La nouvelle annonçant la mort de l’artiste burundo-canadien des suites du Covid-19 au Malawi, s’est répandue sur les réseaux sociaux dans la soirée du 11 avril. Jimbere retrace la vie de ce chanteur engagé.
(Certains propos ont été recueillis via le journal du 13 avril 2020 de la radio Isanganiro).
Les années 2000 auront été riches en bonne musique. De Gitega à Bujumbura, et même dans la diaspora, le reggae burundais connaîtra son âge d’or, grâce notamment à l’immense talent de Willy Leonard Niyomwungere qui le portera jusqu’au Québec, au Canada. Bien loin de sa patrie, à des milliers de kilomètres du Burundi mais toujours en langue maternelle, le message de ses chansons s’adressait en priorité à ses compatriotes ainsi qu’aux Africains. Il dénonçait sans se lasser des maux qui gangrènent les sociétés et proposait des remèdes pour les soigner. Les fréquentes références bibliques dans ses chansons témoignaient de sa foi chrétienne.
Sa chanson « Abantu » (les gens) où il dénonce les paradoxes de la vie et l’hypocrisie signe son entrée fracassante sur la scène musicale burundaise. Ce fut un chef d’œuvre, le nom de Leonard Niyomwungere résonne dans toutes les stations de radios. Un style nouveau d’un reggae qui ne pointe pas directement du doigt l’ordre établi, mais se veut plutôt rassembleur, à la Lucky Dube.
Il va surfer sur la vague de ferveur suscitée par ses premiers morceaux. Sa musique va traverser les frontières et attirer de nombreux fans, aussi bien dans le pays que dans la diaspora grâce au message authentique mais aussi à un rythme puissant et envoûtant.
Qui est donc feu Willy Leonard Niyomwungere ?
Né en commune et province Bururi en 1976, Niyomwungere n’a pas eu une enfance tendre. Orphelin de père et de mère, avant ses 10 ans, il va vivre et grandir chez son grand-père paternel qui était l’un des premiers pasteurs pentecôtistes à Kiremba sud.
La musique dans les veines, à 5 ans le petit Niyomwungere commence déjà à jouer à la guitare. Il se familiarise avec certains musiciens de sa région ce qui lui permet d’apprendre à jouer à d’autres instruments de musique. Il fait son école primaire à Murinda (Bururi), puis poursuit ses études secondaire à Kiremba sud, et termine à Bujumbura (au Boston School)
Au secondaire, il fonde un club qu’il nomme Relax Band, dont il est le leader. La crise socio-politique des années 90 pousse Niyomwungere vers le chemin de l’exil, direction le Kenya, quelques temps après il rejoint l’Afrique du Sud. Les études et la musique étant ses priorités, la star burundaise se dirige alors vers le Canada pour son cursus académique à l’université Laval. Là, son talent artistique se confirme. Il organise des concerts au Québec et dans d’autres villes occidentales, ce qui lui vaut un succès immédiat.
Excellent Nimubona, ancien journaliste, chanteur et l’un de ses amis d’enfance, témoigne de sa passion pour la musique. « J’étais en 3ème année primaire lorsque je l’ai connu. C’était un artiste dans l’âme. Il interprétait avec brio les chansons de feu Matata Christophe, et d’autres artistes. Il se promenait toujours avec un carnet à la main pour écrire des morceaux quand il avait une inspiration soudaine. C’est bien lui qui m’a appris la composition et la danse. Feu Niyomwongere était aussi un excellent danseur. »
E. Nimubona se rappelle avec nostalgie les instrumentales qu’ils s’échangeaient pour produire des chansons. « Il a beaucoup insisté pour que je reste dans la musique, mais comme j’avais pris la décision d’embrasser le journalisme, je ne pouvais réaliser son souhait. En revanche j’ai contribué à la promotion des artistes à travers mon micro ».
Willy Leonard Niyomwungere laisse derrière lui une femme et deux filles, Alida et Joanna Niyomwungere.