Mars, le mois de la femme. Après notre premier numéro consacré au slip, qui nous a d’ailleurs valu pas mal d’incompréhensions, voici le second rendez-vous, que nous devrions prendre avec moins de légèreté. Et puisque l’intérêt du Magazine Jimbere porte sur le « fait social », quoi de mieux que le cycle menstruel pour parler de la femme ?
Ricanements, gêne, refus, regards dubitatifs, énervement… : on en a vu de toutes les couleurs en cherchant de l’information sur le sujet. Car le tabou qui entoure les questions liées au cycle menstruel est profond, instinctif. Même les femmes d’un certain âge, à quelques exceptions près, étaient sidérées qu’on en parle.
Tout cela a une histoire : la Burundaise en a souffert, de son « réglage ». A l’époque du Burundi « ancien », considérée comme souillée, impure, portant la poisse, il fallait l’isoler de tout contact humain (même et surtout des vaches, c’est dire!) …
Heureusement cette époque est révolue.
Cependant, le mystère qui entoure le cycle menstruel reste, les réflexes culturels ayant le cuir solide. Notre société ne veut pas en entendre parler, encore moins de menstruations. Pour s’en rendre compte, il suffit de voir comment les jeunes pubères éprouvent des difficultés pour s’acheter des serviettes hygiéniques à la boutique située tout près de chez elles, ou encore de décortiquer les expressions utilisées dans le langage courant pour évoquer les menstruations. Certaines disent, le regard baissé, qu’elles sont « indisposées », d’autres qu’elles ont « les communistes » en référence au rouge du sang.
Pour la Rédaction de Jimbere, nous pensons qu’il est temps de déstigmatiser la question du cycle menstruel. Inutile de se cacher derrière la pudeur « traditionnelle », ni les convenances moralistes imposées par la religion. Pour contrer une croissance démographique qui risque de doubler la population burundaise en 20 ans avec un sol morcelé, exténué d’exploitation, osons parler ouvertement du cycle menstruel. Enseignons-le, publiquement et clairement. Parlons de la durée de vie du spermatozoïde et de la période d’ovulation, apprenons à chaque Burundaise à se munir d’un petit tableau qui figure son calendrier intime, faisons comprendre aux maris et copains l’importance de respecter les caprices sacrés du corps féminin. Car, avec cela, le Burundi ne compterait pas 2500 cas de grossesses (connus !) en milieu scolaire en une seule année.
Il s’agit ici de santé. De dignité. Et de développement durable.
