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Cinéma

Before 16, quand réaliser un film facilite la rencontre de soi

Un film peut juste ressembler à la création du réalisateur. Mais, à sa grande surprise, le poussant à puiser dans son vécu, le film peut parfois contribuer à la thérapie du réalisateur, ou contribuer à celle de sa communauté. Parce que parler des personnages du film peut se révéler confortable, que parler des vrais problèmes de société. Récit.

Il s’appelle Loïc Niyonkuru. C’est un réalisateur de film burundais. Il a participé à une formation facilitée par Get reel au Kenya. L’appel avait été lancé par docubox aux réalisateurs de film de l’Afrique de l’est intéressés par la production sur la santé sexuelle et reproductive. Et donc il a répondu à l’appel en posant sa candidature. Et par chance, il a été retenu. Cette expérience aura été inoubliable pour lui, car elle lui permettra de réaliser certaines choses qu’il ne savait pas avant.

Aout 2023. Loïc s’envole pour le Kenya. Il y rencontre beaucoup d’autres réalisateurs et producteurs venus de plusieurs pays. Ils sont formés par rapport à la sante sexuelle et reproductive. Ils apprennent à adapter le story telling à la réalité, comment recueillir un témoignage sans qu’il stigmatise plus tard la victime de violences basées sur le genre, comment protéger son informateur, avoir le consentement du témoin, et bien d’autres belles leçons. « Nous avons donc écrit des histoires, nous les avons fait relire par nos mentors écrivains et anciens réalisateurs de films, qui étaient là aussi pour nous encourager, corriger et consolider nos histoires. Nous avons travaillé ensemble pendant une semaine, et nous sommes rentrés, mais nous avons continué à travailler ensemble virtuellement », se souvient-il.

Développement personnel garanti

Le renforcement de capacité était loin d’être ce à quoi s’attendait Loïc. « Cette formation m’a donné l’occasion d’aller à la rencontre des émotions de mes futurs spectateurs, de me connecter avec ceux-ci et de les explorer en toute sécurité, et de parvenir à les gérer. D’une certaine manière, j’ai senti que je contribue à la thérapie de mes spectateurs », fait-il remarquer.

Selon lui, les spectateurs s’identifient aux personnages qu’il a créés. Les spectateurs peuvent aussi s’inspirer de la manière dont les personnages du film réagissent pour parvenir à faire face à leurs problèmes quotidiens ou pour remédier à certaines choses, dont ils se croyaient incapables avant, et ainsi développer leur résilience. Pour Loïc, le jeu et l’intensité d’émotions que ressent le public, la concentration, la peur, l’angoisse, les pleurs, la joie de découvrir le dénouement du film,… Tout ça contribue à les aider à purger leurs émotions grâce à l’empathie qu’ils ressentent pour les personnages du film, d’après Loïc.

Etant donné que le réalisateur se met dans la peau du public et essaie de deviner l’effet que son film produira, il y travaille minutieusement, afin d’atteindre les résultats attendus. Cependant, sa propre création ne le laisse pas indifférent.  « Au départ, je n’étais pas intéressé à travailler sur un film qui parle de VSBG. Pour moi, c’étaient des histoires comme tant d’autres fictions que nous créons. Et même dans la vie courante, je n’attachais pas d’importance à ce genre de situations. Mais à la fin de la formation, je me suis rendu compte que c’est trop dur pour les victimes, et que mon rôle est crucial pour lancer un message susceptible de changer le monde à travers ma réalisation », souligne-t-il.

Des projections à ne pas rater !

Et de marteler : « Inspiré d’une histoire vraie, mon film m’a permis de vivre pleinement, de développer cet œil-là qui voit la pertinence des sujets auxquels on ne s’intéressait pas avant. Mais aussi, j’ai développé cet empathie pour les victimes de VSBG, et j’ai moi-même appris grâce à ce film comment vivre avec les autres, comment parvenir à les comprendre dans leurs différences, et comprendre jusqu’à leurs réactions, car certaines choses s’expliquent par le vécu des concernés. »

Le rassemblement de différents réalisateurs de l’Afrique de l’Est a facilité le réseautage, et a permis d’avoir des amis partout dans le monde. D’après lui, avec ces autres réalisateurs, ils ont appris à être vrais. Ensemble, ils ont découvert que leurs réalités s’entrecroisent. Africains qu’ils sont, ils ont donc réalisé que raconter ces tristes réalités africaines à travers des films permet de briser le tabou, pour parler de ces réalités dont la culture ne permet pas de parler, afin de provoquer un changement de mentalité durable, et la guérison des âmes de victimes.

Vous saurez que « Before 16 » est donc l’un des huit films qui ont été réalisés dans le cadre du projet Get Reel Film en vue de montrer le rôle du cinéma dans le changement de mentalité, et leur concours dans l’autonomie corporelle et la sexualité saine.

Chers spectateurs, soyez donc rassurés. Vous ne regretterez pas d’avoir regardé ces huit films. On se dit alors à ce soir pour les visionner ensemble !

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