Le PAEEJ -Programme d’Autonomisation Economique et d’Emploi des Jeunes Diplômés- est doté d’une enveloppe mirobolante de 48 milliards Fbu pour soutenir l’entrepreneuriat et la création de l’emploi chez les jeunes frappés de plein fouet par le chômage. Alors que certains se posent des questions sur le véritable rôle du PAEEJ, d’autres doutent de sa capacité à réaliser cette imposante mission d’autonomisation des jeunes. Pour éclairer l’opinion, Jimbere a approché le professeur Désiré Manirakiza, Coordinateur national du programme. Voici l’extrait de l’entretien effectué 3 mois après la mise en place du PAEEJ (en avril 2021) par le Président de la République …
Expliquez-nous, brièvement, le PAEEJ ?
Le PAEEJ est un programme initié par le Gouvernement pour essayer de trouver des solutions au taux chômage assez élevé chez les jeunes. Avant de vous parler des différentes composantes du programme, quelques chiffres en lien avec la démographie de la population burundaise pour comprendre sa pertinence : plus de 70% de la population à moins de 35 ans. Ceux dont l’âge est compris entre 14 et 35 ans représentent plus de 50%. Les jeunes ont moins d’opportunités en termes d’emploi. 93% des jeunes diplômés passent plus de 5ans avant de trouver le premier emploi. Le dernier recensement des jeunes sans emploi a noté plus de 400.000 jeunes (diplômés) au chômage, alors même que les fonctionnaires de l’Etat et du secteur privé sont au nombre de 120.000. Les jeunes chômeurs sont trois fois supérieurs à ceux qui ont un emploi, donc à la capacité d’embauche du pays.
Il faut également savoir que les projections démographiques montrent que d’ici 2050 la population burundaise devrait atteindre les 26 millions d’habitants. Cette population, essentiellement jeune, a donc besoin d’être occupée, d’où la nécessite de repenser le modèle d’employabilité des jeunes en mettant l’accent sur la capacitation, leur autonomisation.
Ainsi le programme vise à appuyer les jeunes à travers la sensibilisation à changer de mentalité : l’emploi de bureau a été jusque-là le seul emploi qui intéressait et auquel les jeunes étaient sensibles. Il est aujourd’hui question maintenant de changer et de faire en sorte que les jeunes fassent les études pour créer plutôt de l’emploi et non pas nécessairement pour obtenir de l’emploi. Le PAEEJ a trois volets : le premier est celui de la sensibilisation. Le second volet, l’entrepreneuriat.
Ici, il faudra soutenir les jeunes. C’est-à dire que nous allons organiser une sorte de compétition entre différentes idées porteuses de promesses pour les jeunes, les meilleures seront promues et financées. Il s’agira en fin de compte de faciliter l’accès des jeunes aux ressources de financement.
Le troisième volet concerne le placement des jeunes. Tout le monde est conscient que tous les jeunes ne peuvent pas être des entrepreneurs. Pour ceux qui ont envie de travailler dans des structures, nous signerons des contrats avec les entreprises les plus importantes du pays qui accepteront de les embaucher. Prenons un exemple: si nous signons un mémorandum d’entente avec Jimbere et que nous lui donnons par exemple 100 jeunes qui vont travailler pendant un an et payés par les fonds du PAEEJ, à la fin de leur stage pré-emploi, Jimbere donne la garantie qu’il pourra embaucher au moins la moitié.
Le PAEEJ est-il lié au FIGA (Fonds d’Impulsion, de Garantie et d’Accompagnement) ou encore à la BIJE (Banque d’Investissements des Jeunes) ?
Le FIGA n’est pas nécessairement destiné aux jeunes. Le FIGA est un programme d’impulsion, de garantie et d’accompagnent des initiatives. Celles-ci peuvent être portées par des jeunes ou tout autre Burundais qui a simplement besoin d’un appui. Il y a un lien entre le PAEEJ et le FIGA pour la simple raison que nous poursuivons les mêmes objectifs.
Cependant, nos cahiers de charges sont différents. Nous sommes autonomes, comme l’est le FIGA. Le problème réside dans le fait que le FIGA, s’il devait travailler avec nous, il faudrait qu’il ait suffisamment de moyens pour pouvoir assurer la garantie et distribuer les fonds d’impulsion. Si j’ai bien compris les rôles du FIGA, il est question de pouvoir impulser. C’est un fond chargé de soutenir les (jeunes) entrepreneurs. Plus concrètement, si vous avez par exemple 100.000 Fbu et que vous voulez lancer une affaire de 500.000 Fbu, le FIGA est supposé donc pouvoir vous verser le reste.
Maintenant est ce que le PAEEJ est lié directement à la BIJE ? La BIJE c’est la banque des jeunes, mais elle reste avant tout une banque commerciale. Cela veut dire que, principalement, la BIJE fonctionne comme une banque, et les banques sont à la recherche de l’intérêt. La BIJE va évidemment travailler avec nous, car il y a des jeunes qui auront des crédits de la part du PAEEJ, des crédits qui peuvent transiter par cette banque.
Cela n’est sans doute pas très clair, évoqué ainsi. Je vais essayer de schématiser : supposons qu’un jeune a besoin d’un crédit et qu’il dépose son projet auprès de PAEEJ. Si le projet est éligible, qu’il cadre avec nos objectifs, nous donnons l’accord pour qu’il puisse bénéficier d’un crédit. Le jeune va ensuite déposer le projet auprès de la BIJE, et à ce moment, nous assurons le fonds de garantie, pour qu’il puisse recevoir le crédit en question.
Nous allons traiter avec la BIJE comme nous allons traiter avec d’autres banques. La BIJE est autonome comme l’est également le PAEEJ. Mais, dans ses missions, le PAEEJ sera obligé de passer par la BIJE en tant que banque des jeunes comme il pourra certainement passer par d’autres banques. Il n’existe donc pas de lien direct entre la BIJE et le PAEEJ.
Et pour revenir un peu en arrière, je voudrais vous rappeler que dans tout le dispositif du PAEEJ, le FIGA n’apparaît nulle part, même si les missions sont un peu semblables. Le PAEEJ ne peut travailler avec le FIGA qu’à partir du moment où on se rendra compte qu’en collaborant avec celui-ci, nous serons plus opérationnels que de travailler en solo.
Pour le moment on est encore à l’état du montage. L’objectif du PAEEJ est avant tout de rentabiliser les 48 milliards Fbu.
A ce propos, où en êtes-vous, 3 mois après la mise en place de l’équipe qui va coordonner le programme, quel est l’état des lieux ? Le calendrier des activités ?
Comme vous le savez, le programme est nouveau, ce qui suppose que toute l’architecture du programme est à mettre en place. Depuis avril jusqu’aujourd’hui, nous avons déjà réalisé certaines choses, notamment la préparation et la rédaction des documents de gouvernance, c’est-à-dire les manuels de procédures, d’opérations, de suivi-évaluation, l’élaboration des critères de sélection des partenaires que ce soit des partenaires de mise en œuvre ou alors les jeunes lauréats au programme. Nous avons également fait un certain nombre de descentes sur le terrain dans le but de procéder à l’identification des jeunes qui travaillent dans des groupes communautaires.
A côté de ces éléments en lien avec la mise en place des documents de gouvernance, il y a également le règlement d’ordre intérieur qui est en cours de rédaction. Cela peut sembler à certains que nous avons mis trop de temps à la préparation de ces documents, alors que beaucoup de jeunes attendent l’effectivité du programme, mais vous comprenez qu’il n’est pas facile de mettre en place un tel programme, préparer tous ces éléments et finalement commencer à distribuer de l’argent.
La question de l’argent est très sensible dans un pays où la majorité sociale est en conjoncture. Il faut y aller doucement. Dans quelques jours, nous allons procéder au lancement officiel des activités du PAEEJ, ensuite il y aura un communiqué officiel appelant les jeunes à déposer les dossiers en vue d’une évaluation et probablement de financements. Le lancement officiel des activités est prévu dans courant du mois de juillet.
C’est au mois de septembre 2021 – après l’élaboration des documents de gouvernance et les rencontres sur terrain avec les jeunes entrepreneurs – que les activités proprement dites du PAEEJ ont débuté. On parle notamment de la réunion du 22 septembre dans laquelle il a été conclu, à Giheta, entre le PAEEJ et le centre « Maison du Fermier », dirigé par un Wilbert Dusabe, un accord de financement d’un montant de 100 millions de Fbu à allouer à un projet d’élevage. L’objectif est de renforcer l’élevage de poules par l’octroi de 300 poussins à chacune des 31 coopératives regroupant un effectif de 620 jeunes de la commune Giheta. Ce projet inclut, entre autres, des formations sur des techniques agropastorales à dispenser à ces jeunes bénéficiaires.
Vous parlez de la distribution de l’argent, les 48 milliards promis par le Président de la République aux jeunes du Burundi sont-ils déjà disponibles ? Où sont-ils ? Concrètement, comment allez-vous distribuer ces fonds ?
Les 48 milliards promis sont déjà disponibles et sont logés sur le compte du PAEEJ dans les livres de la banque centrale. Et concrètement, comment allons-nous distribuer ces fonds ? Il ne s’agit pas d’une distribution proprement dite, et je crains que ce soit ainsi que les jeunes aient perçu le programme. Ils se disent que bientôt nous allons procéder à la distribution et que chacun aura sa part. Mais les choses ne vont pas se passer de cette manière. Ce n’est pas une distribution, il s’agit davantage d’un accompagnement, d’un appui.
Et cette enveloppe, allez-vous l’utiliser sur toute la période de 4 ans de votre équipe ?
Les 48 milliards Fbu sont déployés sur une durée de 4ans et ils viennent du Gouvernement. Mais dans nos missions, nous sommes également appelés à chercher d’autres financements, notamment auprès des partenaires au développement. La logique, c’est que désormais tout programme qui vise les jeunes passera davantage par le PAEEJ. Il nous sera possible, de cette manière, de mobiliser d’autres sources de financement en fonction de la pertinence et de la performance du programme et de ses effets sur le terrain.
Dans une séance de moralisation à l’endroit des jeunes entrepreneurs en mairie de Bujumbura, le 31 août 2021, le Président de la République a promis une autre enveloppe pour appuyer les jeunes avec le prochain exercice budgétaire 2022-2023.
Il a profité de l’occasion pour appeler les partenaires du Gouvernement, avec des programmes orientés vers l’appui à l’autonomisation des jeunes, de passer par le PAEEJ, « l’Etat-major pour le développement des jeunes », l’a-t-il surnommé.
De quels mécanismes allez-vous disposer pour veiller à l’utilisation des fonds demandés, et suivre au quotidien l’atteinte des résultats ?
Il faut d’abord avoir à cœur que dans les faits, il n’y a pas de distribution d’argent en tant que tel. Les seules personnes qui vont recevoir de l’argent, ce sera à travers les banques et ce sont celles-ci qui vont se charger du recouvrement. Nous sommes conscients que si l’on ne prend pas garde le fonds peut facilement disparaître.
Pour éviter cela, nous sommes en train de mettre en place tout un ensemble d’outils. Ici, je donnerai l’exemple de l’outil du logiciel de suivi-évaluation, qui est un logiciel qui va permettre à ce que tout ce qui sera fait au nom du programme soit connu jour après jour. C’est-à-dire que si nous accordons un crédit à un jeune qui se trouve à Cendajuru, nous devrons pouvoir être au courant de ce que fait le jeune au quotidien. Cela concerne de façon globale le logiciel de suivi évaluation qui aura comme but la collecte de l’information jour après jour. De ce point de vue, il n’y a pas de crainte.
Nous allons également établir différentes catégories de jeunes : ceux qui ont de l’expérience dans le domaine entrepreneurial ; ceux qui ont de l’expérience ratée, c’est-à-dire que ce sont des jeunes, qui à un moment avaient commencé à investir et dont les business ont connu des difficultés ; et les jeunes qui voudraient investir mais qui n’ont pas d’expérience.
A toutes ces catégories, nous proposerons des modules qui nous permettront, au niveau de la coordination, d’être sûrs que les fonds alloués ne vont pas être dilapidés. Par exemple : supposons qu’il y ait des jeunes qui ont besoin de fabriquer des produits cosmétiques. Ils viennent fraîchement de sortir de l’école et ont des idées porteuses de commerce sans toutefois avoir l’expérience requise. Si nous estimons que leur idée peut porter loin, au niveau du PAEEJ, nous allons nous associer avec eux. C’est-à-dire que nous investirons de l’argent dans leur boîte que nous allons co-piloter, et au bout d’un certain temps, si nous parvenons au niveau de la coordination à rentrer en possession des fonds qui ont été avancés, le PAEEJ se retire et cède effectivement l’entreprise aux jeunes. C’est un mécanisme qui peut éviter que les jeunes tombent en faillite et que l’argent du PAEEJ ne disparaisse pas avec eux.
Concernant les jeunes qui ont de l’expérience, ceux-ci ne vont pas recevoir des crédits directement de nous. Nous allons signer des partenariats avec les banques et ces jeunes vont recevoir les crédits des institutions de crédits et ce sont celles-ci qui se chargeront du recouvrement. Alors je pense que les éléments que je viens de vous évoquer à savoir le logiciel de suivi-évaluation, la gestion des entreprises nouvellement créées, et le fait de signer des partenariats avec les banques, vont nous permettre de sécuriser ces fonds destinés aux jeunes.
Vous parlez de partenariats avec les banques, comptez-vous également travailler avec le secteur privé ?
Je pense que j’avais également ébauché une réponse par rapport à cette question. Comme je l’avais évoqué, il y a un volet placement des jeunes. C’est -à-dire qu’il y a des jeunes qui ne pourront certainement pas, ou ne voudront pas créer des entreprises propres à eux, et qui préfèreront travailler pour d’autres boîtes.
Nous allons identifier des entreprises prometteuses et mener des négociations avec elles pour leur demander d’accorder des stages de pré-emploi. Les négociations avec ces entreprises porteront sur le fait qu’en échange des stages offerts, le PAEEJ leur assurera un soutien financier.
Au mois d’octobre 2020, la retraite de 2 jours du #YouthImpulse a vu la participation des jeunes intellectuels et des entrepreneurs à succès, deux profils plus ou moins différents : quel traitement le PAEEJ réserve-t-il à chacune des deux catégories ?
Vous semblez dire que les deux profils sont différents mais pour moi, il y a un lien important. Je pense que les entrepreneurs à succès et les intellectuels ne sont pas nécessairement distincts. Lors de ce forum, les jeunes intellectuels étaient considérés comme des généraux, puisque dans le combat contre le sous-développement, ceux qui ont fait les études sont considérés comme des modèles, comme des leaders.
Dans la sociologie du développement, les intellectuels ou les élites sont généralement considérés comme les locomotives qui doivent tirer les autres. Dans ce cadre, les intellectuels vont être doublement touchés par le programme, d’abord à travers la formation pour pouvoir dispenser des formations aux jeunes bénéficiaires du PAEEJ, mais également nous pourrons financer leurs microprojets ou leurs idées jugées porteuses. Ainsi, en passant par eux, on se rassure de travailler avec des personnes qui sont à mesure de comprendre certains aspects méthodologiques.
Quant aux entrepreneurs à succès, ils pourront faire partie du dispositif du premier volet à savoir le volet formation et renforcement de capacités. En effet, pour que les jeunes entreprennent, ou sachent qu’ils peuvent réussir dans la vie sans nécessairement bénéficier d’un travail de bureau, et comprennent que l’on peut s’auto-développer autrement, il va falloir que nous mobilisions les expériences de ceux qui ont réussi dans le domaine afin qu’ils puissent effectivement impulser et représenter le modèle que les autres puissent suivre.
Pour ce faire, nous les associerons dans les dispositifs de renforcement de capacité en essayant d’apporter leur expérience qui sera certainement différente de la formation théorique que vont dispenser les jeunes intellectuels.
Y a-t-il des secteurs qui vous paraissent prioritaires en termes d’investissement du PAEEJ ?
Le PAEEJ développera ses activités dans 7 domaines. Il y a d’abord l’agrobusiness, l’industrie, la petite et la moyenne. Dans l’agrobusiness il y a également l’industrie transformatrice. Par exemple, le fait de fabriquer des cosmétiques ou d’autres produits qui ne sont pas nécessairement et directement issus de l’agriculture. On a ensuite l’énergie, les TIC, l’écotourisme, l’eau et l’assainissement, et enfin le transport.
Les 7 domaines prioritaires ont été fixés à partir de deux documents majeurs : le PND (Programme National de Développement) et les ODD (Objectifs de Développement Durables). Entre les sept, il peut arriver que l’agrobusiness, l’écotourisme et les TIC, par exemple, soient davantage prioritaires que les autres. Mais cela dépendra évidemment des projets qui seront déposés par les jeunes.
Toutefois, je précise qu’en lien avec le slogan du Gouvernement “Chaque bouche doit avoir à manger et chaque poche doit avoir de l’argent”, l’agrobusiness sera parmi les domaines les plus prioritaires. Pour une simple raison: c’est qu’en plus de ce slogan, le Burundi reste quand même un pays fondamentalement agricole.
Donc, si le Burundi est agricole, il faut mettre l’accent sur ce domaine qui peut également être porteur. Une grande partie des jeunes se trouvent dans les campagnes où les seules opportunités possibles sont notamment liées à l’agriculture. Mais pour pouvoir encourager les jeunes à s’investir dans ce domaine, il faudra évidement revaloriser les revenus agricoles.
Un projet comme le vôtre souffre parfois de l’ingérence des puissants, qui voudraient que vous financiez telle entreprise plutôt qu’une autre ou telle commune/province plutôt que telle ? Saurez-vous résister à ces pressions ?
J’en suis conscient, je ne suis pas non plus très naïf. Rappelez-vous que j’ai été nommé, et la seule ingérence que je pourrais accepter c’est celle de la personne qui m’a nommé. Je vais tout faire pour évidement résister contre toutes ces formes d’ingérence. Laissez-moi vous faire une confidence: généralement, les influences des uns et des autres s’observent parce qu’ils savent qu’ils vous tiennent par quelque chose. Moi, personne ne me tient.
Maintenant, comme je vous l’ai dit, la seule influence, et la seule injonction que je peux accepter, c’est l’ingérence de la personne qui m’a nommé à ce poste, et lui, il ne peut vouloir une chose et cultiver son contraire.
Des inquiétudes sur la transparence dans le choix des bénéficiaires des fonds du PAEEJ, quelle assurance donnez-vous par rapport à cela ?
Tout le monde doit se sentir rassuré. Le Burundi compte plus de 3.000 collines, sur chaque colline il y aura au moins un projet des jeunes qui sera financé. Mais vous devez comprendre aussi qu’on ne pourra pas financer tous les jeunes. C’est pour cela que j’invite évidemment les jeunes à davantage se regrouper pour pouvoir opérer ensemble.
Bien évidemment, les critères de sélection des jeunes ou de leurs projets seront rendus publics avec un système de cotation bien clair. C’est-à-dire que nous allons essayer d’être le plus transparents possibles. Il n’y aura pas de secret. En revanche, les jeunes qui pensent qu’ils vont évidemment pouvoir emmarger sur le compte PAEEJ, sans ambition ou alors sans capacité entrepreneuriale, ceux-là peuvent déjà déchanter.
Même chose pour toute personne qui penserait que comme 48 milliards Fbu est une grosse somme, il y aurait des gens qui vont venir emmarger un milliard, deux milliards, ainsi de suite, non. Ça ne va pas se passer comme ça. Et comme le disait un sage : « Vous allez nous juger sur nos actes ». Je vais tout faire pour qu’évidemment rien ne puisse échapper à ma vigilance.
Quid de votre carrière de professeur et de chercheur en Sociologie ? Est-elle mise entre parenthèse ?
Ma carrière d’enseignant, de professeur et de chercheur va certainement en prendre un coup surtout pour ce qui concerne l’enseignement car cela exige beaucoup de temps. Je ne serai pas en mesure de dispenser le nombre des cours comme je le faisais auparavant.
J’aurai certainement deux ou trois cours mais je vais continuer à faire de la recherche, et cette fois-ci, dans le domaine de la sociologie du développement. Je suis sociologue de la population et du développement, les questions principales qui se posent dans les sciences de la sociologie sont simples: pourquoi ici il y a le développement, et pourquoi pas là-bas ? Qu’est ce qui explique le sous-développement ou alors le développement du sous-développement d’un certain nombre du territoire et qu’est ce qui peut expliquer le développement des autres ?
Nous avons fait des études assez comparatives afin de comprendre le comportement des populations en lien avec le développement. Concrètement, ce qu’il faut comprendre, c’est que l’absence de développement dans un espace bien précis ne préjuge pas de l’incapacité du territoire en question à pouvoir se développer.
Le développement, c’est une construction sociale et tout ce qui est construction sociale, rend compte de l’importance et de la participation des êtres humains. Il est vrai que jusque-là les travaux que j’ai publiés s’inscrivent davantage dans les domaines sociopolitiques.
Pour la première fois, je vais donc pouvoir faire des recherches dans le domaine qui est le mien, à savoir la sociologie du développement car je disposerai d’un échantillon assez important. Observer les comportements en lien avec les problématiques du développement et les lier avec les initiatives du gouvernement, c’est une opportunité importante de pouvoir discuter de toutes les théories du développement.
Si donc au bout de 5 à 6 ans, 7 ou à 10 ans, on se rend compte que le comportement des jeunes n’a pas changé, il faudra dès lors soit questionner le programme, ou soit questionner les jeunes eux-mêmes.
Bibliographie de l’équipe de coordination du PAEEJ (de gauche à droite):
– Dr Hassan Kibeya (Génie électrique, Université de Sfax, Tunisie): Chef de Département à l’Université du Burundi, chercheur et programmeur, il est chargé de l’entrepreneuriat des jeunes au sein du PAEEJ
– Clarisse Nsabimana (Master en Ressources Humaines, Dakar): membre de la Cellule d’appui aux jeunes entrepreneurs à l’ISCO, maître-assistante à l’Université du Burundi, c’est le Chef de l’administratif et du financier du PAEEJ
– Pr Désiré Manirakiza (spécialiste des questions de population et de développement, Université de Franche-Comté & Université Neuchâtel): professeur des universités (Burundi et Cameroun), c’est le Coordinateur national du PAEEJ
– Alida Niyongabo (Master en communication institutionnelle, Ouganda): professeur à l’Université Lumière de Bujumbura, c’est la Responsable du Service “Renforcement des capacités” au sein du PAEEJ