Le weekend end passé, les terrains de Gikungu accueillaient les matchs d’ouverture du championnat de Bujumbura. Le rendez-vous très attendu de dimanche qui devait opposer New Stars à Gymkhana n’a pas eu lieu, au grand dam des amateurs du ballon orange. Gymkhana, qui n’était pas sur la ligne de départ, a écopé au passage d’un forfait. Ce raté est-il un signe avant-coureur d’un début de championnat bâclé ?
Le climat de malaise avait commencé avec des lettres de doléances des joueurs envoyées aux dirigeants du club qui ont été suivies par les suspensions intempestives de certains membres du staff du club, c’était au début du mois d’aout. A l’unanimité, les joueurs réclamaient une rencontre et plus tard, une assemblée générale, pour mettre sur tapis tous les manquements qui gangrénaient le club. Faute de quoi, ils avertissaient qu’ils démarreraient un mouvement de grève. « Nous voulons juste que les joueurs soient plus impliqués dans les grandes décisions du club. C’est nous qui sommes par ailleurs, les acteurs clés du club. Nous avons des réclamations pour que nous puissions bien remplir notre mission, qui est de bien jouer au basketball, et de remporter des titres. Cela a un coût, de la part des membres du club, en l’occurrence le comité exécutif », indiquait Ghyslain Munezero, le capitaine de l’équipe, après la sortie de la lettre annonçant le début de la grève le 2 août de cette année. Sur la liste des doléances exprimées par les joueurs figuraient entre autres l’octroi des contrats aux joueurs, l’équité dans l’octroi des faveurs ainsi que l’instauration d’un climat facilitant l’épanouissement des joueurs.
Comme annoncé, les joueurs vont boycotter les préparatifs du tournoi d’ouverture du championnat. Mais à un certain moment, grâce à une médiation intervenue, ils avaient rejoint le tournoi, sans pour autant abandonner définitivement la grève qui reprendra juste après. Conséquence : Gymkhana l’une des équipes les plus complètes que connaît le championnat local sera humilié en demi final du tournoi par les Hyppos, une équipe jugée moins performante sur papier
« Les joueurs n’ont aucun pouvoir de convoquer une assemblée générale »
Réagissant sur les ondes de la radio Buja FM, Anicet Kwizerimana, l’actuel président du club, fait savoir qu’il a été déçu et choqué par le comportement de ses joueurs. « Je suis avec eux depuis la deuxième division. Nous causions aux entrainements, nous communiquions sur les réseaux sociaux, mais ces derniers temps, ils ne coopèrent plus. Ce n’est pas la meilleure solution pour résoudre les problèmes. Nous sommes une famille, et nous devrions trouver un terrain d’entente qui satisfait tout le monde conformément au règlement d’ordre intérieur », fait-il savoir.
Quant à la tenue d’une assemblée générale convoquée par les joueurs, Anicet Kwizerimana n’y va pas par quatre chemins : « Ils n’ont aucun pouvoir de convoquer une assemblée générale. Seul le comité exécutif est habileté à le faire. Le corps des joueurs a ses responsabilités contractuelles à remplir. La tenue d’une assemblée générale suit des procédures bien précisées par la loi, ils devraient la consulter ».
Le président du club en appelle à certains membres de l’équipe qui, en coulisse seraient les fomentateurs du mouvement de grève des joueurs. « Les joueurs sont liés au club par des contrats de prestations. Ils pourraient changer de club, à temps voulu. Si des mésententes persistent entre les membres du club, il est anti sportif et illégal de faire des joueurs des boucliers. Nous devons régler nos différents entre nous », insiste-t-il.
Un mal qui pourrait affecter d’autres clubs
Alors qu’Aimé Christian Nibigira, président de l’ACBAB (Association des Clubs de Basketball Amateurs de Bujumbura) indiquait à la fin du tournoi d’ouverture du championnat, que les mésententes de Gymkhana étaient d’ordre interne et devraient ne se régler qu’à l’interne, d’autres professionnels pensent autrement.
Franck Bujeje, le seul arbitre international de la FEBABU indique que la question est plutôt cruciale. « Aujourd’hui, il est question de Gymkhana. Mais demain peut-être que d’autres clubs pourraient vivre la même mésaventure. Ce qui prévaut dans ce club actuellement n’est pas à prendre à la légère. Ce que les joueurs de Gymkhana réclament est valable pour presque tous les joueurs. Combien disposent de contrats ? Quid des transferts? Il est temps qu’on cesse de prendre les joueurs comme de enfants qui ne font que s’amuser. Il faut plutôt prôner leur épanouissement pour qu’ils puissent réellement vivre de leur sport. Nous avons vu des générations qui ont joué sans rien avoir en retour. Ne serait-il pas temps qu’on passe à un autre niveau ? Le cas de Gymkhana devrait être un bon point de départ pour mettre en avant le bien-être des joueurs ».
Bujeje Franck invite par ailleurs le ministère ayant le sport dans ses attributions à prendre les choses en mains. En outre, il appelle toutes les parties prenantes au basketball burundais à un travail de réflexion approfondie pour élaborer une nouvelle législation qui prend en compte le bien de tous.