Les Burundais dans leur ensemble sont confrontés aux multiples défis qui pourraient compromettre leur vivre-ensemble, indépendamment de leur diversité. Sans respect mutuel, les bases de la société risquent de s’écrouler à vue d‘œil.
Autant de valeurs ont guidé le peuple Burundais depuis des millénaires. Mais fort malheureusement, certaines d’entre elles ne trouvent plus actuellement leur place dans notre quotidien. C’est notamment le dénigrement à l’endroit d’une catégorie de personnes, que relèvent des habitants de la colline Rusunu, commune Musongati, en province de Rutana.Certains d’entre eux témoignent que les travailleurs saisonniers qui migrent en permanence vers la Tanzanie sont sujet du dédain dans la communauté. Pascasie* (42 ans) regrette la stigmatisation à laquelle ces derniers doivent faire face, alors que leur seul tort est le souhait de chercher là où l’herbe est plus verte : « Souvent, ils ont la malchance de retourner bredouille dans le bercail, puisqu’ils ont été racketté sur le chemin du retour. C’est à ce moment que la société les rejette sans ménagement, considérant ainsi leur choix comme honteux.
Pis encore, déplore Georges* (54 ans), habitant lui aussi à Rusunu, ce dénigrement ne se limite pas à cette catégorie d’individus vivant à l’étranger. Pour lui, même certains groupes sociaux peuvent en être victimes suite à leurs activités génératrices de revenus qu’ils mènent : « Parfois, ceux qui élèvent des souris ou font d’autres projets d’élevage de basse-cour éprouvent une certaine raillerie de leurs voisins au point de les décourager. », révèle-t-il.
La cohésion sociale ébranlée
Cependant, avise Georges*, une telle attitude suscite toujours des frustrations qui peuvent alimentent des divisions au sein de la communauté : « Si un individu ou un groupe d’individus se sentent méprisés surtout par ce qui devraient préserver leur dignité, il peut y avoir des dissensions au fur et à mesure. »

Pour le sociologue, Blaise Izerimana, certains leaders utilisent aussi un langage de dénigrement. Ils s’appuient sur des facteurs comme l’ethnie, la région, ou autres, par le concours des préjugés ou stéréotypes, signale-t-il : « Il y a ceux qui le font sans le savoir et d’autres qui le font consciemment. Ces derniers sont trop dangereux car ils ont intérêt à diviser l’opinion. »
En guise d’exemple, pointe-t-il, certains responsables politiques par manque de vision profèrent de tels messages pour manipuler leurs fidèles, afin que ceux-ci ne les remettent pas en question : « Parce qu’ils n’ont pas de solutions pour gérer la fuite des cerveaux qui menacent le pays, ils essaient de rabaisser les membres de la diaspora pour dissuader ceux qui aspirent chercher l’emploi à l’étranger », explique-t-il.
Le respect mutuel, une vertu
Cet expert recommande le renforcement de l’éducation de base, car c’est une instance de socialisation primaire par excellence : « C’est là où on apprend pas mal de choses. Il faut que les parents ne privilégient pas le langage de dénigrement. Si on entend un enfant qui dénigre les autres, il faut le décourager quand il est temps. »
M. Izerimana invite aussi l’Etat à punir ceux qui dénigrent les autres. « Si un décideur ou quelqu’un de haut rang dénigre une catégorie de personnes, il faut qu’il soit puni conformément à la loi », argumente-t-il.
Claudine Niyoyitungira, administrateur de la commune Musongati, admet que de tels messages de dénigrement sont courants dans la société, mais que l’administration préconise des sensibilisations afin de décourager les auteurs de tels discours et préserver la cohabition pacifique.
*nom d’emprunt
