. Quand bien même cela pourrait être vrai, ajoute-t-il, pour que les jeunes puissent avoir leur place à la «table des grands», ils doivent faire appel à leur conscience et avoir une pensée critique pour passer au tamis les différentes idéologies et sollicitations des politiciens aux fins d’y tirer profit et surtout se faire représenter afin d’être sûr que leurs doléances sont aussi considérées.

Quid de l’instrumentalisation de la jeunesse dans la politique?

Ceux qui se défendent de l’instrumentalisation des jeunes sont généralement ceux qui les instrumentalisent. Seulement, ils ne le reconnaîtront jamais officiellement. Mea culpa fait, M. Ndikumana estime qu’il est grand temps pour que les figures presque inamovibles des partis politiques depuis des décennies reconnaissent leur échec à faire avancer le pays avec le passé chargé d’ombres sombres qu’ils traînent avec eux partout.

MD est un étudiant en médecine, affirme quant lui, rien attendre, en tant que jeune, des partis politiques, même s’il reconnait en faire partie: «J’espère trouver un emploi à la fin de mes études en médecine.» Et de poursuivre: «Une personne haut placée m’a conseillé d’intégrer le parti CNDD-FDD car à la fin de ma formation, selon elle, je pourrais gravir avec plus d’aisance les échelons en politique et avoir une vie meilleure.»

Ce qu’il a évidemment fait malgré lui, car soutient le jeune étudiant, l’idéal aurait été la mise en place d’un espace d’échange et de dialogue pour que les jeunes puissent débattre sans animosité des questions qui les hantent afin de trouver des solutions pérennes.

Un autre étudiant en droit, cette fois-ci membre du CNL affirme qu’il est membre du ce parti car, il croit fermement en l’idéologie de ce parti. A la question de la place qu’occupent les jeunes aux postes clés de prise de décision au sein des partis politiques, l’étudiant affirme que cela importe peu. Ce qui compte pour lui c’est la vision: «Il ne sert à rien d’avoir des jeunes à des postes décisionnels dans les partis politique voire dans les institutions du pays, ce qui compte c’est d’avoir des gens qui répondent positivement aux aspirations des jeunes, des gens capables de trouver des solutions concrètes aux défis qui minent la jeunesse. Ce qui m’intéresse c’est sont les résultats.»

La cause des jeunes pour et par les jeunes

Depuis des décennies, les ligues des jeunes affiliées aux partis politiques se sont distinguées par l’usage de la force physique. Ceci s’explique par le fait que la plupart des hommes politiques sont encore subjugués par le lourd passé que le pays n’a pas encore élucidé. Pour Léonce Ngendakumana, cela doit changer, raison pour laquelle il croit que l’avenir de la jeunesse et du pays dans son ensemble est dans les mains de la jeunesse.

Et d’appeler au renouvellement de la classe politique pour laisser l’arène aux jeunes générations avec un passé au-delà de tout soupçon: «Les pouvoirs publics doivent favoriser l’émergence d’une nouvelle génération, libéré du fardeau du passé qui ne cesse de rattraper le Burundi pour en finir une fois pour toutes avec le cercle vicieux de la violence.»

Un étudiant rencontré à l’Université Lumière de Bujumbura qui a gardé l’anonymat, plaide quant à lui, pour l’instauration d’une école de démocratie pour inculquer aux jeunes, dès le bas âge, les valeurs de la démocratie, de convivialité, de tolérance, de patriotisme, etc ; pour que le moment venu, à l’âge de participer ou militer dans les partis politiques, ces jeunes le fassent en âme et conscience sans se faire manipuler ou instrumentaliser.

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