Dans la province de Gitega, les agriculteurs peinent à se procurer des fertilisants pour la saison culturale en cours. Entre prix élevés et pénurie persistante, beaucoup se résignent à utiliser des engrais organiques locaux, au risque de voir leurs rendements chuter.
Edouard Cishahayo, agriculteur sur la colline Gisuru, sous-colline Gitaba, en zone Giheta de la commune Gitega, confie que malgré la signature des contrats et le versement d’avances dès septembre, les fertilisants tardent toujours à arriver. En attendant, lui et d’autres paysans se rabattent sur l’engrais organique local, l’engrais de la société FOMI n’étant pas encore disponible pour tous. Une situation qui, selon lui, affecte déjà la production, car les engrais locaux seuls ne suffisent pas à garantir de bons rendements.
M. Cishahayo appelle à une meilleure gestion du calendrier agricole. Selon lui, « les services chargés des semences et des engrais devraient être confiés à des experts compétents, capables de comprendre et de respecter le véritable rythme agricole du pays, plutôt que de se baser sur des données théoriques ou satellites souvent trompeuses ». Il plaide aussi pour que les fertilisants soient disponibles tout au long de l’année, permettant ainsi aux agriculteurs de les stocker chez eux, « comme on le fait avec le ciment pour la construction », afin de pouvoir semer dès les premières pluies, sans attendre un calendrier administratif.
Appel à une meilleure prise en charge
Jean Marie Niyongabo, président de l’association des agriculteurs-éleveurs FOPABU, lance un appel à une meilleure prise en charge de la distribution des fertilisants. Il fait part de la déception des producteurs face aux retards constatés : « Les champs étaient déjà prêts, les semences disponibles, les premiers paiements effectués, et nous n’attendions plus que la pluie pour semer. Malheureusement, malgré les efforts des agriculteurs et de l’État, ce retard est venu compromettre tout le travail préparatoire, sans qu’une explication claire ne soit donnée. »
Pour Jean Marie Niyongabo, président de l’association FOPABU, le retard dans la distribution des engrais est un coup dur pour les agriculteurs : « Nous avions tout préparé : les champs, les semences, les paiements… Il ne manquait plus que la pluie, raconte-t-il. Mais à cause de ce retard, tout notre travail a été compromis. Et jusqu’à présent, nous n’avons reçu aucune explication claire. »
Pour lui, l’heure est à la mobilisation. Il appelle l’État à déployer tous les moyens possibles pour que les engrais parviennent rapidement aux cultivateurs. « Les agriculteurs respectent leurs engagements en payant à temps. Ils méritent en retour un service ponctuel », insiste-t-il.
Le président de la FOPABU interpelle aussi la société FOMI, l’exhortant à honorer ses engagements ou à communiquer clairement sur les obstacles rencontrés. Il plaide enfin pour que le gouvernement explore d’autres partenariats afin de garantir un approvisionnement durable et diversifié en engrais.
Avant de clore, il a encouragé les agriculteurs à ne pas baisser les bras : « Restons organisés, résilients et déterminés à nourrir nos familles, malgré les difficultés. »
TUBURA, un allié des paysans face aux défis agricoles

À travers le programme TUBURA, l’ONG One Acre Fund soutient les agriculteurs burundais dans l’obtention de semences de qualité et d’engrais. Si beaucoup reconnaissent les effets positifs de cette initiative sur leurs récoltes, certains estiment toutefois que les conditions d’adhésion restent trop strictes.
Selon Chartier Niyungeko, chargé des relations avec le gouvernement à TUBURA, l’objectif est clair : améliorer les connaissances et l’accès aux intrants pour une agriculture plus productive. « Nous travaillons en partenariat avec FOMI pour fournir des engrais, mais le coût élevé de ces intrants constitue encore un obstacle majeur », confie-t-il.

À la BPEAE Gitega, le ton se veut optimiste. Son directeur, Jean Séverin Sinzobatohana, souligne les efforts des cultivateurs qui utilisent désormais massivement l’engrais organique (ifumbire y’ikirundi). Il les invite aussi à adopter la chaux agricole (ishwagara), capable de corriger l’acidité du sol et de stimuler la productivité.
Sur la question de l’engrais FOMI, il admet que les stocks actuels restent insuffisants, mais assure que « la distribution commencera très bientôt ». Il en profite pour remercier les agriculteurs ayant déjà payé et exhorte FOMI à augmenter sa production pour répondre aux besoins grandissants sur le terrain.
Pour ceux qui redoutaient que l’engrais arrive trop tard, le directeur de la BPEAE à Gitega tient à rassurer : « La distribution s’intensifie et tous ceux qui ont déjà payé le recevront rapidement ». Il conseille aux agriculteurs de ne pas se précipiter et d’utiliser l’engrais organique seul, mais plutôt d’attendre le mélange avec l’engrais chimique pour optimiser les récoltes.
Les paysans saisissent également l’occasion pour interpeller le gouvernement, demandant des mesures efficaces afin de résoudre les difficultés d’approvisionnement et de réduire les coûts, pour garantir un accès équitable à ce produit vital.




