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Canjo Amissi, 23 ans après: un souffle poétique toujours inégalé

Il y a 23 ans, disparaissait une véritable légende de la musique moderne burundaise, après une riche carrière de 19 ans

« Je ne suis pas venu dans l’orchestre pour être un simple figurant[…]. Je suis venu développer les acquis que j’ai dans l’art musical de nos ancêtres, afin de prouver au monde entier que la culture de mon pays a des richesses qu’on ne trouvera nulle part ailleurs ». La tirade conquérante est d’un certain Canjo Amissi, un jeunot de 20 ans qui, en 1977, reçoit le prix du premier lauréat du Concours national de la chanson burundaise. Au jour de son départ dans l’autre monde, le 3 avril 1996, il aura tenu à sa promesse.

Repéré en 1977 par le ministre de la Jeunesse, Sport et de la Culture d’alors, le Pr Emile Mworoha, Canjo Amissi est destiné à être incorporé dans le club des fins connaisseurs de la musique en cours de formation: l’Orchestre Nationale. Son jeune âge n’empêche pas le natif de Ngozi de se poser en véritable leader de la nouvelle génération musicale. « Musicien-poète au talent inépuisable sur sa guitare, il avait une voix derrière le micro, riche et mélancolique, qu’aucun autre musicien n’a jamais su imiter jusqu’à ce jour au Burundi” se rappelle Mgr Justin Baransananiye, un compère d’alors qui finira par fonder l’École de Musicologie de Gitega. « D’un coup d’essai, il pouvait en sortir un morceau de maître ! ».

De l’Orchestre Nationale où il passe une année au groupe « Amabano » où il bâtira le gros de sa glorieuse carrière avec Africa Nova, de Ntacica nk’irungu, sa toute première chanson à “Ntukajane nyabahururu” sa dernière, bien qu’issu d’un milieu swahilophone, Canjo Amissi se démarque en véritable héritier et promoteur de la poésie burundaise jusqu’au 3 avril 1996, quand il s’éteint à juste 39 ans.

Malgré une courte carrière de 19 ans, sa mélodieuse voix continue toujours de bercer la société burundaise, à laquelle il légua une magnifique définition de l’homme véritable.

Un monument oublié

23 ans après le départ prématuré du leader de la révolution musicale au Burundi, sa famille déplore le peu de considération qu’on réserve à sa personne : « On a même jamais songé à rectifier l’erreur commise sur sa date de décès. Officiellement, on commémore sa mort le 6 avril mais en réalité, il nous a quittés le 3 avril 1996 et a été inhumé le même jour. Le ministère de la Culture est conscient de l’erreur. Pour la famille, le 6 avril se rapporte à d’autres événements », explique Cathérine Majanja dite “Cathy”, l’épouse de feu Canjo Amissi. « Nous aurions aimé que la reconnaissance de ses services soit manifestée par plus d’actions que des paroles ».

Et Mgr Justin Baransananiye de l’appuyer : « Canjo mérite plus de reconnaissance. C’est bien que sa biographie soit sur Wikipédia. Mais cela ne suffit pas, il faut un prix musical national en son nom », avance-t-il. Par ailleurs, “le ministère de la Culture, en concertation avec la RTNB, devrait certifier auprès de l’Office Burundais du Droit d’Auteur (OBDA) les chansons de l’Orchestre National et du groupe Amabano afin que celles-ci puissent profiter à leurs auteurs ou à leurs familles, pour ceux qui ne sont plus”.

A sa mort, Canjo Amissi aura remporté le Prix Découvertes de la RFI et le Prix Calao en 1981, avec sa célèbre chanson “Sokuru yari intwari”, ainsi que le Prix Moulin avec le groupe Amabano.
Aujourd’hui, sa chanson « Ewe burundi, ngira ndakuririmbe » est établi comme indicateur de l’ouverture des émissions de la Télévision Nationale.

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